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26/01/2005 | FRANCE | N°03-18.004à03-18.005;03-46.181à03-46.182;

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 26 janvier 2005, 03-18.004 à 03-18.005 et suivants


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu leur connexité, joint les pourvois H 03-18.004, G 03-18.005, J 03-46.181 et K 03-46.182 ;

Sur le moyen unique commun aux pourvois :

Attendu que la société Renault France automobile Nord (RFA Nord) a licencié en février 1993 pour faute grave MM. X... et Y... ; qu'ils ont attrait leur employeur devant le conseil de prud'hommes pour contester le bien fondé de leur licenciement ; que la société RFA Nord a demandé le renvoi pour cause de suspicion légitime de la jurid

iction saisie au motif que son président avait pris publiquement partie en faveur ...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu leur connexité, joint les pourvois H 03-18.004, G 03-18.005, J 03-46.181 et K 03-46.182 ;

Sur le moyen unique commun aux pourvois :

Attendu que la société Renault France automobile Nord (RFA Nord) a licencié en février 1993 pour faute grave MM. X... et Y... ; qu'ils ont attrait leur employeur devant le conseil de prud'hommes pour contester le bien fondé de leur licenciement ; que la société RFA Nord a demandé le renvoi pour cause de suspicion légitime de la juridiction saisie au motif que son président avait pris publiquement partie en faveur des salariés ;

Attendu que l'employeur fait grief aux arrêts attaqués (Douai, 2 juillet 2003) d'avoir rejeté sa demande de renvoi pour cause de suspicion légitime alors, selon le moyen :

1 ) qu'il résulte des propos tenus par le président du conseil de prud'hommes que celui-ci s'était immiscé dans la conduite du procès entre la société RFA Nord et les salariés en critiquant la hiérarchie de l'entreprise et en affirmant que la CGT allait gagner devant la juridiction qu'il présidait ; que de tels éléments sont de nature à porter atteinte à la confiance légitime que le justiciable est en droit d'attendre de la juridiction à laquelle il s'adresse ; les propos ainsi tenus créent, pour le moins, une apparence en vertu de laquelle le justiciable est légitimement amené à ne plus accorder sa confiance à l'ensemble de la juridiction ; qu'en statuant, comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble les articles 356 du nouveau Code de procédure civile et L. 518-1 du Code du travail ;

2 ) que le fait que la cause puisse être évoquée devant une formation où ne siégerait pas l'auteur des propos litigieux, ainsi que le relève l'arrêt attaqué, n'est pas de nature à permettre au justiciable de se faire une représentation exacte des pouvoirs réels ou supposés dont le président de cette juridiction a fait état publiquement, en affirmant certain le résultat de la cause en cours, de sorte qu'en se déterminant par la seule circonstance qu'il n'y aurait pas identité entre M. Z..., pris en sa qualité de responsable local du syndicat CGT et de président du conseil de prud'hommes, et les juges auxquels l'affaire sera distribuée, la cour d'appel s'est déterminée par un motif inopérant et a privé sa décision de base légale au regard des articles 356 du nouveau Code de procédure civile et 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

3 ) que la violation délibérée de l'obligation de réserve par le président de la juridiction sur l'issue d'un procès dans lequel il s'est immiscé en conseillant une partie, constitue, contrairement à l'appréciation de la cour d'appel, une circonstance objective de nature à faire naître un doute sur l'impartialité et l'indépendance du tribunal appelé à statuer, de sorte que la cour d'appel a derechef violé les articles 356 du nouveau Code de procédure civile, L. 518-1 du Code du travail et 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Mais attendu que la circonstance qu'un membre du conseil de prud'hommes, ne figurant pas dans la composition de la section appelée à statuer sur l'affaire, ait donné publiquement son opinion sur le litige n'est pas de nature à mettre en cause l'impartialité de l'ensemble de ses membres ; que la cour d'appel, qui a constaté que l'auteur des propos tenus à l'encontre de l'employeur n'appartenait pas à la section saisie du litige, a pu décider qu'il n'existait aucune raison objective de douter de l'indépendance et de l'impartialité du conseil de prud'hommes justifiant le renvoi de l'affaire devant une autre juridiction pour cause de suspicion légitime ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois ;

Condamne la société Renault France automobile aux dépens ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six janvier deux mille cinq.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 03-18.004à03-18.005;03-46.181à03-46.182;
Date de la décision : 26/01/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

PRUD'HOMMES - Conseil de prud'hommes - Récusation - Causes - Cause invoquée - Violation du principe d'impartialité - Défaut - Cas - Opinion exprimée publiquement sur une affaire par un conseiller prud'homme n'appartenant pas à la section chargée de statuer sur le litige.

RECUSATION - Causes - Prud'hommes - Conseiller prud'homme - Opinion exprimée publiquement sur l'affaire par un conseiller prud'homme - Condition

SUSPICION LEGITIME - Cas - Partialité - Conseiller prud'homme ayant exprimé publiquement son opinion sur une affaire - Condition

La circonstance qu'un membre du conseil de prud'hommes, ne figurant pas dans la composition de la section appelée à statuer sur l'affaire, ait donné publiquement son opinion sur le litige n'est pas de nature à mettre en cause l'impartialité de l'ensemble de ses membres. Dès lors, la cour d'appel qui a constaté que l'auteur des propos n'appartenait pas à la section saisie du litige a pu décider qu'il n'existait pas de raison objective de renvoyer l'affaire devant une autre juridiction pour cause de suspicion légitime.


Références :

Code du travail L518-1
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales art. 6
Nouveau Code de procédure civile 356

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 02 juillet 2003


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 26 jan. 2005, pourvoi n°03-18.004à03-18.005;03-46.181à03-46.182;, Bull. civ. 2005 V N° 30 p. 26
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2005 V N° 30 p. 26

Composition du Tribunal
Président : M. Chagny, conseiller le plus ancien faisant fonction.
Avocat général : M. Maynial.
Rapporteur ?: M. Leblanc.
Avocat(s) : la SCP Célice, Blancpain et Soltner.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2005:03.18.004
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