AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :
Attendu, que par acte notarié du 17 mai 1978, les époux X... de Y... ont fait donation-partage de leurs biens à leurs trois enfants, Michel, Jérôme et Jean-Marie ; que ce dernier a reçu un fonds de commerce et un immeuble à charge par lui de verser une soulte à ses deux frères et de servir une rente viagère aux donateurs ; qu'à la suite de son décès, son épouse et ses deux filles, ont cessé de servir la rente en soutenant en avoir été dispensées par un acte sous seing privé daté du 14 avril 1995 et comportant deux signatures arguées de faux par M. Z... ;
Attendu que M. Z... fait grief à l'arrêt attaqué (Amiens, 19 novembre 2002) d'avoir dit que l'acte de renonciation à rente viagère échappait au formalisme de l'article 931 du Code civil, alors, selon le moyen :
1 / que si les donations indirectes échappent en principe au formalisme de l'article 931 du Code civil, il n'en va pas ainsi de la renonciation à une créance par voie de simple remise de dette, dépourvue de toute forme venant se substituer à celle de la donation ; qu'en conséquence, la renonciation du donateur à la rente viagère assortissant une donation précédemment consentie doit revêtir la même forme authentique que la donation elle-même, peu important qu'elle soit constitutive d'une donation indirecte ; qu'en jugeant le contraire la cour d'appel a violé l'article 931 du Code civil par refus d'application ;
2 / que la donation indirecte est soumise aux conditions de fond non seulement de toute donation, quelle que soit sa forme, mais aussi de l'acte dont elle emprunte le support ; qu'en vertu de l'article 932 du Code civil, la donation entre vifs n'engage le donateur, et ne produit effet que du jour de son acceptation en termes exprès ; que la remise de dette est une convention qui implique non seulement le consentement du créancier mais aussi l'acceptation du débiteur ; qu'ainsi la donation d'une créance par voie de remise de dette ne peut être valablement constituée par acte unilatéral du créancier sans l'acceptation du débiteur ; que dans ses conclusions récapitulatives signifiées et déposées le 26 juin 2002, M. André Z... avait précisément fait valoir que l'acte du 14 avril 1995 ne pouvait constituer une donation valable, fût-elle indirecte, faute d'avoir été acceptée par les donataires ; qu'en ne procédant pas à la recherche ainsi demandée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 932 et 1285 du Code civil ;
Mais attendu, que si tout acte portant donation entre vifs doit être passé devant notaire, aucun texte n'oblige le donateur, qui entend renoncer postérieurement à une clause de cet acte, fût-elle protectrice de ses intérêts, à utiliser la forme authentique, de sorte qu'en retenant que M. et Mme Z... avaient pu renoncer au bénéfice de la rente mise à la charge de Jean-Marie Z... sans recourir à la forme authentique des libéralités entre vifs, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;
qu'en sa seconde branche, le moyen nouveau et mélangé de fait, est irrecevable ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Z... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de M. Z... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq avril deux mille cinq.