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09/01/2002 | FRANCE | N°00-14002

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 09 janvier 2002, 00-14002


Sur le premier moyen :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 15 février 2000), que M. Sylvain Y..., décédé depuis lors, aux droits duquel viennent les consorts Y..., son épouse et les époux Z..., maîtres de l'ouvrage, ont chargé M. Velghe A..., architecte, assuré par la société Mutuelle des architectes français (MAF), d'une mission de conception d'un projet d'extension et de surélévation d'un bâtiment et la société Vision II, depuis en liquidation judiciaire ayant M. X... comme liquidateur, assurée par le Groupe des assurances nationales (GAN), de la maîtrise d

'oeuvre d'exécution des travaux, qui, après délivrance du permis de constru...

Sur le premier moyen :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 15 février 2000), que M. Sylvain Y..., décédé depuis lors, aux droits duquel viennent les consorts Y..., son épouse et les époux Z..., maîtres de l'ouvrage, ont chargé M. Velghe A..., architecte, assuré par la société Mutuelle des architectes français (MAF), d'une mission de conception d'un projet d'extension et de surélévation d'un bâtiment et la société Vision II, depuis en liquidation judiciaire ayant M. X... comme liquidateur, assurée par le Groupe des assurances nationales (GAN), de la maîtrise d'oeuvre d'exécution des travaux, qui, après délivrance du permis de construire le 25 juin 1991, ont été réalisés dans leur majeure partie ; que le juge des référés et le tribunal administratif, saisis par un voisin, ayant, respectivement, ordonné l'interruption des travaux sous astreinte et annulé un permis de construire modificatif délivré le 14 octobre 1991, les consorts Y...
Z... ont assigné M. Velghe A..., la MAF et le GAN en réparation de leur préjudice ;

Attendu que les consorts Y...
Z... font grief à l'arrêt de rejeter leur demande dirigée contre M. Velghe A... et la MAF, alors, selon le moyen :

1° que commet une faute engageant sa responsabilité l'architecte qui appose sa signature sur un projet de construction qui méconnaît le plan d'occupation des sols et le droit des tiers ainsi que les règles de la construction ; que la cour d'appel qui a constaté que M. Velghe A... avait apposé sa signature sur un projet modificatif bien que celui-ci n'ait respecté ni le plan d'occupation des sols, ni le droit des tiers, ni les règles de la construction mais qui a néanmoins ordonné la mise hors de cause de M. Velghe A... a, en statuant ainsi, violé l'article 1147 du Code civil ;

2° que l'architecte auquel est confiée une mission de conception d'un projet est responsable de la non-conformité des travaux avec le projet convenu dans le cas où il n'informe pas le maître de l'ouvrage des conséquences préjudiciables d'une telle modification ; qu'ayant relevé que M. Velghe A... avait constaté la non-conformité des travaux avec le plan qu'il avait établi mais avait néanmoins apposé sa signature sur le projet modificatif qui méconnaissait les règles de l'urbanisme et les droits des tiers, la cour d'appel qui n'a pas constaté que M. Velghe A... avait mis en garde le maître de l'ouvrage des conséquences préjudiciables des modifications intervenues mais qui a néanmoins mis hors de cause l'architecte a, en statuant ainsi, violé l'article 1147 du Code civil ;

3° que l'architecte, tenu d'une obligation de conseil qui ne se trouve pas limitée par les compétences de son client, doit apporter la preuve de ce qu'il a averti celui-ci des risques encourus du fait des irrégularités entachant son projet ; qu'en prononçant la mise hors de cause de M. Velghe A... sans avoir constaté que celui-ci établissait avoir exécuté son obligation de conseil, la cour d'appel a violé l'article 1147 du Code civil ;

