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20/09/2005 | FRANCE | N°03-30709

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 20 septembre 2005, 03-30709


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 7 octobre 2003), que la société Thomson CSF, actuellement dénommée Thales training et simulation (TTS), a, en 1990, conformément aux dispositions de la loi n° 70-1322 du 31 décembre 1970 relative à l'ouverture d'options de souscription ou d'achat d'actions au bénéfice du personnel des sociétés, proposé à certains de ses salariés d'acquérir, au prix de 117 francs, des actions dont la valeur de

référence était fixée à 140,21 francs ; que certains bénéficiaires ayant exercé cet...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 7 octobre 2003), que la société Thomson CSF, actuellement dénommée Thales training et simulation (TTS), a, en 1990, conformément aux dispositions de la loi n° 70-1322 du 31 décembre 1970 relative à l'ouverture d'options de souscription ou d'achat d'actions au bénéfice du personnel des sociétés, proposé à certains de ses salariés d'acquérir, au prix de 117 francs, des actions dont la valeur de référence était fixée à 140,21 francs ; que certains bénéficiaires ayant exercé cette option en 1996 alors que la moyenne des cours de bourse s'élevait à 130 francs, l'URSSAF a réintégré dans l'assiette des cotisations sociales mises à la charge de la société la fraction de l'avantage correspondant à la différence entre le cours des actions à la date de levée de l'option et le prix de souscription de ces actions excédant 5 % de la valeur des actions au jour de l'attribution de l'option; que la cour d'appel a rejeté le recours de la société ;

Attendu que la société TTS fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir ainsi statué alors, selon le moyen :

1 / que l'acte par lequel une personne s'engage à céder à une autre un bien moyennant un prix déterminé constitue, dès lors qu'il est accepté par le bénéficiaire de l'offre, un contrat ; qu'en décidant que l'attribution d'option ne constituait pas un contrat cependant que l'offre par laquelle la société Thales avait consenti à certains de ses salariés des options d'achat d'actions avait été acceptée par les bénéficiaires, et en en déduisant que le principe de non rétroactivité de la loi ne s'appliquait pas à la situation née de l'attribution des options, la cour d'appel a violé les articles 2 et 1101 du Code civil ;

2 / que l'acte par lequel une personne s'engage à céder à une autre un bien constitue, dès lors qu'il est accepté par le bénéficiaire de l'offre, un contrat ; que la nature contractuelle d'un acte est en conséquence indépendante de la qualification qu'ont voulu lui donner les parties ; qu'en décidant que le principe de non rétroactivité ne pouvait s'appliquer que si la société démontrait qu'elle avait entendu conférer une nature contractuelle aux options, cependant que le simple accord des bénéficiaires de l'option à l'offre de souscription entraînait la conclusion d'une promesse de vente, la cour d'appel a encore violé les articles 2 et 1101 du Code civil et 12 du nouveau Code de procédure civile ;

3 / qu'en décidant que la société ne démontrait pas que l'attribution d'option avait une nature contractuelle dans la mesure où elle ne démontrait pas que cette attribution aurait constitué un élément de salaire, sans répondre au moyen soulevé par la société Thales et tiré de ce que cette attribution constituait une promesse unilatérale de vente, la cour d'appel a entaché sa décision de défaut de réponse à conclusions et violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

4 / que l'URSSAF s'était bornée, devant la cour d'appel, à solliciter la confirmation du jugement et n'avait pas soutenu que la nature contractuelle de l'attribution de stock options impliquait qu'elle constitue un élément de salaire ; que les juges n'avaient pas davantage invité les parties à formuler leurs observations sur ce moyen; qu'en se fondant cependant pour rejeter les demandes de la société Thales sur le fait qu'elle ne démontrait pas que cette attribution aurait constitué un élément de salaire, la cour d'appel a violé les articles 4 et 16 du nouveau Code de procédure civile ;

5 / que l'URSSAF s'était bornée, devant la cour d'appel, à solliciter la confirmation du jugement et n'avait pas soutenu que l'attribution de stock options ait constitué une libéralité ; que les juges n'avaient pas invité les parties à formuler leurs observations sur cette qualification et que la société Thales ne l'avait pas davantage évoquée;

qu'en écartant cependant l'argumentation développée par la société Thales qui faisait valoir que l'attribution d'option présentait une nature contractuelle au motif qu'elle constituait en fait une libéralité, la cour d'appel a derechef violé les articles 4 et 16 du nouveau Code de procédure civile ;

