Sur le premier moyen :
Vu l'article 2103-1° bis du Code civil ;
Attendu qu'est créancier privilégié, conjointement avec le vendeur et, le cas échéant, le prêteur de deniers, le syndicat des copropriétaires, sur le lot vendu, pour le paiement des charges et travaux mentionnés aux articles 10 et 30 de la loi du 10 juillet 1965 relatifs à l'année courante et aux quatre dernières années échues ; toutefois le syndicat est préféré au vendeur et prêteur de deniers pour les créances afférentes aux charges et travaux de l'année courante et des deux dernières années échues ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Caen, 4 juillet 2000) qu'à la suite de la vente par Mme X... de 7 des 9 lots dont elle était propriétaire dans un immeuble en copropriété, et de l'opposition faite par le syndicat des copropriétaires (le syndicat) entre les mains du notaire pour un montant global de 296 469 francs, la Banque hypothécaire européenne, devenue Compagnie européenne d'opération immobilière BIE, (la CEOI-BIE), créancier inscrit au premier rang, s'est opposée au versement de cette somme au syndicat et n'y a consenti que pour un montant partiel représentant les charges dues par Mme X... pour les seuls lots vendus ; que le syndicat a assigné la CEOI-BIE en règlement par le notaire du surplus de sa créance et notamment d'une somme de 43 904,94 francs au titre des charges impayées des lots restant la propriété de Mme X..., et d'une somme de 110 467,35 francs au titre des remboursements du capital de l'emprunt contracté par le syndicat pour financer le ravalement de l'immeuble ;
Attendu que pour dire le privilège de l'article 2103 du Code civil applicable à l'opposition faite par le syndicat pour la somme de 43 904,94 francs, l'arrêt retient qu'il n'est pas contesté que cette somme correspond à des charges dues à la date de l'opposition par Mme X... conformément aux dispositions de l'article 10 de la loi du 10 juillet 1965, que les dispositions de l'article 2103 du Code civil ne restreignent pas le privilège immobilier spécial du syndicat aux seules charges restant dues sur le lot vendu, que ce privilège peut garantir des sommes qui, dès lors qu'elles rentrent dans les prévisions de l'article 10 de la loi précitée, portent néanmoins sur les lots invendus et que tel est le cas en l'espèce ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le privilège immobilier spécial du syndicat n'a été institué que pour permettre le paiement des charges afférentes aux lots vendus, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et sur le second moyen :
Vu l'article 19-1 de la loi du 10 juillet 1965 ;
Attendu que l'obligation de participer aux charges et travaux mentionnés aux articles 10 et 30 de cette loi est garantie par le privilège immobilier spécial prévu par l'article 2103 du Code civil ;
Attendu que pour dire le privilège de l'article 2103 du Code civil applicable à l'opposition faite par le syndicat pour la somme de 110 467,35 francs, l'arrêt retient qu'il n'est pas contesté que l'emprunt contracté en juillet 1996 par le syndicat pour une durée de cinq ans a bien servi à la réalisation des travaux de ravalement à la charge des copropriétaires et que le remboursement de ce prêt constitue bien une charge de copropriété due par chaque copropriétaire ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le remboursement, anticipé pour cause de cession de lot, d'une quote part du capital d'un emprunt contracté par le syndicat pour effectuer des travaux de conservation et d'entretien d'un immeuble n'est pas assimilable au paiement de charges de copropriété dues pour l'année courante et les années antérieures échues, et que le recouvrement de cette quote part sur le vendeur de lot n'entre pas dans les prévisions du texte susvisé, la cour d'appel a violé celui-ci ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 4 juillet 2000, entre les parties, par la cour d'appel de Caen ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rouen.