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02/09/2004 | FRANCE | N°04-80804

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 02 septembre 2004, 04-80804


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le deux septembre deux mille quatre, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller KOERING-JOULIN, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général DAVENAS ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Robert,

contre l'arrêt de la cour d'appel de CHAMBERY, chambre correctionnelle, en date du 3 décembre 2003, qui, pour ag

ression sexuelle aggravée, l'a condamné à 3 ans d'emprisonnement, dont 1 an avec sursi...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le deux septembre deux mille quatre, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller KOERING-JOULIN, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général DAVENAS ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Robert,

contre l'arrêt de la cour d'appel de CHAMBERY, chambre correctionnelle, en date du 3 décembre 2003, qui, pour agression sexuelle aggravée, l'a condamné à 3 ans d'emprisonnement, dont 1 an avec sursis et mise à l'épreuve, et a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu les mémoires personnel et ampliatif produits ;

Sur la recevabilité du mémoire personnel :

Attendu que ce mémoire, qui n'est pas signé par le demandeur, ne remplit pas les conditions exigées par l'article 584 du Code de procédure pénale ; qu'il est dès lors irrecevable ;

Sur le premier moyen cassation, pris de la violation des articles 6.1 de la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 222-22, 222-29-1 , 222-30-2 du Code pénal, 497, 500, 500-1, 505 et 591 du Code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Robert X... coupable d'agression sexuelle sur mineur de 15 ans par personne ayant autorité et l'a condamné, en répression, à une peine d'emprisonnement de trois années, dont une année assortie du sursis avec mise à l'épreuve pendant trois ans, comportant une obligation de soins ;

"alors que le défaut de signification au prévenu, auteur de l'appel principal, de l'appel incident formé par le ministère public prive celui-ci de la faculté légale qui lui est offerte de se désister de son appel principal dans le mois suivant en vue de rendre caduc ce dernier appel et d'éviter ainsi une aggravation de son sort en cause d'appel ; qu'en aggravant le sort du prévenu, sur l'appel incident du ministère public qui n'avait pourtant pas été signifié à l'appelant principal, la cour d'appel a privé ce dernier du droit à un procès équitable, et violé les droits de la défense" ;

Attendu qu'aucune disposition légale ou conventionnelle n'impose au procureur de la République de signifier son appel incident au prévenu, appelant principal, celui-ci pouvant, en se renseignant au greffe, savoir si un appel incident a été interjeté et utiliser, s'il le juge utile, son droit de désistement prévu par l'article 500-1 du Code de procédure pénale ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6.1 et 6.3 de la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 222-22, 222-29-1, 222-30-2 du Code pénal, 2, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Robert X... coupable d'agression sexuelle sur mineur de 15 ans par personne ayant autorité, l'a condamné, en répression, à une peine d'emprisonnement de trois années, dont une année assortie du sursis avec mise à l'épreuve pendant trois ans, comportant une obligation de soins et, sur l'action civile, l'a condamné à payer à Isabelle Y..., prise en sa qualité de représentant légal de son fils mineur Nicolas, la somme de 3 000 euros à titre de dommages-intérêts ;

"aux motifs qu'il ressort des déclarations de l'enfant, reconnues crédibles par expertise médico-psychologique, que Robert X... l'a fait déshabiller en vue de déterminer, selon ce dernier, un sport adapté à sa morphologie ; qu'il l'a également un autre jour, mis sur ses genoux, lui a chatouillé le ventre, et montré sur l'écran d'un ordinateur un jeune garçon nu en érection, la main sur le sexe ; qu'il lui a fait "faire la cigogne" à deux reprises, à l'occasion d'autres cours, nu, les yeux bandés, les jambes en équerre ; qu'il lui a aussi mesuré les cuisses, le bassin, l'entrejambe et fait sauter à pieds joints alors qu'il était totalement dévêtu ; que le jeune Nicolas Y... affirme que Robert X... lui a également touché "le gland et les boules" ; que les faits d'agression sexuelle reprochés au prévenu sont caractérisés quoiqu'il s'en défende en affirmant qu'il n'a jamais touché l'enfant et en soutenant qu'il a eu à son égard une démarche strictement éducative limitée à la découverte de son anatomie d'adolescent ; qu'il a été en outre découvert au domicile de Robert X... des photos de jeunes garçons en maillot de bain, d'autres clichés pornographiques reproduisant des relations homosexuelles entre jeunes hommes ainsi que plusieurs images retouchées du jeune Nicolas Y... ;

que les éléments d'ensemble recueillis dans le cadre de l'instruction établissent qu'en faisant déshabiller Nicolas, âgé de 13 ans, à plusieurs reprises, sous des prétextes prétendument éducatifs, Robert X..., seulement chargé de lui donner des cours de soutien scolaire, l'a surpris à cette occasion, comme par effraction, dans l'intimité de son corps et dans sa nudité alors que ne pouvaient échapper au prévenu la gêne et l'embarras de l'adolescent lorsqu'il était déshabillé sur la demande de ce dernier ;

"1 ) alors que le principe des droits de la défense, corollaire du droit à un procès équitable, interdit qu'une déclaration de culpabilité repose sur les seules affirmations de la victime, avec laquelle le prévenu n'a pas été confronté ; qu'ainsi, la cour d'appel ne pouvait légalement se fonder sur les seules déclarations de la prétendue victime, non corroborées par d'autres éléments, pour déclarer Robert X... coupable d'agression sexuelle ;