6 / que l'existence d'une libéralité suppose que soit caractérisée l'intention libérale du tradens ; qu'en décidant que l'attribution de stock options constituait une libéralité sans caractériser l'intention libérale de la société Thales, la cour d'appel a violé l'article 894 du Code civil ;

7 / qu'il incombe à celui qui se prévaut de l'existence d'une donation de prouver l'existence de l'intention libérale ; qu'en retenant la qualification de libéralité au motif que la société ne démontrait pas que la libéralité s'était transformée en gratification contractuelle, cependant qu'il incombait préalablement à l'URSSAF de démontrer l'existence de l'intention libérale, la cour d'appel a violé les articles 894 et 1315 du Code civil ;

Mais attendu que si l'option d'achat d'actions, instituée par la loi n° 70-1322 du 31 décembre 1970, constitue une promesse unilatérale faite par une société par actions à certains de ses salariés ou mandataires sociaux de leur vendre sur leur demande un nombre déterminé de ses actions dans un délai et moyennant un prix définitivement fixés, les effets de la levée d'option ne sont soumis à la loi en vigueur à la date de la formation du contrat qu'à défaut de dispositions formelles de la loi nouvelle ;

Et attendu qu'il résulte de l'article L. 242-1 du Code de la sécurité sociale modifié par l'article 49 de la loi n° 95-116 du 4 février 1995 et de l'article 80 bis II du Code général des impôts modifié par la loi de finances rectificative pour 1993 n° 93-869 du 22 juin 1993, que la disposition abaissant de 10 % à 5 % le seuil au-delà duquel le rabais consenti par la société sur le prix d'option par rapport à la valeur de l'action était soumis en tant que salaire à l'impôt sur le revenu et devait en conséquence être intégré comme tel dans l'assiette des cotisations sociales, était expressément applicable aux options levées à compter du 1er janvier 1995 et s'imposait de ce fait aux options levées par les salariés de la société TTS en 1996 ;

D'où il suit que, par ce motif de pur droit substitué à ceux critiqués, la décision déférée se trouve légalement justifiée en son dispositif ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Thales training et simulation aux dépens ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt septembre deux mille cinq.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 03-30709
Date de la décision : 20/09/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

LOIS ET REGLEMENTS - Non-rétroactivité - Principe - Exception en matière civile - Disposition formelle d'une loi nouvelle - Portée.

VENTE - Promesse de vente - Promesse unilatérale - Applications diverses - Option d'achat d'actions

SOCIETE ANONYME - Actionnaires - Actions - Plan d'options sur actions - Option octroyée au salarié - Exercice - Effets - Loi applicable

CONTRAT DE TRAVAIL, EXECUTION - Salaire - Primes et gratifications - Prime ou gratification liée aux résultats de l'entreprise - Plans d'options sur actions - Option - Exercice - Effets - Loi applicable

L'option d'achat d'actions instituée par la loi n° 70-1322 du 31 décembre 1970 constitue une promesse unilatérale de vente. Les effets de la levée de cette option ne sont soumis à la loi en vigueur à la date de formation du contrat qu'à défaut de dispositions formelles d'une loi nouvelle.


Références :

Code civil 2
Code de la sécurité sociale L242-1
Code général des impôts 80 bis II
Loi 70-1322 du 31 décembre 1970

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 07 octobre 2003

Sur la portée de la loi nouvelle sur les contrats conclus antérieurement, à rapprocher : Chambre civile 1, 2001-12-04, Bulletin 2001, I, n° 307, p. 195 (rejet), et les arrêts cités. Sur les effets de la levée de l'option d'achat d'actions en matière de cotisations de sécurité sociale, à rapprocher : Chambre sociale, 2002-10-24, Bulletin 2002, V, n° 319, p. 307 (rejet).


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 20 sep. 2005, pourvoi n°03-30709, Bull. civ. 2005 II N° 223 p. 198
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2005 II N° 223 p. 198

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Dintilhac.
Avocat général : Avocat général : Mme Barrairon.
Rapporteur ?: Rapporteur : Mme Duvernier.
Avocat(s) : Avocat : la SCP Célice, Blancpain et Soltner.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2005:03.30709
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