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09/03/2004 | FRANCE | N°03-83080

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 09 mars 2004, 03-83080


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le neuf mars deux mille quatre, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire AGOSTINI, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général FRECHEDE ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Philippe,

contre l'arrêt n° 613 de la cour d'appel de LYON, 7ème chambre, en date du 2 avril 2003, qui, dans la pr

océdure suivie contre lui des chefs de contrefaçon de sceaux, timbres ou marques d'une au...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le neuf mars deux mille quatre, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire AGOSTINI, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général FRECHEDE ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Philippe,

contre l'arrêt n° 613 de la cour d'appel de LYON, 7ème chambre, en date du 2 avril 2003, qui, dans la procédure suivie contre lui des chefs de contrefaçon de sceaux, timbres ou marques d'une autorité publique, a confirmé le jugement l'ayant condamné à 30 000 francs d'amende ;

Vu le mémoire produit ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que Philippe X..., directeur de la publication "Lyon Mag", a fait diffuser, par distribution dans les boîtes aux lettres, des tracts publicitaires en forme d'avis de saisie établis par huissier de justice et portant l'empreinte d'un sceau reproduisant la figure de la Liberté ainsi que la mention "ministère de la justice" ; que, le 16 novembre 2000, il a été cité devant le tribunal correctionnel, par convocation notifiée par un agent de police judiciaire, pour répondre du délit prévu par l'article 444-3,2 du Code pénal ; que, le 21 décembre 2000, il a été à nouveau cité, selon le même mode, comme étant prévenu d'avoir "diffusé de faux avis de saisie d'huissier portant contrefaçon ou falsification de sceaux, timbres ou marques d'une autorité publique, en l'espèce une fausse Marianne au nom du Ministère de la Justice", infraction prévue par l'article 444-3,1 , dudit Code ;

En cet état ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles préliminaire, 384, 385, 388 du Code de procédure pénale, 6 de la Convention européenne des droits de l'homme ;

"en ce que l'arrêt attaqué a confirmé le jugement qui a retenu Philippe X... dans les liens de la prévention pour avoir :

- fait distribuer dans les boîtes aux lettres des papiers à en-tête ou imprimés officiels contrefaits, falsifiés, utilisés dans les assemblées instituées par la constitution, les administrations publiques ou les juridictions, la vente, la distribution ainsi que l'usage de ces papiers et imprimés ainsi contrefaits ou falsifiés, en l'espèce, des faux avis de saisie d'huissiers de justice,

- fait diffuser de faux avis de saisie d'huissier portant contrefaçon ou falsification de sceaux, timbres ou marques d'une autorité publique, en l'espèce une fausse Marianne au nom du ministère de la Justice ;

"aux motifs que Philippe X... ne peut tout à la fois soutenir avoir ignoré le fondement de la poursuite au prétexte que deux convocations lui ont été remises, et rappeler les instruction du procureur de la République dans son soit-transmis du 1er décembre 2000 ; desquelles il résulte que ce magistrat a demandé à l'officier de police judiciaire de "refaire une nouvelle convocation par officier de police judiciaire avec le bon article", ce qui, à l'évidence, emporte l'annulation de la première convocation ; que dans son audition du 21 décembre 2000 qui fait suite à la remise de la seconde convocation, Philippe X... déclare prendre acte de la prévention dont il aura à répondre, à savoir de la "diffusion de faux avis de saisie d'huissier portant contrefaçon ou falsification de sceaux, timbres ou marques d'une autorité publique, en l'espèce une fausse Marianne au nom du ministère de la Justice" ; que les faits poursuivis à l'encontre de Philippe X... ne visent que la seule opposition (sic), sur le tract publicitaire en cause, d'une contrefaçon du sceau du Ministère de la Justice employé par les huissiers de justice comme un signe des pouvoirs qu'ils tiennent de leur fonction d'officiers ministériels ; qu'est une contrefaçon, en l'espèce, le sceau incriminé reproduisant la figure de la Liberté telle qu'elle est déterminée pour le sceau de l'Etat par le décret du 25 septembre 1870 ;

