AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rabat, d'office, de l'arrêt n° 808 FS, après observations des parties :
Attendu que, par arrêt du 25 mai 2004, la première chambre civile de la Cour de cassation (pourvoi n° B 02-12268) a cassé et annulé en toutes ses dispositions l'arrêt rendu, le 29 novembre 2001, entre la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel de Paris et d'Ile de France et les époux X..., Mme Y..., divorcée Z..., M. Z... et M. A..., par la cour d'appel de Versailles, dit n'y avoir lieu à renvoi, statuant à nouveau a déclaré irrecevables les demandes de la CRCAM de Paris et d'Ile de France, mis tous les dépens de première instance et d'appel à la charge de celle-ci et, enfin, l'a condamnée aux dépens de l'instance de cassation ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que le pourvoi et son examen n'ont porté que sur la violation des articles 900-1 et 1166 du code civil par l'arrêt attaqué, qui avait admis l'action oblique de la CRCAM afin de voir lever la clause d'inaliénabilité affectant le bien sur lequel portait l'hypothèque de cette banque et, en conséquence, l'avait déboutée de son action en responsabilité dirigée contre M. A..., notaire ayant instrumenté le prêt en garantie duquel avait été consentie l'hypothèque, la Cour de Cassation a excédé sa saisine et interdit à la CRCAM l'exercice de son action en garantie contre le notaire instrumentaire ;
Attendu qu'il y a lieu de rabattre l'arrêt concerné ;
PAR CES MOTIFS :
Rapporte l'arrêt n° 808 FS - P+B rendu par la 1ère chambre de la Cour de Cassation le 25 mai 2004 ;
Et statuant à nouveau :
Sur le moyen unique du pourvoi n° B 02-12.268, pris en ses deux branches, tel qu'il figure au mémoire en demande et est reproduit en annexe au présent arrêt :
Vu les articles 900-1 et 1166 et du Code civil ;
Attendu qu'aux termes du premier de ces textes, le donataire peut être autorisé à disposer d'un bien donné avec clause d'inaliénabilité, si l'intérêt qui avait justifié la clause a disparu ou s'il advient qu'un intérêt plus important l'exige ; qu'aux termes du second d'entre eux, les créanciers peuvent exercer tous les droits et actions de leur débiteur, à l'exception de ceux qui sont exclusivement attachés à la personne ;
Attendu que les époux Y... ont, par acte du 17 janvier 1983, fait donation à leur fille, Martine, épouse Z..., d'un terrain sur lequel a été édifié une maison d'habitation ; que cette donation était consentie avec droit de retour, interdiction d'aliéner et d'apporter en garantie ; que les époux Z..., aujourd'hui divorcés, avaient consenti sur l'immeuble en son entier une hypothèque conventionnelle au bénéfice de la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel de Paris et d'Ile de France (la banque) en garantie du prêt qu'elle leur avait accordé par acte notarié des 13 et 18 juillet 1990 ; que la cour d'appel pour permettre à la banque la mise en oeuvre par voie oblique de sa garantie hypothécaire malgré la clause d'inaliénabilité, a retenu que la restriction des droits de son débiteur ne s'appliquait qu'aux droits exclusivement attachés à la personne, catégorie dont ne relève pas le droit ouvert au donataire par l'article 900-1 du Code civil de solliciter la levée d'une interdiction d'aliéner un bien en considération des intérêts en présence du donateur et du donataire ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que l'action du donataire était subordonnée à des considérations personnelles d'ordre moral et familial inhérentes à la donation, cette action était exclusivement attachée à sa personne, de sorte qu'elle ne pouvait être exercée par la banque créancière, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 29 novembre 2001, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;
Vu l'article 627, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile ;
Dit n'y avoir lieu à renvoi des chefs relatifs à la recevabilité et au bien fondé de l'action oblique de la CRCAM de Paris et d'Ile de France ;
Déclare irrecevables les demandes de la CRCAM de Paris et d'Ile de France contre M. Y... et Mme B..., son épouse, et contre Mme Martine Y... ;
Met les dépens de première instance et d'appel relatifs à ces demandes à la charge de la CRCAM de Paris et d'Ile de France ;
Pour le surplus renvoie la cause et les parties concernées devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée pour qu'il soit statué sur l'action en responsabilité de la CRCAM de Paris et d'Ile de France contre M. A... ;
Condamne la CRCAM de Paris et d'Ile de France aux dépens de la présente instance ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile rejette la demande de M. A... ;
Dit qu'à la diligence du greffier en chef de la Cour de Cassation, le présent arrêt sera trancrit en marge ou à la suite de l'arrêt rapporté ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize novembre deux mille quatre.