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01/06/2005 | FRANCE | N°04-85031

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 01 juin 2005, 04-85031


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de justice à PARIS, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur les pourvois formés par :

- LE PROCUREUR GENERAL PRES LA COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE,

- L'ADMINISTRATION DES IMPOTS, partie civile,

contre l'arrêt de ladite cour d'appel, 5ème chambre, en date du 30 juin 2004, qui, dans la procédure suivie contre Antoine X..., des chefs de fraude fiscale et omission d'écritures en comptabilité, a prononcé la nullité de la procédure ;

La COU

R, statuant après débats en l'audience publique du 19 mai 2005 où étaient présents : M. Cotte ...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de justice à PARIS, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur les pourvois formés par :

- LE PROCUREUR GENERAL PRES LA COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE,

- L'ADMINISTRATION DES IMPOTS, partie civile,

contre l'arrêt de ladite cour d'appel, 5ème chambre, en date du 30 juin 2004, qui, dans la procédure suivie contre Antoine X..., des chefs de fraude fiscale et omission d'écritures en comptabilité, a prononcé la nullité de la procédure ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 19 mai 2005 où étaient présents : M. Cotte président, M. Rognon conseiller rapporteur, MM. Pibouleau, Challe, Roger, Dulin, Mmes Thin, Desgrange, M. Chanut, Mme Nocquet conseillers de la chambre, M. Soulard, Mmes Salmeron, Labrousse conseillers référendaires ;

Avocat général : M. Fréchède ;

Greffier de chambre : Mme Randouin ;

Sur le rapport de M. le conseiller ROGNON, les observations de Me FOUSSARD, de Me BLONDEL, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général FRECHEDE, les avocats des parties ayant eu la parole en dernier ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

Sur le moyen unique de cassation, proposé par le procureur général, pris de la violation des articles 1741,1743 du Code général des impôts, L. 47 du Livre des procédures fiscales, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;

Sur le premier moyen de cassation, proposé par Me Foussard pour l'administration des Impôts, pris de la violation des articles 1741 et 1743 du Code général des impôts, de l'article L. 47 du Livre des procédures fiscales, du principe de l'autonomie des procédures relatives à l'établissement de l'impôt et de l'action publique du chef de fraude fiscale et d'irrégularités comptables, des articles 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré la vérification irrégulière, annulé la procédure pénale et renvoyé le ministère public et l'Administration à se mieux pourvoir ;

"aux motifs qu'Antoine X... fait valoir qu'il n'a pas été destinataire de l'avis de vérification de comptabilité de la société EGCR et que cette vérification s'est faite hors de sa présence ; qu'il a été privé du débat oral et contradictoire auquel il avait droit, en sa qualité de dirigeant de fait de la société ; que cette irrégularité, qui a porté atteinte à une garantie essentielle des droits de la défense, entraîne la nullité de la procédure ; que l'administration des Impôts fait valoir en réponse qu'elle n'avait pas connaissance de la qualité de dirigeant de fait du prévenu, à la date de l'envoi de l'avis de vérification, le 27 mai 1998 ; que sur ce point, l'inspecteur des Impôts Monique Y... déclare à la barre qu'à la date de l'envoi de l'avis de vérification de comptabilité, l'administration avait de " fortes présomptions " de la gérance de fait d'Antoine X..., tant en raison de la mise en cause de ce dernier par Elisabeth Z..., gérante statutaire de la SARL EGCR, qui l'avait dénoncé en tant que tel, qu'en considération de la répartition du capital de la société, dans la mesure où Laure X..., fille de l'intéressé, détenait à elle seule plus de 76% des parts sociales ; que Monique Y... explique, par ailleurs, que l'administration fiscale n'a pas voulu adresser l'avis de vérification à Antoine X..., parce qu'elle n'avait pas à cette date la " certitude " de sa qualité de gérant de fait de la SARL EGCR et qu'elle était tenue de ne pas divulguer à des tiers les informations recueillies dans le cadre de la procédure de vérification de cette société ; qu'en droit, le dirigeant de fait d'une société commerciale doit bénéficier d'un débat oral et contradictoire au cours de la vérification de comptabilité de cette dernière, dès lors que sa qualité était connue de l'Administration lors de l'envoi de l'avis de vérification ; qu'en l'espèce, il résulte des déclarations précitées de Monique Y..., corroborées par l'envoi, le jour même de l'avis de vérification de comptabilité de la société EGCR, d'un avis de vérification aux époux X..., portant examen contradictoire de l'ensemble de leur situation fiscale personnelle, qu'à la date d'envoi de l'avis de vérification de comptabilité de la société, l'administration des Impôts avait la connaissance de la qualité de dirigeant de fait du prévenu, peu important à cet égard qu'elle en ait ou non acquis la certitude ; qu'il s'ensuit qu'en privant Antoine X... du débat oral et contradictoire auquel il avait droit en sa qualité de gérant de fait de la société EGCR, l'administration fiscale a porté atteinte à une garantie essentielle des droits à la défense du prévenu ; que cette irrégularité entraîne la nullité de la procédure sur laquelle sont fondées les poursuites pénales ;

