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21/10/2003 | FRANCE | N°01-11169

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 21 octobre 2003, 01-11169


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen, pris en ses trois branches :

Attendu que M. X..., avocat au barreau de Nice, fait grief à l'arrêt (Aix-en-Provence, 23 mars 2001) d'avoir rejeté son recours tendant à l'annulation de la décision prise par le conseil de l'Ordre des avocats du barreau de Nice de modifier le règlement intérieur de ce barreau en y insérant la disposition selon laquelle "à compter du 1er janvier 2001, toute opération en débit ou crédit sur le compte "maniements d

e fonds", devra être accompagné du justificatif de sa cause et de son objet", ...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen, pris en ses trois branches :

Attendu que M. X..., avocat au barreau de Nice, fait grief à l'arrêt (Aix-en-Provence, 23 mars 2001) d'avoir rejeté son recours tendant à l'annulation de la décision prise par le conseil de l'Ordre des avocats du barreau de Nice de modifier le règlement intérieur de ce barreau en y insérant la disposition selon laquelle "à compter du 1er janvier 2001, toute opération en débit ou crédit sur le compte "maniements de fonds", devra être accompagné du justificatif de sa cause et de son objet", alors que :

1 / le conseil de l'Ordre ne saurait, sans excéder ses pouvoirs, imposer aux avocats une obligation qui viole le secret professionnel institué par la loi ; qu'en affirmant que l'article 17, alinéas 3, 5 et 9 de la loi du 31 décembre 1971 ménage au conseil de l'Ordre du barreau de Nice la faculté de subordonner toute opération sur le compte ouvert auprès de la caisse des règlements pécuniaires des avocats à la fourniture du justificatif de sa cause et de son objet, bien que la délivrance de tels justificatifs impose à l'avocat de transmettre des informations couvertes par le secret professionnel auquel il est tenu, la cour d'appel a(urait) violé l'article 17 de la loi du 31 décembre 1971, ensemble les articles 226-13 du nouveau Code pénal et 160 du décret du 27 novembre 1991 ;

2 / l'article 241 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 prévoit que seul le retrait des fonds inscrits au compte ouvert au nom d'un avocat dans les livres de la caisse des règlements pécuniaires des avocats doit être subordonné à un contrôle préalable de cette dernière ;

qu'une telle disposition qui doit être interprétée conformément aux normes supérieures et, notamment, à la loi qui institue le secret professionnel, ne saurait justifier l'adoption par le conseil de l'Ordre d'une mesure subordonnant non seulement le retrait mais encore le dépôt de fonds sur un tel compte à la fourniture de renseignements couverts par le secret professionnel qui s'impose aux avocats ; qu'en affirmant, néanmoins, que la disposition litigieuse du règlement intérieur du barreau de Nice qui subordonne toute opération de débit ou de crédit à la fourniture de documents susceptibles d'être couverts par le secret professionnel, pouvait être adoptée en application de l'article 241 précité, la cour d'appel a(aurait) violé cette disposition par fausse interprétation, ensemble les articles 226-13 du nouveau Code pénal et 160 du décret du 27 novembre 1991 ;

