AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en ses trois premières branches :
Vu l'article 3 du Code civil ;
Attendu que Mlle Lynda X..., née le 13 février 1972 à Porto Novo (actuel Bénin), a saisi le tribunal de grande instance de Nanterre d'une action déclaratoire de nationalité, se disant française en application de l'article 84 du Code de la nationalité française dans sa rédaction de 1973, par l'effet collectif de la déclaration de réintégration souscrite le 15 mars 1982 par son père, M. Médard X... ; que le ministère public ayant soutenu que la filiation paternelle de l'intéressée n'avait été établie que le 22 juillet 1992, date à laquelle une juridiction béninoise avait donné acte à M. X... de ce qu'il déclarait la reconnaître, le tribunal a, avant dire droit, ordonné une consultation pour connaître le contenu, en 1972, de la loi béninoise, applicable en vertu de la règle française de conflit de lois, relativement à l'établissement de la filiation naturelle à l'égard du père ; qu'au vu de la consultation, il a décidé qu'en vertu d'une coutume ayant valeur de règle de droit, la filiation de Mlle X... avait été établie dès sa naissance et a accueilli sa demande ;
Attendu que, pour infirmer le jugement et débouter Mlle X... de sa demande, l'arrêt attaqué retient d'abord que le contenu de la consultation n'est pas catégorique et que, faute de preuve de la teneur de la loi étrangère, la loi française, qui a une vocation subsidiaire, doit recevoir application, et ensuite que la filiation paternelle de l'intéressée n'a été établie que par la reconnaissance de 1992, postérieurement à la déclaration de réintégration faite par son père et à sa propre majorité, de sorte qu'elle n'a pu bénéficier de l'effet collectif de la déclaration de réintégration dans la nationalité française ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'il lui appartenait de rechercher, y compris avec la coopération des parties, la solution donnée à la question litigieuse par le droit béninois et qu'elle n'établissait pas l'impossibilité d'obtenir les éléments dont elle avait besoin, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il soit nécessaire de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 5 avril 2001, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;
remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;
Laisse les dépens à la charge du Trésor public ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize novembre deux mille quatre.