"2 ) alors que l'élément matériel du délit d'agression sexuelle consiste à accomplir sur autrui un acte impudique ou obscène, de nature clairement sexuelle ; qu'en cas d'équivoque des gestes, dont la connotation sexuelle n'est pas évidente, le prévenu doit être relaxé ; que le simple fait de toucher "le gland et les boules" d'un mineur, dans le cadre d'un exercice pédagogique, est pour le moins équivoque quant à sa connotation sexuelle ; qu'en cet état, la cour d'appel ne pouvait retenir la culpabilité du prévenu ;

"3 ) alors que, pour constituer une agression sexuelle, l'atteinte doit être commise avec violence, contrainte, menace ou surprise ; que la surprise, élément constitutif du délit d'agression sexuelle, consiste à surprendre le consentement de la victime, au moyen d'une manoeuvre ; que la gêne et l'embarras manifestés par la victime sont dès lors exclusifs de toute circonstance de surprise ;

qu'ainsi, la cour d'appel ne pouvait tout à la fois retenir que Robert X... avait surpris le consentement de l'adolescent, lors d'exercices prétendument éducatifs, et que ce dernier avait d'ailleurs manifesté de la gêne et de l'embarras en se déshabillant, cette dernière circonstance étant de nature à établir l'absence de surprise du consentement ;

"4 ) alors que le délit d'agression sexuelle suppose d'établir positivement que le prévenu a eu conscience de commettre un acte immoral ou obscène contre le gré de la victime ; qu'en se bornant à déduire l'élément intentionnel de la prétendue atteinte sexuelle commise sur l'adolescent, la cour d'appel a privé sa décision de base légale" ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, caractérisé en tous ses éléments, tant matériels qu'intentionnel, le délit dont elle a déclaré le prévenu coupable, et a ainsi justifié l'allocation, au profit de la partie civile, de l'indemnité propre à réparer le préjudice en découlant ;

D'où il suit que le moyen, qui se borne à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être admis ;

Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 222-22, 222-29-1 , 222-30-2 du Code pénal, 2, et 593 du Code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a condamné Robert X... à payer à Isabelle Y..., prise en sa qualité de représentant légal de son fils mineur Nicolas, la somme de 3 000 euros à titre de dommages-intérêts ;

"aux motifs adoptés qu' "Isabelle Y... agissant en qualité de représentante de son fils mineur Nicolas s'est constituée partie civile par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 11 septembre 2002 ; qu'elle réclame la somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts ; qu'elle précise que son fils a subi un grave traumatisme à la suite de ces événements (angoisses, cauchemars, insomnies, accès d'agressivité et perte de spontanéité) et qu'il redoute de croiser Robert X... et de rester seul ; qu'il est incontestable que les attouchements subis par Nicolas Y... et les conséquences pénales de leur dénonciation (interrogatoires, expertise) ont causé un préjudice à l'enfant ; que Robert X... est seul responsable de ce préjudice qui sera réparé par l'allocation à Isabelle Y..., ès qualité de représentante légale de son fils mineur Nicolas, de la somme de trois mille euros" (jugement p. 6) ;

"alors qu'il appartient à la victime de justifier la réalité et l'étendue de son préjudice au moyen de pièces produites à l'appui de sa constitution de partie civile ; qu'en allouant à la représentante légale du mineur une somme de 3 000 euros, sans constater que celle-ci avait produit, à l'appui de sa constitution de partie civile, les pièces justificatives de son prétendu préjudice, la cour d'appel a entaché son arrêt d'un manque de base légale" ;

Attendu qu'en évaluant, comme elle l'a fait, la réparation du préjudice subi par Isabelle Y..., en qualité de représentant légal de son fils mineur Nicolas, la cour d'appel n'a fait qu'user de son pouvoir d'apprécier souverainement, dans la limite des conclusions des parties, l'indemnité propre à réparer le dommage né de l'infraction ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, Mme Koering-Joulin conseiller rapporteur, M. Le Gall conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Daudé ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 04-80804
Date de la décision : 02/09/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

APPEL CORRECTIONNEL OU DE POLICE - Appel incident - Appel du ministère public - Signification de l'appel incident à l'appelant principal - Nécessité (non).

MINISTERE PUBLIC - Appel - Appel incident - Signification de l'appel incident à l'appelant principal - Nécessité (non)

Aucune disposition légale ou conventionnelle n'impose au procureur de la République de signifier son appel incident au prévenu, appelant principal, dès lors que ce dernier peut, en se renseignant au greffe, savoir si un appel incident a été formé et user, s'il le juge utile, de son droit de désistement prévu par l'article 500-1 du Code de procédure pénale.


Références :

Code de procédure pénale 500-1

Décision attaquée : Cour d'appel de Chambéry, 03 décembre 2003


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 02 sep. 2004, pourvoi n°04-80804, Bull. crim. criminel 2004 N° 194 p. 704
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2004 N° 194 p. 704

Composition du Tribunal
Président : M. Cotte
Avocat général : M. Davenas.
Rapporteur ?: Mme Koering-Joulin.
Avocat(s) : la SCP Waquet, Farge et Hazan.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2004:04.80804
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