AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen :
Vu l'article L. 122-12, alinéa 2 du Code du travail, interprété au regard de la Directive n° 77/187/CEE du 14 février 1977 ;
Attendu que la société Alsacienne des hypermarchés Auchan (Auchan), qui employait M. X... comme chauffeur-livreur, a décidé de céder son activité de transport à une société SATL le 1er février 1998 ; qu'informé du changement d'employeur qui en résultait, avec 113 autres salariés concernés par cette modification, M. X... a fait savoir à la société Auchan, le 31 janvier 1998, qu'il refusait ce changement ; qu'il a été licencié le 17 février 1998 par la société Auchan, en raison de ce refus ;
Attendu que, pour condamner la société Auchan au paiement de dommages-intérêts et d'indemnités de préavis et de congés payés, la cour d'appel a retenu que la cession de l'activité de transport à la société SATL, accompagnée de la reprise par l'entreprise cessionnaire du parc automobile, constitue le transfert d'une entité économique autonome dont l'activité est poursuivie et relève des dispositions de l'article L. 122-12 du Code du travail, qui sont d'ordre public, s'imposent tant aux employeurs qu'aux salariés et avaient pour effet de transférer le contrat de travail de M. X... à la société SATL, laquelle était devenue de plein droit l'employeur de ce dernier à compter du 1er février 1998 ; qu'il en résulte que le licenciement litigieux, notifié par la société Auchan postérieurement au transfert du contrat de travail, est sans effet et illégal car prononcé en méconnaissance des dispositions de l'article L. 122-12 du Code du travail ; que dès lors, M. X... qui n'a pas sollicité auprès de la société SATL la poursuite de son contrat de travail illégalement rompu, peut demander à la société Auchan la réparation du préjudice résultant de ce licenciement illégal ; qu'il ne peut toutefois être soutenu que ce licenciement serait de nature économique dans la mesure où la proposition de modification de son contrat de travail fait suite à son refus de se voir transféré et non à un quelconque motif économique ;
Attendu, cependant, que le changement d'employeur résultant de plein droit du transfert d'une entité économique autonome s'impose tant aux employeurs successifs qu'aux salariés concernés ; qu'il en résulte que le licenciement prononcé par le cédant est privé d'effet et que le salarié licencié en raison de son refus de changer d'employeur ne peut prétendre au paiement d'indemnités de rupture et de dommages-intérêts ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, alors qu'elle constatait que le licenciement notifié par la société Auchan était motivé par le refus du salarié de passer au service du cessionnaire de l'entité dont il relevait, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et attendu qu'en vertu de l'article 627 du nouveau Code de procédure civile, la Cour de Cassation est en mesure en cassant sans renvoi,de mettre fin au litige par application de la règle de droit appropriée ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 6 janvier 2003, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Déboute M. X... de ses demandes ;
Condamne M. X... aux dépens de la présente instance et à ceux exposés devant la cour d'appel ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze décembre deux mille quatre.