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25/01/2005 | FRANCE | N°03-13985

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 25 janvier 2005, 03-13985


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 28 janvier 2003), que M. Jean X..., qui exploitait à titre individuel le domaine Château Talbot, en a fait l'apport à la société anonyme Château Talbot, le 28 octobre 1992, contre remise d'actions de cette société, sous le bénéfice du régime prévu par l'article 151 octies du Code général des impôts, relatif au report de l'imposition des plus-values afférentes aux immobilisations non amortissables ; qu

e Jean X... est décédé le 25 septembre 1993, laissant pour lui succéder ses de...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 28 janvier 2003), que M. Jean X..., qui exploitait à titre individuel le domaine Château Talbot, en a fait l'apport à la société anonyme Château Talbot, le 28 octobre 1992, contre remise d'actions de cette société, sous le bénéfice du régime prévu par l'article 151 octies du Code général des impôts, relatif au report de l'imposition des plus-values afférentes aux immobilisations non amortissables ; que Jean X... est décédé le 25 septembre 1993, laissant pour lui succéder ses deux filles, Mmes Lorraine X..., épouse Y... et Nancy X..., épouse Z... ; que l'administration des impôt n'ayant pas admis que l'imposition ayant fait l'objet d'un report soit déduite de l'actif successoral, elle a procédé à un redressement de droits de succession à l'égard des héritières ; qu'à la suite du rejet de leur réclamation, Mmes X... ont saisi le tribunal de grande instance afin de voir juger que la dette fiscale afférente à la plus-value dégagée lors de l'apport en société et faisant l'objet d'un report d'imposition devait être comprise dans le passif successoral ;

Sur le premier moyen :

Attendu que Mmes X... reprochent à la cour d'appel d'avoir rejeté leur demande, alors, selon le moyen, qu'aux termes de l'article 768 du Code général des impôts, pour la liquidation des droits de mutation par décès, les dettes à la charge du défunt sont déduites lorsque leur existence au jour de l'ouverture de la succession est dûment justifiée ; que les dettes visées par ce texte s'entendent de toutes dettes nées du chef du défunt et dont les héritiers sont tenus par le seul fait de l'acceptation de la succession, indépendamment de tout autre fait qui leur soit personnel ; que par voie de conséquence, elles comprennent toute dette fiscale dont le fait générateur consiste dans une opération ou un acte réalisé par le défunt, même si ce dernier et les héritiers bénéficient d'un report d'imposition qui n'affecte pas le caractère certain de la dette ni ne lui substitue un autre fait générateur; qu'ainsi la dette fiscale afférente à la plus-value générée par l'apport en société d'une entreprise individuelle, dont le défunt puis les héritiers ont obtenu le report d'imposition dans les conditions prévues à l'article 151 octies du Code général des impôts est déductible de l'actif successoral dès lors que l'option des héritiers n'a ni pour objet ni pour effet d'éteindre la dette du défunt pour lui substituer une dette personnelle aux héritiers ; qu'ainsi, en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les articles 151 octies et 768 du Code général des impôts ;

Mais attendu qu'après avoir retenu, d'un côté, qu'il résulte de l'article 151 octies du Code général des impôts qu'en cas de transmission à titre gratuit à une personne physique des droits sociaux rémunérant l'apport, le report d'imposition des plus-values est maintenu si le bénéficiaire de la transmission prend l'engagement d'acquitter l'impôt sur la plus-value à la date de la cession à titre onéreux ou du rachat des droits sociaux reçus en rémunération de l'apport de l'entreprise ou à la date de la cession de ces immobilisations par la société si elle est antérieure, et de l'autre, que Mmes X... avaient sollicité le maintien du report d'imposition, la cour d'appel en a déduit à bon droit que, de ce fait, la dette fiscale ne constituait pas une dette certaine à la charge du défunt au jour de l'ouverture de la succession, de sorte qu'elle ne pouvait être déduite de l'actif successoral ; que le moyen n'est pas fondé ;