"alors, d'une part, que l'arrêt attaqué relève que le jugement a déclaré Philippe X... coupable de tous les faits visés par les deux convocations successives, soit de faux avis d'huissier et de fausse Marianne au nom du Ministère de la Justice, et confirme sans restriction ledit jugement ;

qu'en déclarant, dès lors, dans ses motifs, que la première convocation - visant les faux avis d'huissier - avait été annulée par la seconde - visant la fausse Marianne au nom du Ministère de la Justice - et que les faits poursuivis ne visaient que la contrefaçon du sceau du Ministère de la Justice, la cour d'appel a privé la condamnation prononcée de toute base légale ;

"alors, d'autre part, qu'en l'absence d'annulation expresse de la première convocation par la seconde, qui ne visait pas les mêmes faits, l'arrêt attaqué - qui a estimé nécessaire de préciser quels étaient les faits exactement visés par les poursuites - ne pouvait écarter les moyens de nullité de la saisine de la juridiction de jugement et de l'atteinte portée aux droits de la défense faute d'une information claire sur les faits poursuivis, sans violer les articles préliminaire, 385, 388 du Code de procédure pénale et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme ;

"alors enfin que, comme le relève l'arrêt attaqué, la prévention visait la contrefaçon d'une "Marianne" au nom du Ministère de la Justice ; qu'en déclarant Philippe X... coupable d'avoir contrefait "une figure de la Liberté telle qu'elle est déterminée pour le sceau de l'Etat", la cour d'appel a excédé sa saisine et violé l'article 388 du Code de procédure pénale" ;

Attendu que le demandeur ne saurait soutenir n'avoir pas été clairement informé des faits reprochés, dès lors qu'il résulte tant des pièces de procédure que des énonciations du jugement et de l'arrêt confirmatif attaqué qu'il a été poursuivi et condamné pour les faits de contrefaçon de sceaux, timbres ou marques d'une autorité publique, tels que visés par la seule convocation en justice notifiée le 21 décembre 2001 ;

D'où il suit, qu'en ses deux premières branches, le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles préliminaire, 385, 592 et 593 du Code de procédure pénale, 6 de la Convention européenne des droits de l'homme ;

"en ce que l'arrêt attaqué a écarté les exceptions de procédure et condamné Philippe X... du chef de contrefaçon et falsification du sceau de l'Etat ;

"aux motifs que, par des motifs congruents, le tribunal a justement écarté le moyen tiré de ce que la procédure aurait été tronquée, en soulignant que le prévenu se réfère, pour présenter une telle défense, à une autre procédure suivie contre lui pour avoir fait réaliser une campagne publicitaire utilisant des tracts imitant les imprimés officiels utilisés pour verbaliser les personnes contrevenant aux règles de stationnement des véhicules automobiles ;

"alors que, comme le faisaient valoir les conclusions d'appel et comme cela ressort du procès-verbal d'audition du 9 novembre 2000, le prévenu ne se référait pas à une autre procédure pour soutenir que l'entier dossier ne lui avait pas été communiqué faute de comporter le procès-verbal du premier interrogatoire subi dans cette même affaire ; qu'en effet, selon les mentions mêmes du procès-verbal du 9 novembre 2000, Philippe X... s'était étonné d'être entendu "pour la deuxième fois dans le cadre de cette affaire de faux avis de saisie" d'huissier, précisant qu'il s'en était déjà expliqué devant un fonctionnaire de police du commissariat du 4e arrondissement ; que l'arrêt attaqué s'est ainsi mis en contradiction avec les pièces de la procédure, en sorte qu'il est privé de tout motif ;

"et alors, d'autre part, qu'en ne demandant pas au Parquet la communication de toutes les pièces, et notamment du procès-verbal du premier interrogatoire du prévenu, la cour d'appel a méconnu le principe du contradictoire, de l'égalité des armes et des droits de la défense" ;

Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 444-3 du Code pénal, 592 et 593 du Code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a condamné Philippe X... pour avoir diffusé un sceau contrefait ou falsifié ;

