AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu que M. Bernard X... est né le 19 septembre 1978 ; que par acte du 16 juillet 1998, il a assigné M. Y... en recherche de paternité et paiement de dommages-intérêts ;
que M. Y... a soulevé la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée d'un arrêt de la cour d'appel de Toulouse du 17 novembre 1983 ayant rejeté l'action en recherche de paternité engagée par Mme X... au nom de son fils mineur et lui ayant accordé des subsides ; que, par le premier arrêt attaqué, la cour d'appel a déclaré recevable l'action de M. X... ; que, par le second, M. Y... a été reconnu comme étant son père naturel et a été condamné à lui verser la somme de 100 000 francs de dommages-intérêts ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. Y... fait grief au premier arrêt attaqué d'avoir déclaré l'action en recherche de paternité recevable, alors, selon le moyen,
1 / que l'action en recherche de paternité n'appartient qu'à l'enfant, même si, durant la minorité de celui-ci, elle est exercée par la mère ; que s'il l'a exercée pendant sa minorité et qu'il a été débouté, il ne pourra plus l'exercer à sa majorité pour les mêmes causes ; que Mme X... avait exercé une action contre M. Y... pendant la minorité de son fils dont elle avait été déboutée ; qu'en déclarant recevable la nouvelle action engagée par M. X..., fondée sur les mêmes pièces, la cour d'appel a violé l'article 340-4 du Code civil, ensemble l'article 1351 du même Code ;
2 / qu'en énonçant que l'arrêt du 17 novembre 1983 avait débouté Mme X... au motif que la lettre qu'elle produisait n'établissait pas de manière non équivoque la paternité de M. Y..., la cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ;
3 / qu'en dénaturant l'arrêt du 17 novembre 1983, la cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ;
Mais attendu que l'arrêt attaqué (Toulouse, 15 mars 2001) retient que l'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt du 17 novembre 1983 est limitée au cas d'ouverture de l'article 340, 3 du Code civil dans sa rédaction antérieure à la loi du 8 janvier 1993 ; qu'en relevant que les relations pendant la période légale de conception et le résultat de l'expertise sanguine constituaient des présomptions et indices graves rendant l'action recevable au regard de l'article 340 dans sa nouvelle rédaction, la cour d'appel a exactement décidé que l'action nouvelle étant fondée sur une autre cause ne se heurtait pas à la chose précédemment jugée sur le fondement des textes anciens ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le second moyen :
Vu l'article 1382 du Code civil ;
Attendu que pour allouer à M. X... une somme de cent mille francs de dommages-intérêts, l'arrêt retient qu'il établit du fait de l'attitude de M. Y... au cours des diverses procédures le préjudice moral qu'il subit ;
Qu'en statuant ainsi, sans caractériser une faute commise par M. Y... dans l'exercice des voies de recours, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi formé par M. Y... contre l'arrêt de la cour d'appel de Toulouse du 15 mars 2001 rectifié par l'arrêt du 19 mars 2002 ;
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné M. Y... à payer à M. X... une somme de 100 000 francs de dommages-intérêts, l'arrêt rendu le 18 décembre 2001, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse, autrement composée ;
Condamne M. Bernard X... aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un septembre deux mille cinq.