Et sur le second moyen :

Attendu que Mmes X... reprochent encore à l'arrêt d'avoir rejeté leur demande subsidiaire tendant à ce que la dette fiscale afférente à la plus-value d'apport réalisée par leur auteur avant son décès vienne en déduction de la valeur des actions recueillies dans la succession, alors, selon le moyen, que pour l'évaluation des biens successoraux en vue de la liquidation des droits de mutation par décès, il convient de prendre en compte tous les caractères, non seulement physiques et économiques, mais aussi juridiques susceptibles d'en affecter la valeur ; que lorsque la succession comprend des biens acquis sous un régime de report d'imposition de la plus-value, report auquel doit mettre fin la cession à titre onéreux de ces biens, ces derniers n'ont pas la même valeur que si le défunt avait acquitté de son vivant l'impôt sur la plus-value dégagée lors de leur acquisition, ce qui aurait permis aux héritiers de céder les biens sans provoquer l'imposition de cette plus-value ; que dès lors il doit être tenu compte aux héritiers de l'obligation qui leur incombe soit de payer immédiatement l'impôt sur la plus-value, soit de demander le report de l'imposition ; qu'en refusant de réduire la valeur des actions en considération de la contrainte que représentait pour les héritières l'obligation d'opter entre l'imposition immédiate et l'imposition différée de la plus-value réalisée par le défunt, la cour d'appel a violé l'article 666 du Code général des impôts ;

Mais attendu que la cour d'appel a rejeté à bon droit la demande de réduction de la valeur des actions composant la succession au motif que la valeur de l'action d'une société anonyme ne dépend pas de l'existence d'une dette personnelle de l'actionnaire ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mmes Lorraine X..., épouse Y... et Nancy X..., épouse Z... aux dépens ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq janvier deux mille cinq.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 03-13985
Date de la décision : 25/01/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

1° IMPOTS ET TAXES - Enregistrement - Droits de mutation - Mutation à titre gratuit - Succession - Passif déductible - Dette existant au jour de l'ouverture de la succession - Exclusion - Cas - Dette fiscale afférente à la plus-value réalisée à l'occasion de l'apport à une société et faisant l'objet d'un report d'imposition.

1° Ayant retenu qu'il résulte de l'article 151 octies du Code général des impôts qu'en cas de transmission à titre gratuit à une personne physique des droits sociaux rémunérant l'apport, le report d'imposition des plus-values est maintenu si le bénéficiaire de la transmission prend l'engagement d'acquitter l'impôt sur la plus-value à la date de la cession à titre onéreux ou du rachat des droits sociaux reçus en rémunération de l'apport de l'entreprise ou à la date de la cession de ces immobilisations par la société si elle est antérieure et que des héritiers avaient sollicité le maintien du report d'imposition, une cour d'appel en a déduit à bon droit que, de ce fait, l'imposition des plus-values ne constituait pas une dette certaine à la charge du défunt au jour de l'ouverture de la succession, de sorte qu'elle ne pouvait être déduite de l'actif successoral.

2° IMPOTS ET TAXES - Enregistrement - Droits de mutation - Assiette - Valeur des biens - Détermination - Applications diverses - Valeur de l'action d'une société anonyme.

2° La valeur de l'action d'une société anonyme ne dépend pas de l'existence d'une dette personnelle de l'actionnaire.


Références :

1° :
2° :
Code général des impôts 151 octies, 768
Code général des impôts 666

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux, 28 janvier 2003


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 25 jan. 2005, pourvoi n°03-13985, Bull. civ. 2005 IV N° 15 p. 14
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2005 IV N° 15 p. 14

Composition du Tribunal
Président : M. Tricot.
Avocat général : M. Viricelle.
Rapporteur ?: M. Truchot.
Avocat(s) : la SCP Delaporte, Briard et Trichet, la SCP Thouin-Palat et Urtin-Petit.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2005:03.13985
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