3 / en toute hypothèse, le juge administratif est seul compétent pour apprécier la légalité d'un acte administratif ; qu'en écartant toute question préjudicielle relative à la validité de l'article 8 de l'arrêté du 5 juillet 1996, pris en application de l'article 11 du décret n° 96-610 de la même date, bien que la seconde de ces dispositions ne prévoie que le contrôle du retrait des fonds déposés sur un compte ouvert dans les livres de la caisse des règlements pécuniaires des avocats et tandis que, selon l'interprétation adoptée par l'arrêt, la première de ces dispositions régirait tant les opérations de débit que de crédit et les subordonnerait à la délivrance d'informations non visées par le décret précité, la cour d'appel a(urait) violé la loi des 16-24 août 1790, ensemble l'article 49 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que l'article 17 de la loi du 31 décembre 1971 donne mission au conseil de l'Ordre de traiter toutes questions intéressant l'exercice de la profession et de veiller à l'observation des devoirs des avocats ainsi qu'à la protection de leurs droits, de maintenir les principes de probité, de désintéressement, de modération et de confraternité sur lesquels repose la profession et d'exercer la surveillance que l'honneur et l'intérêt de ses membres rendent nécessaire ; que l'article 53 du même texte renvoie à des décrets en Conseil d'Etat la précision des modalités de contrôle des conditions dans lesquelles les avocats reçoivent des fonds, effets ou valeurs pour le compte de leurs clients, les déposent dans une caisse créée obligatoirement et en effectuent le règlement ; que l'article 229 du décret d'application édicte que l'avocat procède aux règlements pécuniaires liés à son activité professionnelle en observant les règles fixées par ce texte et par le règlement intérieur du barreau ; que les articles 241 et 241-1 du même texte, relatifs, le premier aux opérations de retrait, le second aux dépôts et maniements de ces fonds, effets ou valeurs, renvoient à un arrêté ministériel, lequel prescrit que la caisse des règlements pécuniaires des avocats doit être en mesure de contrôler, notamment lors des opérations de retrait de fonds, la provenance de ceux-ci et la justification du lien entre les règlements pécuniaires des avocats et les actes juridiques ou judiciaires accomplis par ceux-ci dans le cadre de leur exercice professionnel ; que, dès lors, la cour d'appel, qui n'avait pas à surseoir à statuer sur l'exception d'illégalité de l'article 8 de l'arrêté ministériel du 5 juillet 1996, dépourvue de tout caractère sérieux au regard des textes donnant compétence au conseil de l'Ordre pour fixer les règles applicables aux règlements pécuniaires liés à l'activité professionnelle des avocats, a exactement jugé que le conseil de l'Ordre du barreau de Nice, ainsi investi, par ces dispositions législatives et réglementaires, du pouvoir d'apporter au secret professionnel les dérogations strictement nécessaires à l'organisation du contrôle relatif aussi bien aux dépôts qu'aux retraits opérés sur les comptes ouverts par les avocats auprès de la caisse des règlements pécuniaires, pouvait, sans excéder les limites de son pouvoir réglementaire, obliger les membres de ce barreau à produire un justificatif de la cause et de l'objet de toute opération en débit ou crédit sur le compte "maniements de fonds" ouvert auprès de la caisse des règlements pécuniaires des avocats ; qu'ainsi, le moyen ne peut être accueilli ;

Sur le second moyen, tel qu'il est reproduit en annexe au présent arrêt :

Attendu que, la cour d'appel n'ayant été saisie que d'une contestation à l'égard de la décision du conseil de l'Ordre qui ne mentionnait aucun montant pour la justification de la cause et de l'objet des opérations en débit ou en crédit sur le compte "maniements de fonds" ouvert auprès de la caisse des règlements pécuniaires, le moyen est inopérant ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un octobre deux mille trois.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 01-11169
Date de la décision : 21/10/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

AVOCAT - Secret professionnel - Limites - Obligation réglementaire de justifier des opérations réalisées sur le compte de la CARPA.

AVOCAT - Conseil de l'Ordre - Pouvoir réglementaire - Etendue - Obligation réglementaire de justifier des opérations réalisées sur le compte de la CARPA

SECRET PROFESSIONNEL - Avocat - Limites - Obligation réglementaire de justifier des opérations réalisées sur le compte de la CARPA

Le conseil de l'Ordre des avocats, investi par l'article 17 de la loi du 31 décembre 1971 et par les articles 229, 241, 241-1 du décret du 27 novembre 1991 du pouvoir d'apporter au secret professionnel les dérogations strictement nécessaires à l'organisation du contrôle relatif aussi bien aux dépôts qu'aux retraits opérés sur les comptes ouverts par les avocats auprès de la caisse des règlements pécuniaires, pouvait, sans excéder les limites de son pouvoir réglementaire, obliger les membres de son barreau à produire un justificatif de toute opération en débit ou crédit sur le compte " maniements de fonds " ouvert auprès de la caisse des règlements pécuniaires des avocats.


Références :

décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 art. 229, 241, 241-1
loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971, art. 17

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 23 mars 2001


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 21 oct. 2003, pourvoi n°01-11169, Bull. civ. 2003 I N° 205 p. 161
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2003 I N° 205 p. 161

Composition du Tribunal
Président : M. Lemontey.
Avocat général : M. Mellottée.
Rapporteur ?: M. Gallet.
Avocat(s) : la SCP Boré, Xavier et Boré, la SCP Bouzidi et Bouhanna.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2003:01.11169
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