AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Vu leur connexité, joint les pourvois n° P 02-42.961 et X 02-43.222 ;
Attendu que, selon l'arrêt attaqué (Paris, 21 mars 2002 ), M. X..., salarié en qualité d'agent de propreté depuis le 5 mai 1990, titulaire d'un mandat de délégué syndical et élu le 29 mai 1999, délégué du personnel, membre du comité d'entreprise et membre du comité central d'entreprise, a été informé, le 26 décembre 2000, par son employeur, la société Azur net, du transfert à compter du 2 janvier 2001 de son contrat de travail à la société Penauille, attributaire du chantier "lot n° 1- Crèches de la mairie de Paris" sur lequel il intervenait ; que, le 27 décembre 2000 , le salarié a refusé ce transfert ; que la société Azur net ayant sollicité et obtenu le 17 janvier 2001 l'autorisation administrative de transfert, elle a rémunéré le salarié jusqu'au 22 janvier 2001 ;
Sur le premier moyen du pourvoi de l'employeur :
Attendu que la société Azur net fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir condamnée à verser à M. X... diverses sommes à titre de rappels de salaires, rappels d'heures de délégation, congés payés, indemnités de préavis, indemnité de licenciement et des dommages-intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et pour discrimination syndicale, alors, selon le moyen :
1 / que s'il est exact qu'en vertu de l'article L. 412-18, alinéa 6, un transfert partiel d'entreprise ou d'établissement n'emporte pas de plein droit, le transfert d'un salarié protégé qui se trouve soumis à l'autorisation de l'Inspection du Travail , la société Azur net avait obtenu de cette autorité une décision en date du 17 janvier 2001 autorisant le transfert de M. X... ; que dès lors, en prétendant imposer en outre à l'entreprise sortante une autorisation de licenciement faisant double emploi avec l'autorisation de transfert susvisée, la cour d'appel a violé l'article L. 412-18 du Code du travail en subordonnant son application à une condition qu'il ne prévoit pas ;
2 / qu'ayant visé l'autorisation de transfert du 17 janvier 2001, la cour d'appel ne pouvait sans violer les articles L. 611-1 du Code du travail, la loi des 16 et 24 août 1790 et le principe de la séparation des pouvoirs, considérer qu'elle se trouvait privée de tout effet suite au refus du salarié de voir transférer son contrat de travail chez un nouvel employeur ;
Mais attendu que l'autorisation de l'Inspection du Travail de transférer un salarié titulaire de mandats représentatifs affecté au marché faisant l'objet d'un changement de prestataire ne fait pas obstacle à ce que le salarié dont le mandat dépasse le cadre du marché repris opte, comme le lui permet l'article 5 de l'accord collectif du 29 mars 1990 "fixant les conditions d'une garantie d'emploi et de la continuité du contrat de travail du personnel en cas de changement de prestataire", pour un maintien au sein de l'entreprise dont le contrat commercial a cessé ; que, dans ce cas, l'employeur qui ne peut le réintégrer doit solliciter une autorisation administrative de licenciement ;
Que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen du pourvoi de l'employeur :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Sur le moyen unique du pourvoi du salarié :
Attendu que M. X... reproche à la cour d'appel de l'avoir débouté de sa demande d'indemnisation correspondant à la période de protection restant à courir, alors, selon le moyen, que le salarié licencié sans autorisation administrative, qui n'est pas réintégré, a droit à une indemnité pour la méconnaissance du statut protecteur qui est au moins égale à la rémunération qu'il aurait perçue jusqu'à la fin de la période de protection ; qu'en statuant comme elle l'a fait au motif que les dommages et intérêts pour discrimination syndicale incluaient l'indemnisation de la méconnaissance du statut protecteur, la cour d'appel a violé par refus d'application les articles L. 425-1, L. 412-18 et L. 436-1 du Code du travail ;
Mais attendu que la décision de la cour d'appel, qui a apprécié à un montant global la réparation des deux chefs de préjudice distincts, n'encourt pas les griefs du moyen qui ne peut être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société Azur net à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du onze janvier deux mille cinq.