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02/09/2003 | FRANCE | N°03-82103

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 02 septembre 2003, 03-82103


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le deux septembre deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller MAZARS, les observations de Me ODENT, de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général MOUTON ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- LE MINISTRE DE L'INTERIEUR, partie civile,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PARIS, en d

ate du 25 mars 2003, qui, dans l'information suivie notamment contre Clément X..., du...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le deux septembre deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller MAZARS, les observations de Me ODENT, de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général MOUTON ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- LE MINISTRE DE L'INTERIEUR, partie civile,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PARIS, en date du 25 mars 2003, qui, dans l'information suivie notamment contre Clément X..., du chef d'injure et de diffamation publiques envers une administration publique, a déclaré irrecevable sa constitution de partie civile ;

Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 30 et 48 de la loi du 29 juillet 1881, 2 du Code de procédure pénale, 10 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

"en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré irrecevable la constitution de partie civile de M. le ministre de l'Intérieur ;

"aux motifs que, "par arrêt, en date du 10 décembre 2002, cette Cour a considéré que le ministre de l'Intérieur avait qualité pour porter plainte au nom des services de police dont il a la charge et qui s'estimeraient diffamés, en application de l'article 48, 1 , de la loi du 29 juillet 1881 et de l'article 30 de la même loi ; que cette disposition n'emporte pas, pour autant, "ipso jure", la faculté pour un ministre de se constituer partie civile, cette action civile, fondée sur l'article 2 du Code de procédure pénale, ayant pour objet, différent de celui mentionné ci-dessus, la réparation d'un préjudice souffert personnellement par la victime d'une infraction ; qu'en l'espèce, il est constant que le ministre de l'Intérieur ne justifie ni même n'allègue souffrir un préjudice qui lui serait personnel du fait de la diffamation alléguée, le dommage ayant été supporté par les policiers se sentant visés par les propos, diffamatoires selon les termes de la plainte ; qu'il ne tient par ailleurs d'aucune autre disposition légale le pouvoir de se constituer partie civile pour en obtenir réparation mais seulement celui, en matière de presse, de porter plainte pour permettre que l'action publique puisse être engagée ; qu'il ne saurait être soutenu que le précédent arrêt, en date du 10 décembre 2002, a définitivement tranché cette question, alors qu'il ne s'est prononcé que sur l'habileté du ministre de l'Intérieur à dénoncer des faits commis par voie de presse au procureur de la République et porter plainte auprès de lui, en application de l'article 48 de la loi du 29 juillet 1881, cette démarche étant le préalable indispensable aux poursuites susceptibles d'être engagées" ;

"alors que, d'une part, en permettant au ministre de porter plainte en cas de diffamation d'une administration pour défendre la réputation de l'administration dont il a la charge, le législateur a tenu compte de ce que, ne s'agissant pas d'un corps constitué, l'administration ne pourrait pas agir en tant que telle devant les tribunaux, si aucune personne n'était légalement habilitée à la représenter ; qu'en cas de diffamation de la police nationale, seul le ministre de l'Intérieur peut mettre en mouvement l'action publique par sa plainte et seul le ministre de l'Intérieur peut se constituer partie civile pour demander réparation du préjudice subi par la police nationale, conformément à l'article 2 du Code de procédure pénale ; qu'en refusant au ministre de l'Intérieur le droit de se constituer partie civile, pour demander la réparation du préjudice subi par l'administration qu'il représente, la cour d'appel a vidé de sa substance le droit de plainte du ministre et méconnu le droit à la protection de la réputation consacré par l'article 10 de la Convention européenne des droits de l'homme et le droit à la réparation du préjudice ;

"alors que, d'autre part, en statuant ainsi sans répondre au mémoire du ministre de l'Intérieur qui soutenait que ni le ministère public ni le mis en examen ne précisaient quelle autre personne physique ou morale pouvait se constituer partie civile en l'occurrence, la cour d'appel a méconnu l'article 593 du Code de procédure pénale" ;