Mais attendu qu'ayant constaté, par motifs propres et adoptés, que M. Velghe A..., qui avait découvert à la fin du mois d'août 1991 que l'immeuble avait été totalement démoli et reconstruit presqu'entièrement dès réception du permis de construire auquel était annexé un plan " pirate " conçu par la société Vision II et dépourvu de tout tampon de l'architecte, avait voulu rendre service aux consorts Y...
Z... en apposant sa signature sur un projet modificatif, conforme à ce plan pirate, ne respectant pas le plan d'occupation des sols et les droits des tiers, mais ne correspondant pas à la construction réalisée, la cour d'appel, qui a retenu que, sa mission ayant contractuellement pris fin au dépôt de la demande de permis de construire le 11 mars 1991, M. Velghe A... ne pouvait être, postérieurement à cette date, débiteur d'une quelconque obligation de conseil et que, les maîtres de l'ouvrage étant dès le départ déterminés à construire un immeuble ne pouvant correspondre au permis de construire initialement sollicité, ni à celui qu'ils avaient obtenu et étant entaché d'une anomalie flagrante, M. Sylvain Y..., qui n'était pas un néophyte puisqu'il avait déjà fait construire plusieurs immeubles, ne pouvait ignorer le risque qu'il prenait en entreprenant cette construction, a pu en déduire qu'il n'existait aucun lien de causalité entre le manquement grave de l'architecte aux devoirs de sa profession et le préjudice invoqué par les consorts Y...
Z..., dont ils étaient les propres artisans et qui était alors consommé ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen :

Attendu que les consorts Y...
Z... font grief à l'arrêt de rejeter leur demande dirigée contre le GAN, alors, selon le moyen, que la faute intentionnelle qui exclut la garantie de l'assureur est celle qui suppose la volonté de causer le dommage et pas seulement d'en créer le risque ; qu'en relevant seulement, pour exclure la garantie de la compagnie GAN Incendie, que la société Vision II avait construit un immeuble en sachant qu'il n'était conforme ni au permis de construire ni au plan d'occupation des sols, ce qui ne caractérisait pas la volonté de provoquer le dommage dont il était demandé réparation, la cour d'appel a violé l'article L. 113-1, alinéa 2, du Code des assurances ;

Mais attendu qu'ayant constaté que la société Vision II avait élaboré un projet de construction destiné à appuyer une demande de permis modificatif alors qu'elle ne pouvait ignorer, en tant que professionnelle de la construction, que ce projet, tel que présenté, était irréalisable et qu'elle avait construit un immeuble en sachant qu'il n'était conforme ni au permis de construire, ni au plan d'occupation des sols ni même au permis de construire obtenu sur la base du projet irréalisable, la cour d'appel, appréciant souverainement le caractère intentionnel des fautes de la société Vision II, contre les conséquences desquelles elle ne pouvait s'assurer, a pu en déduire que le GAN ne devait pas sa garantie ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Par ces motifs :

REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 00-14002
Date de la décision : 09/01/2002
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

ASSURANCE (règles générales) - Garantie - Exclusion - Faute intentionnelle ou dolosive - Caractère intentionnel - Appréciation souveraine .

POUVOIRS DES JUGES - Appréciation souveraine - Assurance - Garantie - Exclusion - Faute intentionnelle ou dolosive - Caractère intentionnel

ASSURANCE RESPONSABILITE - Garantie - Exclusion - Faute intentionnelle ou dolosive - Caractère intentionnel - Appréciation souveraine

Une cour d'appel, qui a souverainement apprécié le caractère intentionnel de la faute de l'assuré, contre les conséquences de laquelle il ne pouvait s'assurer, a pu en déduire que l'assureur ne devait pas sa garantie.


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Chambéry, 15 février 2000

A RAPPROCHER : Chambre civile 1, 2000-07-04, Bulletin 2000, I, n° 203, p. 133 (rejet), et les arrêts cités.


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 09 jan. 2002, pourvoi n°00-14002, Bull. civ. 2002 III N° 1 p. 1
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2002 III N° 1 p. 1

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Weber .
Avocat général : Avocat général : M. Baechlin.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Martin.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Piwnica et Molinié, M. Bertrand, la SCP Defrénois et Levis, la SCP Boulloche.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2002:00.14002
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