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03/06/2003 | FRANCE | N°02-87484

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 03 juin 2003, 02-87484


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le trois juin deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller référendaire DESPORTES, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général DI GUARDIA ;

Statuant sur les pourvois formés par :

- LE PROCUREUR GENERAL PRES LA COUR D'APPEL DE BASTIA,

- X... Michel,

contre l'arrêt n° 324 de la chambre de l

'instruction de ladite cour d'appel, en date du 18 septembre 2002, qui a rejeté la demande, pr...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le trois juin deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller référendaire DESPORTES, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général DI GUARDIA ;

Statuant sur les pourvois formés par :

- LE PROCUREUR GENERAL PRES LA COUR D'APPEL DE BASTIA,

- X... Michel,

contre l'arrêt n° 324 de la chambre de l'instruction de ladite cour d'appel, en date du 18 septembre 2002, qui a rejeté la demande, présentée par le second, tendant à l'annulation d'actes d'exécution d'une commission rogatoire délivrée par un juge d'instruction monégasque ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

I - Sur le pourvoi du procureur général :

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

Sur la recevabilité du pourvoi contestée par le mémoire en défense ;

Attendu que, le ministère public puisant dans les articles 567 et 591 du Code de procédure pénale le droit de se pourvoir en cassation afin de poursuivre l'annulation d'une décision qui lui apparaît entachée d'illégalité, le procureur général est recevable à se pourvoir contre un arrêt de la chambre de l'instruction rejetant une requête en nullité d'actes de la procédure ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 173, 694, 197 et 593 du Code de procédure pénale, contradiction de motifs ;

"en ce que la Cour a déclaré recevable la requête en nullité ;

"aux motifs qu'en application de l'article 694 du Code de procédure pénale, les demandes d'entraide émanant des autorités judiciaires étrangères doivent être exécutées dans les formes prévues par ce code, ce qui implique que la régularité de leur exécution soit soumise au contrôle juridictionnel organisé par les articles 173 et suivants du même code ;

"que décider que ce contrôle ne peut plus s'exercer dès lors que les pièces d'exécution ont été retournées à l'autorité judiciaire étrangère reviendrait à priver de tout recours utile les personnes concernées, celles-ci se trouvant confrontées à un insoluble conflit négatif de compétence entre l'Etat requis et l'Etat requérant en cas de refus par chacun d'eux de se pencher sur la question au motif qu'elle ressortirait aux seules autorités de l'autre Etat ;

"qu'en particulier, le recours en annulation prévu par l'article 173 du Code de procédure pénale deviendrait illusoire en cas de transmission directe des demandes d'entraide et de leurs pièces d'exécution, pratique favorisée par les articles 696 et suivants du même code et utilisée en l'espèce ;

"que la personne qui estime qu'une nullité a été commise n'étant recevable à exercer un recours en annulation que si elle a la qualité de partie à la procédure, ce recours ne serait plus possible dès lors que, comme en l'espèce, la mise en examen serait prononcée au vu des pièces d'exécution de la commission rogatoire internationale, c'est-à-dire longtemps après l'accomplissement des actes critiqués :

en effet, par définition, la personne en question n'acquiert alors la qualité de partie que postérieurement à la transmission des pièces, donc trop tard ;

"que les actes dont la régularité est contestée ont été mis à la disposition de la chambre de l'instruction par la défense qui a joint à sa demande la copie régulièrement obtenue des pièces en question ;

"alors que, les demandes d'entraide émanant des autorités judiciaires étrangères devant être exécutées dans les formes prévues par la loi française et l'article 173 du Code de procédure pénale ne faisant pas obstacle à ce que la chambre de l'instruction soit saisie, selon les modalités prévues par ce texte, d'une requête en annulation de pièces d'exécution en France d'une commission rogatoire délivrée par une autorité judiciaire étrangère, la recevabilité de ce recours est subordonnée à la condition que les actes dont la régularité est contestée puissent être mis à la disposition de la juridiction compétente pour en assurer le contrôle (Crim. 24 juin 1997) ;

"alors que, d'une part, tel n'est pas le cas en l'espèce, les pièces d'exécution de la commission rogatoire internationale ayant été retournées aux autorités monégasques antérieurement à la requête en nullité, que les pièces produites en copie d'une procédure étrangère par le requérant sont insuffisantes et ne répondent pas aux exigences édictées par les articles 173, 194 et 197 du Code de procédure pénale qui prévoient la mise à disposition du dossier de la procédure à la chambre de l'instruction ;

"alors que, d'autre part, et en l'absence de toute possibilité pour les autorités judiciaires françaises de demander communication d'une procédure initiée et conduite exclusivement par un pays étranger souverain, afin d'en examiner sa régularité, le requérant n'est en rien privé de l'exercice de ses droits dans la mesure où il lui appartient de saisir les autorités judiciaires monégasques compétentes, de toutes irrégularités constatées" ;

