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22/02/2005 | FRANCE | N°03-11027

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 22 février 2005, 03-11027


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt confirmatif déféré (Lyon, 14 novembre 2002), que M. X..., employé par la société Application des gaz (société ADG) de 1971 à 1997 en qualité d'ingénieur, a été affecté à des activités de recherches ou d'études, qu'à ce titre, il relevait de la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie du 13 mars 1972, modifiée par avenants des 12 septembre 1983 et 25 janvier 1990 ; qu'après son lice

nciement en 1997, il a sollicité une rémunération supplémentaire pour les invention...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt confirmatif déféré (Lyon, 14 novembre 2002), que M. X..., employé par la société Application des gaz (société ADG) de 1971 à 1997 en qualité d'ingénieur, a été affecté à des activités de recherches ou d'études, qu'à ce titre, il relevait de la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie du 13 mars 1972, modifiée par avenants des 12 septembre 1983 et 25 janvier 1990 ; qu'après son licenciement en 1997, il a sollicité une rémunération supplémentaire pour les inventions dont il était l'auteur ou le co-auteur ; que la société ADG a rejeté cette demande au motif que M. X... avait été rémunéré forfaitairement et qu'aucune des inventions ne présentait l'intérêt exceptionnel dont l'importance serait sans commune mesure avec le salaire de l'inventeur tel que prévu par l'article 26 de la convention collective ; que par acte du 16 juillet 1998, M. X... a poursuivi judiciairement la société ADG en paiement d'une rémunération supplémentaire pour treize inventions datant de 1987 à 1996 ; que la société ADG a fait valoir que la demande afférente à certaines inventions était prescrite conformément aux dispositions de l'article 2277 du Code civil ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la société ADG fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré recevable comme non prescrite la demande de M. X..., alors, selon le moyen, que l'article 2277 du Code civil soumet à la prescription de cinq ans "les actions en paiement des salaires", sans exiger en outre ni qu'ils soient payables périodiquement, ni que leur montant soit fixé avant la demande ; qu'en présence d'une demande portant sur un complément de rémunération dont la nature salariale n'était pas contestée, la cour d'appel ne pouvait subordonner l'application de ce texte à deux conditions supplémentaires qu'il n'exige pas, sans violer, par refus d'application, ledit article 2277 du Code civil ;

Mais attendu qu'ayant relevé qu'il existait un litige entre les parties sur le montant de la rémunération supplémentaire due au titre de l'invention de mission, la cour d'appel qui a retenu que la prescription quinquennale n'atteint les créances que si elles sont déterminées et qu'il n'en est pas ainsi lorsque leur fixation fait l'objet d'un litige entre les parties, a, à bon droit, statué comme elle a fait ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que la société ADG reproche à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer à M. X... diverses sommes à titre de rémunération supplémentaire pour des inventions de salariés, alors, selon le moyen, que dès lors qu'aux termes même de l'article L. 611-7 du Code de la propriété intellectuelle, les conditions dans lesquelles le salarié bénéficie d'une rémunération supplémentaire sont déterminées par les conventions collectives, les dispositions desdites conventions collectives fixant ces conditions ne peuvent, fussent-elles antérieures à la loi être "réputées non écrites" ; qu'en statuant comme elle a fait, niant ainsi tout rôle à la convention collective malgré le renvoi exprès de la loi, la cour d'appel a violé l'article L. 611-7 du Code de la propriété intellectuelle ;

Mais attendu que l'article L. 611-7 du Code de la propriété intellectuelle, dans sa rédaction issue de la loi du 26 novembre 1990, modifiant l'article 1 ter de la loi du 13 juillet 1978 qui disposait que le salarié, auteur d'une invention de mission, pouvait bénéficier d'une rémunération supplémentaire, dispose que ce salarié doit dorénavant bénéficier d'une telle rémunération supplémentaire ; que l'arrêt relève par motifs propres et adoptés, que l'article 26 de la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie exclut la rémunération supplémentaire pour les inventions ne présentant pas pour l'entreprise un intérêt exceptionnel dont l'importance serait sans commune mesure avec le salaire de l'inventeur ; qu'en déduisant de ces constatations que l'article 26 de la convention collective, contraire au texte désormais applicable, lequel est d'ordre public, devait être réputé non écrit, dès lors que les clauses d'une convention collective ne peuvent restreindre les droits que le salarié tient de la loi, c'est à bon droit que la cour d'appel a statué comme elle a fait ; que le moyen n'est pas fondé ;

