AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en deux branches :
Attendu que par décret du 3 septembre 1998 le tableau "le Cercle de la Rue Royale" de James Tissot, appartenant à M. X..., a été classé comme monument historique ; que le propriétaire a sollicité sur le fondement de l'article 16, alinéa 2 de la loi du 31 décembre 1913, la réparation du préjudice subi du fait de cette servitude ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué (Paris, 26 novembre 2001) de l'avoir débouté de sa demande d'indemnisation alors, selon le moyen :
1 ) qu'il résultait des appréciations de l'expert judiciaire entérinées par les juges du fond que la valeur du tableau sur le marché international était de 20 000 000 de francs et sur le marché français de 8 000 000 de francs ce dont il résultait à tout le moins une perte de valeur de 12 000 000 de francs résultant de la procédure de classement ;
2 ) que la cour d'appel qui pour refuser d'indemniser ce préjudice a fait état d'une offre unilatérale de l'Etat français d'acquérir le tableau à sa valeur internationale de 20 000 000 de francs, a ainsi soumis l'indemnisation du propriétaire à une condition non prévue par la loi, c'est à dire l'obligation de vendre immédiatement le tableau à l'Etat, en totale méconnaissance des prérogatives du propriétaire ; qu'ainsi l'arrêt qui a sous couvert de la procédure de classement d'office consacré une mesure indirecte de vente forcée des oeuvres d'art à l'Etat, sans indemniser le propriétaire du préjudice subi en raison de la mesure de classement, n'a pas justifié légalement sa décision au regard de l'article 16 de la loi du 31 décembre 1913 ;
Mais attendu que le propriétaire d'une oeuvre faisant l'objet d'une procédure le classement d'office n'est pas de ce fait soumis à l'obligation de la vendre à l'Etat ; que la cour d'appel après avoir retenu au vu du rapport d'expertise, par une décision motivée, que la valeur de l'oeuvre sur le marché international s'élevait à vingt millions de francs, a souverainement estimé que l'offre faite à deux reprises par le directeur des musées de France d'acquérir le tableau à ce même prix correspondait à la valeur de cette oeuvre sur le marché de l'art en France, de sorte que le propriétaire n'avait subi aucun préjudice ;
D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli dans aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de l'agent judiciaire du Trésor ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille cinq.