AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur les trois moyens, réunis :
Attendu, selon l'arrêt déféré (Paris, 26 juin 2002), que par contrat de travail du 16 février 1987, M. X... a été embauché par l'Institut Pasteur en qualité de chargé de recherche, fonction qu'il a exercée jusqu'au 30 novembre 1989 ; qu'ayant été désigné comme co-inventeur de plusieurs brevets concernant le dépistage du sida, il a perçu de l'Institut Pasteur une rémunération supplémentaire conforme aux stipulations de l'accord d'entreprise du 22 juin 1978, modifié par avenant du 10 juin 1992 ; que, soutenant que ce dernier avenant, établi après son départ, lui était inopposable, M. X... a poursuivi judiciairement l'Institut Pasteur en paiement d'un complément de rémunération de ses droits d'inventeur ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande, alors, selon le moyen :
1 / qu'un accord d'entreprise ne dispose que pour l'avenir ;
que dès lors en retenant, pour calculer les droits de rémunération supplémentaire dus à un inventeur salarié, les dispositions d'un accord d'entreprise réduisant par rapport au précédent accord le pourcentage des produits d'exploitation des brevets revenant à l'inventeur, la cour d'appel qui a ainsi appliqué des règles nouvelles moins avantageuses à des droits déjà constitués à l'égard de l'employeur, dans leur principe comme dans leur mode de détermination, du fait de la mise en exploitation des brevets, droits définissant une situation juridiquement acquise qui devait restée régie par les dispositions antérieures, a violé ensemble, les articles L. 611-7 du Code de la propriété intellectuelle, L. 132-1, alinéa 4 du Code du travail et 2 du Code civil ;
2 / qu'ayant constaté que son contrat de travail se référait à l'accord d'entreprise du 22 juin 1978 prévoyant le droit à rémunération supplémentaire des chercheurs auteurs d'inventions, ce dont il résultait qu'après son départ de l'Institut Pasteur le droit à cet élément individualisé avait sa source dans le contrat auquel il s'était intégré, la cour d'appel, en jugeant que ce droit résultait exclusivement des dispositions de l'accord d'entreprise, a violé les articles L. 611-7 du Code de la propriété intellectuelle et 1134 du Code civil ;
3 / qu'un accord collectif conclu après le départ du salarié de l'entreprise qui affecte les droits que lui conférait un précédent accord ne lui est pas opposable ; qu'ainsi en considérant que le plafonnement des droits d'inventeur institué par un accord collectif du 10 juin 1992, modifiant un précédent accord du 22 juin 1978 dans sa rédaction de 1981, était applicable aux rémunérations dues à M. X..., qui avait quitté l'Institut Pasteur en 1989, dès lors que celles-ci procèdent de l'exploitation du brevet, qui est en cours et donc soumises aux dispositions nouvelles, la cour d'appel a violé l'article L. 611-7 du Code de la propriété intellectuelle et l'article L. 132-8 du Code du travail ;
Mais attendu qu'aux termes de l'article L. 611-7 du Code de la propriété intellectuelle, les conditions dans lesquelles le salarié, auteur d'une invention réalisée dans l'exécution de son contrat de travail comportant une mission inventive, bénéficie d'une rémunération supplémentaire, sont déterminées par les conventions collectives, les accords d'entreprise et les contrats individuels de travail ;
Attendu que l'arrêt constate que le contrat de travail du 16 février 1987 énonce en son article 3 que "M. X... déclare avoir pris connaissance, d'une part de l'accord d'entreprise de l'Institut Pasteur du 22 juin 1978, ses avenants et annexes (...) d'autre part du règlement intérieur de l'Institut Pasteur et s'engage à en respecter les dispositions" ;
qu'il relève que la rémunération supplémentaire à laquelle peut prétendre M. X... en sa qualité d'inventeur salarié ne résulte pas d'une stipulation individuelle de son contrat de travail qui lui serait personnelle mais exclusivement des stipulations de l'accord d'entreprise auquel l'article L. 611-7 du Code de la propriété intellectuelle renvoie en l'absence de stipulation spécifique du contrat de travail ; qu'il retient que l'avenant critiqué dont la faculté était expressément rappelé à l'article 3 de l'accord d'entreprise tel que notifié à M. X..., s'applique à la date fixée par le nouvel accord, lequel a valeur normative, s'imposant à tous et régit les situations en cours ; qu'ayant déduit de ces constatations et appréciations que M. X... ne pouvait opposer un quelconque avantage individuellement acquis sur les modalités de calcul de la rémunération supplémentaire non incluses dans son contrat de travail, la cour d'appel a pu statuer comme elle a fait ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux février deux mille cinq.