Et sur le troisième moyen :

Attendu que la société ADG fait grief à l'arrêt d'avoir alloué à M. X... une rémunération supplémentaire au titre des inventions "piezo", "coupleur prise de gaz" et "parevent repliable", alors, selon le moyen, que ne peuvent donner lieu à rémunération complémentaire que les inventions brevetées ou présentant les caractères les rendant susceptibles de l'être ; qu'après avoir relevé l'absence de brevet pour ces trois "inventions" en cause et le dépôt "d'enveloppes Soleau" destinées à conserver la preuve d'un droit au titre des dessins et modèles, incompatible avec la brevetabilité de l'objet, la cour d'appel ne pouvait s'abstenir de vérifier concrètement les conditions de brevetabilité, y compris du point de vue de l'activité inventive, sans violer l'article L. 611-7 du Code de la propriété intellectuelle ;

Mais attendu que ce moyen manque en fait, dès lors que la cour d'appel, qui n'avait pas à répondre à des arguments non assortis d'offres de preuve, a souverainement constaté la brevetabilité de ces inventions, peu important le dépôt d'enveloppe Soleau effectué à titre conservatoire et l'absence de dépôt de brevet ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Application des gaz aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société Application des gaz à payer à M. X... la somme de 2 250 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux février deux mille cinq.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 03-11027
Date de la décision : 22/02/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

1° PRESCRIPTION CIVILE - Prescription quinquennale - Article 2277 du Code civil - Application - Créance déterminée - Nécessité.

1° PRESCRIPTION CIVILE - Prescription quinquennale - Article 2277 du Code civil - Exclusion - Créance litigieuse.

1° Statuant sur un litige sur le montant de la rémunération supplémentaire due au titre de l'invention de mission du salarié, une cour d'appel retient à bon droit que la prescription quinquennale édictée par l'article 2277 du Code civil n'atteint les créances que si elles sont déterminées et qu'il n'en est plus ainsi lorsque leur fixation fait l'objet d'un litige entre les parties.

2° STATUT COLLECTIF DU TRAVAIL - Conventions collectives - Conventions diverses - Ingénieurs et cadres - Convention du 13 mars 1972 - Rémunération - Article 26 - Brevet d'invention - Invention du salarié - Invention de mission - Exclusion de la rémunération supplémentaire - Nullité.

2° BREVET D'INVENTION - Droit au titre - Invention du salarié - Invention de mission - Rémunération supplémentaire - Caractère d'ordre public 2° STATUT COLLECTIF DU TRAVAIL - Conventions collectives - Dispositions générales - Clauses réputées non écrites - Cas - Violation des dispositions légales d'ordre public.

2° Doit être réputé non écrit, dès lors que les clauses d'une convention collective ne peuvent restreindre les droits que le salarié tient de la loi, l'article 26 de la Convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie, excluant la rémunération supplémentaire pour les inventions du salarié ne présentant pas pour l'entreprise un intérêt exceptionnel dont l'importance serait sans commune mesure avec le salaire de l'inventeur, qui est contraire à l'article L. 611-7 du Code de la propriété intellectuelle, lequel est d'ordre public, dans sa rédaction issue de la loi du 26 novembre 1990, modifiant l'article 1er ter de la loi du 13 juillet 1978, disposant que le salarié, auteur d'une invention de mission, doit dorénavant bénéficier d'une rémunération supplémentaire.


Références :

Code civil 2277
Code de la propriété intellectuelle L611-7
Convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie du 13 mars 1972 art. 26
Loi du 26 novembre 1990
Loi 78-742 du 13 juillet 1978 art. 1 ter

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 14 novembre 2002

Sur le n° 1 : Dans le même sens que : Chambre civile 3, 1996-12-11, Bulletin 1996, III, n° 237, p. 155 (rejet).


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 22 fév. 2005, pourvoi n°03-11027, Bull. civ. 2005 IV N° 35 p. 40
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2005 IV N° 35 p. 40

Composition du Tribunal
Président : M. Tricot.
Rapporteur ?: Mme Garnier.
Avocat(s) : la SCP Thomas-Raquin et Bénabent, Me Bertrand.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2005:03.11027
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