"aux motifs que le délit de contrefaçon n'implique pas nécessairement l'imitation frauduleuse de l'ensemble des sceaux, des timbres ou des marques contrefaits ; qu'il suffit que l'une des parties en ait été imitée pour donner à la réalisation l'apparence de la marque de l'autorité ; que, tel est le cas, en l'espèce, du sceau incriminé reproduisant la figure de la Liberté telle qu'elle est déterminée pour le sceau de l'Etat par le décret du 25 septembre 1870, et qui de surcroît comporte la mention du Ministère de la Justice ; que l'apposition de ce sceau ainsi contrefait avait bien pour but de tromper, ne fût-ce que momentanément, le destinataire de ces faux "avis de saisie", de sorte que Philippe X... ne saurait utilement soutenir que l'élément intentionnel du délit fait défaut ;

"alors, d'une part, que l'article 444-3 du Code pénal réprime la contrefaçon ou la falsification, et non pas la simple imitation ; que la contrefaçon suppose une reproduction servile ; que, dès lors, en étendant l'application de ce texte répressif à la seule imitation destinée à donner "l'apparence de la marque de l'autorité", l'arrêt attaqué l'a violé ainsi que les principes de la légalité des délits et des peines et de l'interprétation stricte de la loi pénale ;

"alors, d'autre part, que le délit de diffusion d'un sceau contrefait suppose une intention frauduleuse caractérisée par la volonté de tromper durablement sur la portée et la nature du document qui en est le support, et non par la seule volonté d'attirer l'attention à des fins purement publicitaires et licites ; que l'arrêt attaqué a encore violé l'article 444-3 du Code pénal" ;

Sur le premier moyen, pris en sa troisième branche ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu que, pour déclarer le prévenu coupable d'avoir contrefait le sceau du ministère de la Justice, l'arrêt relève, par motifs propres et adoptés, que la reproduction de la figure de la Liberté, telle qu'elle est prévue pour le sceau de l'Etat, avec l'inscription, sur le pourtour, "ministère de la justice", donne à cet ensemble l'apparence de la marque d'une autorité publique ; que les juges ajoutent que l'apposition d'un tel sceau avait pour but de tromper, ne fût-ce que momentanément, les destinataires des faux avis de saisie ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, qui procèdent de son pouvoir souverain d'appréciation des faits et circonstances de la cause contradictoirement débattus, la cour d'appel, sans méconnaître l'étendue de sa saisine, a caractérisé en tous ses éléments, tant matériels qu'intentionnel, le délit prévu par l'article 444-3,1 , du Code pénal ;

D'où il suit que les moyens doivent être écartés ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Cotte président, Mme Agostini conseiller rapporteur, MM. Farge, Blondet, Palisse, Le Corroller, Castagnède conseillers de la chambre, Mme Beaudonnet, M. Chaumont conseillers référendaires ;

Avocat général : M. Frechede ;

Greffier de chambre : Mme Krawiec ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 03-83080
Date de la décision : 09/03/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

ATTEINTE A LA CONFIANCE PUBLIQUE - Falsification des marques de l'autorité - Contrefaçon ou falsification des sceaux, timbres ou marques d'une autorité publique - Eléments constitutifs - Elément matériel - Cas.

Caractérise le délit prévu et puni par l'article 444-3, 1°, du Code pénal la reproduction de la figure de la Liberté, telle qu'elle est prévue pour le sceau de l'Etat, avec l'inscription, sur le pourtour " ministère de la Justice ", qui donne à cet ensemble l'apparence d'une marque de l'autorité publique.


Références :

Code pénal 444-3, 1°

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 02 avril 2003


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 09 mar. 2004, pourvoi n°03-83080, Bull. crim. criminel 2004 N° 62 p. 234
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2004 N° 62 p. 234

Composition du Tribunal
Président : M. Cotte
Avocat général : M. Fréchède.
Rapporteur ?: Mme Agostini.
Avocat(s) : la SCP Waquet, Farge et Hazan.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2004:03.83080
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