AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le quinze septembre deux mille quatre, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire CARON et les observations de Me BOUTHORS, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général CHEMITHE ;
Statuant sur les pourvois formés par :
- X... Marcel,
contre les arrêts de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de BASTIA :
- le premier, en date du 14 janvier 2004, qui, dans l'information suivie contre lui pour viols et agressions sexuelles aggravés, a ordonné un supplément d'information ;
- le second, en date du 21 avril 2004, qui l'a renvoyé devant la cour d'assises de CORSE-DU-SUD sous l'accusation de viols sur mineure de quinze ans par ascendant légitime ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
I - Sur le pourvoi formé contre l'arrêt du 14 janvier 2004 :
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 205 et suivants, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;
"en ce que la chambre de l'instruction, par arrêt du 14 janvier 2004, a infirmé l'ordonnance de mise en accusation et ordonné un supplément d'information aux fins de mise en examen supplétive du demandeur, qu'elle a délégué à l'auteur de l'ordonnance dont appel ;
"aux motifs qu'en l'état actuel du dossier, l'information n'est pas complète ; qu'en effet, la victime a précisément dénoncé des faits de viols commis par son grand-père à Marseille durant les années 1982 et 1983 ; que Marcel X... n'a cependant pas été mis en examen pour ces faits dont le juge d'instruction était bien saisi ;
qu'il convient, dès lors, de notifier à Marcel X... sa mise en examen supplétive pour ces faits et de retenir ses observations sur ce point ;
"alors que la chambre de l'instruction ne pouvait légalement déléguer au juge initialement saisi la mise en examen supplétive du demandeur, dès lors que l'infirmation sur ce point précis de l'ordonnance de mise en accusation était elle-même déduite d'un reproche fait audit juge" ;
Attendu qu'aucune disposition légale ou conventionnelle n'interdit à la chambre de l'instruction, qui ordonne un supplément d'information, en application de l'article 205 du Code de procédure pénale, de désigner, pour l'exécution des actes qu'elle prescrit, le juge d'instruction initialement en charge de l'information ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
II - Sur le pourvoi formé contre l'arrêt du 21 avril 2004 :
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 222, 223 et suivants du Code pénal, 197, 570, 571, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;
"en ce que la chambre de l'instruction a prononcé la mise en accusation du demandeur devant la cour d'assises de Corse-du-Sud du chef de viols sur mineur de 15 ans par ascendant légitime ;
"aux motifs qu'à l'issue de l'information, les faits dénoncés par Christelle X... ont été confirmés par de nombreux témoignages, directs ou indirects ; que les éléments recueillis à l'encontre de Marcel X..., justifient donc son renvoi devant la cour d'assises du chef de viols sur mineur de 15 ans par ascendant légitime ;
1 ) "alors que, d'une part, est irrégulière la mise en accusation du demandeur qui procède pour partie des résultats d'un supplément d'information lui-même irrégulier comme ayant eu lieu durant l'instance de cassation portant sur un précédent arrêt de la chambre de l'instruction (14 janvier 2004) qui avait précisément ordonné le supplément d'information litigieux et qui n'était alors pas exécutoire ;
2 ) "alors que, d'autre part, le droit au procès équitable interdit à la chambre de l'instruction de prononcer la mise en accusation d'un demandeur à la faveur d'une motivation reproduisant les réquisitions du procureur général" ;
Attendu que, d'une part, en l'absence, dans les délais légaux, de dépôt de la requête prévue à l'article 570, alinéa 4, du Code de procédure pénale, l'arrêt de la chambre de l'instruction ayant ordonné un supplément d'information était immédiatement exécutoire, même si, au moment des actes accomplis en exécution de cette décision, Marcel X... n'avait pas reçu notification de l'ordonnance rendue d'office par le président de la chambre criminelle de la Cour de cassation déclarant n'y avoir lieu à recevoir en l'état le pourvoi formé contre l'arrêt du 14 janvier 2004 ; que, d'autre part, il n'importe que l'arrêt reproduise pour partie les réquisitions du procureur général, dès lors qu'il répond au mémoire régulièrement déposé ; qu'il s'ensuit que la chambre de l'instruction a justifié sa décision sans méconnaître les textes et dispositions conventionnelles dont la violation est alléguée ;
Qu'ainsi, le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu que la procédure est régulière et que les faits, objet de l'accusation, sont qualifiés crime par la loi ;
REJETTE les pourvois ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, Mme Caron conseiller rapporteur, M. Le Gall conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Krawiec ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;