AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu que, selon l'arrêt attaqué, le Journal du dimanche a fait paraître le 29 octobre 2000 un article intitulé "Un massacre pour 3 200 francs" relatant l'attaque par un commando armé d'un fourgon blindé au cours de laquelle un convoyeur a été tué et deux autres blessés, illustré par une phographie représentant M. X..., commandant de police, en charge de la lutte contre les vols à main armée au sein de la brigade de répression du banditisme ; qu'estimant que ce cliché portait atteinte à sa vie privée et violait le droit dont il dispose sur son image, M. X... a fait assigner la société Hachette Filipacchi associés qui édite le Journal du dimanche ;
Sur le premier moyen pris en ses deux branches :
Attendu que la société Hachette Filipacchi associés fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action de M. X..., alors, selon le moyen :
1 / qu'en s'abstenant de répondre au moyen selon lequel le seul fondement de l'action de M. X..., qui ne visait aucune atteinte au respect de sa vie privée mais qui reprochait à l'organe de presse d'avoir, par la publication de son image rendu possible son identification au mépris des impératifs de sécurité, était l'article 39 sexiès de la loi du 29 juillet 1881 et était donc irrecevable, faute d'avoir été engagée dans le délai de l'article 65 de cette loi, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
2 / qu'en accueillant l'action de M. X... sur le fondement des articles 9 et 1382 du Code civl, la cour d'appel a violé ces textes ainsi que les articles 39 sexiès et 65 de la loi du 29 juillet 1881 ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui a exactement énoncé que le non respect du droit au respect de l'image ne saurait être confondu avec la révélation de l'identité des demandeurs, telle que prévue à l'article 39 sexiès de la loi du 29 juillet 1881, en a déduit à bon droit que ce texte ne trouvait pas à s'appliquer en l'espèce ;
Mais sur le second moyen pris en ses quatre premières branches :
Vu l'article 9 du Code civil ;
Attendu que pour condamner la société Hachette Filipacchi associés à payer à M. X... la somme de 4 500 euros à titre de dommages-intérêts, la cour d'appel a énoncé que si le droit à l'information reconnu par l'article 10 paragraphe 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les principes jurisprudentiels qui en sont l'application autorisent la publication, à titre d'illustration d'un article consacré à un événement d'actualité, de l'image de personnes présentes sur les lieux, c'est à la condition, non remplie en l'espèce, que la personne dont l'image est publiée participe directement à l'évènement d'actualité, en ce qu'elle y est intimement impliquée, ce qui n'est pas le cas de M. X... qui n'était pas présent sur les lieux lors de l'attaque et qui n'y est apparu que postérieurement afin d'exercer sa mission de police judiciaire sur l'infraction commise ; que le fait que l'article soit consacré à l'attaque du fourgon et aux circonstances de son élucidation ne suffit pas à justifier l'atteinte portée au droit à l'image de M. X... par la publication sans son consentement d'un cliché photographique le représentant en train d'effectuer les constatations d'usage, cette publication n'étant pas une illustration nécessaire et pertinente de l'article ;
Qu'en statuant ainsi alors que la publication de l'image de personnes directement impliquées dans un événement est licite et que tel est le cas de celle du cliché représentant un policier qui procède aux constatations consécutives à l'attaque d'un véhicule, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Vu l'article 627, du nouveau Code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce que l'arrêt attaqué a condamné la société Hachette Filipacchi asociés à payer à M. X... une somme de 4 500 euros au titre de la publication de son image, l'arrêt rendu le 20 novembre 2003, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;
Dit n'y avoir lieu à renvoi ;
Déboute M. X... de sa demande de ce chef ;
Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes des parties ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq juillet deux mille cinq.