AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à M. Robert X... et à Mmes Denise, Anne-Marie et Suzanne X... de leur reprise d'instance ;
Attendu qu'Honorine Y... est décédée le 16 décembre 1988, après avoir, par testament olographe, institué Victor Y..., son époux commun en biens, légataire universel de ses biens et légataire à titre universel de l'usufruit de ses biens immobiliers, et M. X..., son frère, légataire à titre universel de la nue-propriété de ses biens immobiliers et légataire de ses biens recueillis par Victor Y... et laissés par celui-ci à son décès ; que Victor Y... est décédé le 8 février 1990, en laissant pour lui succéder Mme Z..., sa nièce ; que l'arrêt attaqué, statuant après expertise, a ordonné l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de la communauté ayant existé entre les époux Y... et de la succession de Victor Y..., commis un notaire et déclaré M. X... redevable envers la succession de la somme de 32 531,88 euros avec intérêts au taux légal ;
Sur le premier moyen :
Vu les articles 870 et 871 du Code civil ;
Attendu que le legs de residuo est soumis à la double condition qu'au décès du premier légataire institué, la chose léguée subsiste dans son patrimoine et le second légataire survive ; qu'en cas de réalisation de la condition, seul le second légataire est tenu des dettes et charges de la succession du testateur ;
Attendu que l'arrêt attaqué énonce que les dettes et charges de la succession d'Honorine Y... doivent être supportées par ses légataires universel et à titre universel, chacun pour sa part et portion dans la succession, c'est-à-dire par Mme Z..., qui vient aux droits de Victor Y..., et par M. X..., sauf à tenir compte de l'incidence du legs de residuo consenti à ce dernier ;
Qu'en statuant ainsi, alors que, au décès de Victor Y..., M. X... avait recueilli l'intégralité des biens restant de la succession de Honorine Y... et Mme Z... les seuls biens composant la succession de Victor Y..., la cour d'appel a violé les textes susvisés, par fausse application ;
Et sur la première branche du second moyen :
Vu l'article 1469, alinéa 3, du Code civil ;
Attendu que, pour dire que la communauté ayant existé entre les époux Y... a droit à une récompense égale au montant nominal des frais de licitation et de partage réglés en vue de l'attribution à Honorine Y... d'un immeuble dépendant de la succession de ses parents, l'arrêt attaqué énonce que ces frais ont constitué une dépense nécessaire au sens de l'article 1469, alinéa 2, du Code civil ;
Qu'en statuant ainsi, alors que les frais de licitation et de partage, dont le paiement a permis l'attribution d'un immeuble, donnent lieu, lorsqu'ils ont été réglés par la communauté et lorsque le bien figure à la dissolution de celle-ci dans le patrimoine d'un époux, à une récompense calculée selon les modalités de l'article 1469, alinéa 3, du Code civil, la cour d'appel a violé le texte susvisé, par refus d'application ;
Et sur la deuxième branche du second moyen :
Vu l'article 1437 du Code civil ;
Attendu que, toutes les fois qu'il est pris sur la communauté une somme pour acquitter les dettes personnelles à l'un des époux, il en doit la récompense ;
Attendu que, pour dénier à la communauté des époux Y... un droit à récompense à la suite du paiement d'une partie d'une dette solidaire contractée par Honorine Y... et M. X..., l'arrêt attaqué énonce qu'à supposer que la communauté ait réglé cette somme en lieu et place de M. X..., il ne pouvait s'agir que d'un prêt consenti à celui-ci ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la dette acquittée était personnelle à Honorine Y... en raison de sa nature solidaire, la cour d'appel a violé le texte susvisé, par refus d'application ;
Et sur la troisième branche du second moyen :
Vu l'article 1469, alinéa 3, du Code civil ;
Attendu que, pour évaluer la récompense due à la communauté à la suite du paiement de travaux exécutés dans l'immeuble attribué à Honorine Y..., l'arrêt attaqué énonce que certains de ces travaux, s'ils n'étaient pas strictement nécessaires, ont incontestablement amélioré le bien et que, en dépit de la vétusté des agencements réalisés, ils ont laissé subsister un profit devant être fixé à 100 000 francs ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher l'avantage réellement procuré au fonds emprunteur au jour du règlement de la récompense, lequel représente la différence entre la valeur actuelle du bien et sa valeur actuelle sans les travaux réalisés, la cour d'appel a violé le texte susvisé, par refus d'application ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la quatrième branche du second moyen :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a déclaré M. X... redevable de la somme de 32 531,88 euros avec intérêts au taux légal envers la succession de Victor Y..., l'arrêt rendu le 27 novembre 2001, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence, remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;
Condamne les consorts X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit février deux mille cinq.