Vu les articles 173 et 694 du Code de procédure pénale ;

Attendu que, si le premier de ces textes ne fait pas obstacle à ce que la chambre de l'instruction soit saisie, selon les modalités qu'il prévoit, d'une requête en annulation de pièces d'exécution en France d'une commission rogatoire délivrée par une autorité judiciaire étrangère, c'est à la condition que ces pièces puissent être mises à la disposition de la juridiction compétente pour en assurer le contrôle ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure qu'en exécution d'une commission rogatoire délivrée par un magistrat monégasque le 7 mai 2001, le juge d'instruction d'Ajaccio a fait procéder à l'audition de Michel X... ainsi qu'à des perquisitions et saisies en application, tant des articles 12 à 16 de la Convention franco-monégasque sur l'aide judiciaire du 21 septembre 1949, que de l'article 694 du Code de procédure pénale ; qu'après retour des pièces d'exécution de la commission rogatoire au juge mandant, Michel X..., inculpé par ce magistrat du chef de blanchiment, a présenté devant la chambre de l'instruction de Bastia une requête en nullité des pièces précitées sur le fondement de l'article 173 du Code de procédure pénale ;

Attendu que, pour admettre la recevabilité de cette requête, contrairement aux réquisitions du ministère public, la chambre de l'instruction prononce par les motifs repris au moyen ;

Mais attendu qu'en se déterminant ainsi, alors qu'ayant été transmises aux autorités de l'Etat requérant pour être intégrées dans le dossier de la procédure suivie à l'étranger, les pièces d'exécution de la commission rogatoire n'étaient plus à sa disposition, la chambre de l'instruction, qui ne pouvait statuer en l'état des seules copies produites par le requérant, a méconnu les textes susvisés et le principe ci-dessus énoncé ;

D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ; qu'elle aura lieu sans renvoi, la Cour de Cassation étant en mesure de faire application de la règle de droit appropriée en application de l'article L. 131-5 du Code de l'organisation judiciaire ;

II - Sur le pourvoi de Michel X... :

Vu le mémoire produit ;

Attendu qu'en l'état de la cassation sans renvoi prononcée sur le pourvoi du procureur général, il n'y a pas lieu de statuer sur les moyens proposés pour Michel X..., devenus sans objet ;

Par ces motifs,

I - Sur le pourvoi de Michel X... :

Le REJETTE ;

II - Sur le pourvoi du procureur général :

CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de Bastia, en date du 18 septembre 2002 ;

DECLARE IRRECEVABLE la requête en nullité présentée par Michel X... ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Bastia et sa mention en marge où à la suite de l'arrêt annulé ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Cotte président, M. Desportes conseiller rapporteur, M. Joly, Mmes Chanet, Anzani, Mazars, MM. Beyer, Pometan conseillers de la chambre, MM. Ponsot, Valat, Mme Ménotti conseillers référendaires ;

Avocat général : M. Di Guardia ;

Greffier de chambre : Mme Randouin ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 02-87484
Date de la décision : 03/06/2003
Sens de l'arrêt : Rejet, cassation sans renvoi
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

INSTRUCTION - Commission rogatoire - Commission rogatoire internationale - Exécution - Actes d'exécution - Contrôle de régularité - Condition.

L'article 694 du Code de procédure pénale, selon lequel les demandes d'entraide émanant des autorités judiciaires étrangères sont exécutées dans les formes prévues par ledit Code, implique que la régularité de leur exécution soit contrôlée par les juridictions françaises.. Toutefois, si l'article 173 du Code de procédure pénale ne fait pas obstacle à ce que la chambre de l'instruction soit saisie, selon les modalités qu'il prévoit, d'une requête en annulation de pièces d'exécution en France d'une commission rogatoire délivrée par une autorité judiciaire étrangère, c'est à la condition que ces pièces puissent être mises à la disposition de la juridiction compétente pour en assurer le contrôle. Tel n'est pas le cas lorsque ces pièces ont été transmises à l'Etat requérant pour être intégrées dans le dossier de la procédure suivie à l'étranger, la chambre de l'instruction ne pouvant statuer en l'état des seules copies produites par le requérant (1).


Références :

Code de procédure pénale 173

Décision attaquée : Cour d'appel de Bastia (chambre de l'instruction), 18 septembre 2002

CONFER : (1°). (1) A rapprocher : Chambre criminelle, 1997-06-24, Bulletin criminel 1997, no 252, p. 861 (rejet).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 03 jui. 2003, pourvoi n°02-87484, Bull. crim. criminel 2003 N° 113 p. 439
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2003 N° 113 p. 439

Composition du Tribunal
Président : M. Cotte
Avocat général : M. Di Guardia
Rapporteur ?: M. Desportes
Avocat(s) : la SCP Waquet, Farge et Hazan.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2003:02.87484
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