Attendu qu'à la suite de la publication d'un ouvrage intitulé "Vos papiers ! Que faire face à la police", le ministre de l'Intérieur, estimant que certains des propos tenus et les dessins de la couverture étaient constitutifs de diffamation et d'injure publiques envers la police nationale, a adressé une plainte au procureur de la République ; qu'une information a été ouverte au cours de laquelle Michel Y..., éditeur de l'ouvrage, a été mis en examen du chef d'injure et de diffamation envers une administration publique, délits prévus et réprimés par les articles 23, 29 et 30 de la loi du 29 juillet 1881, Clément X..., auteur, ainsi que Jean-François Z..., dessinateur, étant mis en examen pour complicité de ces délits ; que, le ministre de l'Intérieur s'étant constitué partie civile, Clément X... a contesté la recevabilité de cette constitution ; que le juge d'instruction a rejeté cette contestation ;

Attendu que, pour infirmer l'ordonnance du juge d'instruction et déclarer irrecevable la constitution de partie civile du ministre de l'Intérieur, la juridiction du second degré prononce par les motifs repris au moyen ;

Attendu qu'en cet état, et dès lors que le ministre de l'Intérieur, qui n'est pas personnellement victime de l'infraction, ne tient d'aucune disposition spéciale le droit de se constituer partie civile pour obtenir réparation du préjudice causé aux fonctionnaires de police et à l'administration qu'il dirige par le délit poursuivi, la chambre de l'instruction qui a répondu, comme elle le devait, aux articulations essentielles du mémoire dont elle était saisie, a justifié sa décision ;

Que, dès lors, le moyen, inopérant en ce qu'il se prévaut du paragraphe 2 de l'article 10 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, ne saurait être accueilli ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Cotte président, Mme Mazars conseiller rapporteur, M. Joly, Mmes Chanet, Anzani, MM. Beyer, Pometan conseillers de la chambre, MM. Desportes, Ponsot, Mme Ménotti conseillers référendaires ;

Avocat général : M. Mouton ;

Greffier de chambre : Mme Daudé ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 03-82103
Date de la décision : 02/09/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

ACTION CIVILE - Préjudice - Préjudice personnel - Ministre de l'Intérieur - Injure et diffamation publiques envers la police nationale (non).

PRESSE - Procédure - Action civile - Préjudice - Préjudice personnel - Ministre de l'Intérieur - Injure et diffamation publiques envers la police nationale (non)

Dans des poursuites exercées pour injure et diffamation publiques envers la police nationale, le ministre de l'Intérieur, qui ne souffre pas personnellement du dommage causé par l'infraction, ne tient d'aucune disposition spéciale le pouvoir de se constituer partie civile pour obtenir réparation du préjudice causé aux fonctionnaires de son Administration.. La faculté qu'il tient de l'article 48.3° de la loi du 29 juillet 1881, dans le cas d'injure ou de diffamation envers les fonctionnaires de son Administration, de porter plainte aux fins de mise en mouvement de l'action publique par le procureur de la République, n'emporte pas le droit pour le ministre de se constituer partie civile dans la procédure suivie sur sa plainte (1).


Références :

Loi du 29 juillet 1881 art. 48.3°

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris (chambre de l'instruction), 25 mars 2003

CONFER : (1°). (1) Cf. Chambre criminelle, 1998-12-15, Bulletin criminel 1998, n° 340, p. 990 (cassation partielle sans renvoi).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 02 sep. 2003, pourvoi n°03-82103, Bull. crim. criminel 2003 N° 146 p. 586
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2003 N° 146 p. 586

Composition du Tribunal
Président : M. Cotte
Avocat général : M. Mouton
Rapporteur ?: Mme Mazars
Avocat(s) : Me. Odent, la SCP Waquet, Farge et Hazan.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2003:03.82103
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