AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu que la société du Figaro fait grief à l'arrêt attaqué (Bordeaux, 9 janvier 2002) de l'avoir condamnée à verser des dommages-intérêts à M. Nicolas X... pour atteinte à sa vie privée par la publication d'une photographie de sa résidence au Cap-Ferret, alors, selon le moyen :
1 / que l'atteinte à la vie privée au sens de l'article 9 du Code civil suppose l'existence d'une référence ou d'une allusion à la vie privée de la personne qui entend s'en prévaloir ; qu'en l'espèce, l'arrêt attaqué estime que la publication de la photographie de la façade extérieure d'une résidence secondaire, de style colonial ou Louisiane, prise depuis le domaine public maritime avec la légende "villa de la famille X..., au Cap-Ferret, près de l'embarcadère de Bélisaire" pour illustrer un article consacré aux ressources touristiques de la région du Bassin d'Arcachon est une atteinte à la vie privée de M. Nicolas X..., au motif que le document est accompagné du patronyme de son propriétaire et de la localisation précise du lieu de l'immeuble ; qu'en se déterminant ainsi sans préciser en quoi il a été porté atteinte à la vie privée de M. Nicolas X... par la révélation de faits ayant le caractère d'intimité pour celui-ci, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé ;
2 / que seule l'exploitation commerciale de l'image d'un bien sans le consentement de son propriétaire porte atteinte à son droit d'usage et de jouissance ; qu'il n'y a pas de droit du propriétaire sur l'image de son bien ; qu'en l'espèce, l'arrêt estime que la publication de cette photographie porte non seulement atteinte à la vie privée de M. Nicolas X..., mais également à ses prérogatives de propriétaire, au motif que "le droit à l'image" est "un attribut du droit de propriété" ; qu'en se déterminant ainsi sans préciser en quoi il était porté atteinte au droit d'usage et de jouissance du propriétaire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 544 du Code civil ;
Mais attendu que la cour d'appel a justement retenu que la publication dans la presse de la photographie de la résidence de M. X..., accompagnée du nom du propriétaire et de sa localisation précise, portait atteinte au droit de M. X... au respect de sa vie privée ; qu'ainsi, abstraction faite du motif, erroné mais surabondant, selon lequel le "droit à l'image" serait un attribut du droit de propriété, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société du Figaro aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de M. X... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq juin deux mille trois.