"alors qu'en cas de vérification fiscale d'une société, les dispositions de l'article L. 47 du Livre des procédures fiscales et le principe d'un débat oral et contradictoire au cours de la vérification doivent bénéficier au représentant légal de la société contribuable, et à lui seul ; qu'au cas d'espèce, en décidant que le dirigeant de fait avait également droit à un débat oral et contradictoire, les juges du fond ont violé les textes susvisés" ;

Les moyens étant réunis ;

Vu l'article L. 47 du Livre des procédures fiscales ;

Attendu que, selon ce texte, la vérification de comptabilité, qui ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été préalablement averti, n'implique pas l'envoi ou la remise de l'avis de vérification à une personne autre que le redevable de l'impôt ou son représentant légal ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt infirmatif attaqué que la société EGCR, déclarée en redressement judiciaire le 4 mai 1998 puis en liquidation judiciaire le 8 juin 1998, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité par avis notifiés le 27 mai 1998 à Elisabeth Z..., gérante statutaire, ainsi qu'à Me A..., représentant des créanciers ensuite nommé liquidateur judiciaire, avec lesquels se sont déroulées les opérations contradictoires du contrôle ; que, poursuivi en qualité de gérant de fait de la société, pour, d'une part, l'avoir frauduleusement soustraite à l'établissement et au paiement de la TVA exigible au titre de la période du 1er février 1997 au 30 avril 1998, en souscrivant des déclarations minorées du chiffre d'affaires taxables, et de l'impôt sur les sociétés dû pour l'exercice clos le 31 décembre 1997, en s'abstenant volontairement de souscrire dans les délais prescrits la déclaration des résultats qui lui incombait, d'autre part, pour avoir omis, pour cet exercice, de passer ou faire passer des écritures dans les livres et comptes obligatoires, Antoine X... a régulièrement soulevé l'exception de nullité des poursuites, prise de la méconnaissance, à son égard, des dispositions de l'article L. 47 précité ;

Attendu que, pour prononcer la nullité de la procédure, l'arrêt énonce, notamment, que le gérant de fait doit bénéficier d'un débat oral et contradictoire lorsque sa qualité est connue de l'Administration à la date d'envoi de l'avis de vérification ;

Mais attendu qu'en statuant ainsi, alors que l'avis de vérification ne devait être notifié qu'à l'adresse du siège social de la personne morale redevable de l'impôt prise en la personne de son représentant légal, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée du texte susvisé et du principe ci-dessus énoncé ;

Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres moyens proposés ,

CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, en date du 30 juin 2004, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Lyon, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel d'Aix-en-Provence et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le premier juin deux mille cinq ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 04-85031
Date de la décision : 01/06/2005
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

IMPOTS ET TAXES - Impôts directs et taxes assimilées - Procédure - Infractions - Constatation - Vérifications ou contrôle - Avis de vérification - Destinataire.

IMPOTS ET TAXES - Impôts directs et taxes assimilées - Procédure - Infractions - Constatation - Vérifications ou contrôle - Vérification de la situation fiscale ou de la comptabilité du contribuable - Formalités - Débat oral et contradictoire - Bénéficiaire - Gérant de fait (non)

La vérification de comptabilité, qui ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été préalablement averti, n'implique pas l'envoi ou la remise de l'avis de vérification à une personne autre que le redevable de l'impôt ou son représentant légal (arrêts n°s 1 et 2). Encourt dès lors la censure l'arrêt d'une cour d'appel qui, pour prononcer la nullité de la procédure, énonce que le gérant de fait d'une société doit bénéficier d'un débat oral ou contradictoire lorsque sa qualité est connue de l'administration des Impôts à la date d'envoi de l'avis de vérification (arrêt n° 1).


Références :

Livre des procédures fiscales L47

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 30 juin 2004

En sens contraire : Chambre criminelle, 2000-03-01, Bulletin criminel 2000, n° 99 (arrêts n°s 1 et 2), p. 295 (rejet).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 01 jui. 2005, pourvoi n°04-85031, Bull. crim. criminel 2005 N° 170 p. 596
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2005 N° 170 p. 596

Composition du Tribunal
Président : M. Cotte
Avocat général : M. Fréchède (arrêts n°s 1 et 2).
Rapporteur ?: M. Rognon (arrêt n° 1), M. Dulin (arrêt n° 2).
Avocat(s) : Me Foussard (arrêts n°s 1 et 2), Me Blondel(arrêt n° 1), Me Spinosi (arrêt n° 2).

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2005:04.85031
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