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13/11/2001 | FRANCE | N°99-42978

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 13 novembre 2001, 99-42978


Attendu que M. X... a été engagé le 26 août 1991 par la société les Mutuelles du Mans Assurances Vie au sein de laquelle il exerçait en dernier lieu les fonctions de chef de groupe ; qu'un accord collectif d'entreprise à effet du 1er septembre 1995 a été conclu le 20 juin 1995, instituant un nouveau mode de rémunération des chefs de groupe ; que la société a appliqué à M. X... les nouvelles modalités de rémunération à compter du 1er septembre 1995 en dépit du refus du salarié de ce qu'il considérait être une modification de son contrat de travail ; que le salarié a sai

si la juridiction prud'homale d'une demande en paiement d'indemnités de ...

Attendu que M. X... a été engagé le 26 août 1991 par la société les Mutuelles du Mans Assurances Vie au sein de laquelle il exerçait en dernier lieu les fonctions de chef de groupe ; qu'un accord collectif d'entreprise à effet du 1er septembre 1995 a été conclu le 20 juin 1995, instituant un nouveau mode de rémunération des chefs de groupe ; que la société a appliqué à M. X... les nouvelles modalités de rémunération à compter du 1er septembre 1995 en dépit du refus du salarié de ce qu'il considérait être une modification de son contrat de travail ; que le salarié a saisi la juridiction prud'homale d'une demande en paiement d'indemnités de rupture et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Sur le premier moyen :

Attendu que les Mutuelles du Mans Assurances Vie font grief à l'arrêt attaqué (Lyon, 24 mars 1999) d'avoir décidé que, réserve faite du salaire minimum garanti, le mode de rémunération de M. X... avait été contractuellement fixé par les parties et d'en avoir déduit que sa modification avait pour effet que la rupture du contrat de travail s'analysait en un licenciement alors, selon le moyen :

1° que la rémunération d'un salarié est exclusivement conventionnelle lorsque celui-ci a été engagé au minimum prévu par la convention collective pour le poste qu'il occupe, qu'en l'espèce, M. X... avait été engagé au minimum prévu par l'article 15, titre II de la convention collective de travail des échelons intermédiaires des services extérieurs de production des sociétés d'assurances du 13 novembre 1967 composé, dans sa partie fixe, d'une somme mensuelle forfaitaire dont les modalités de calcul étaient expressément prévues par la convention collective et, dans sa partie variable, de commissions pour lesquelles il était également prévu dans les conditions générales de collaboration que la modification de leurs taux pourrait intervenir à la suite d'une négociation collective conduite avec la représentation syndicale des producteurs salariés de base et échelons intermédiaires, ce dont il se déduisait que la rémunération du salarié résultait en totalité d'un accord collectif ; que la cour d'appel, qui énonce pourtant que, réserve faite du salaire minimum garanti, le mode de rémunération avait été contractuellement fixé par les parties, a violé l'article 1134 du Code civil ;

2° que, la cour d'appel, qui a décidé que, réserve faite du salaire minimum garanti, le mode de rémunération avait été contractuellement fixé par les parties aux motifs que les conditions générales de collaboration ne procédaient pas intégralement de la convention collective dont elles reprenaient seulement une partie des dispositions mais sans toutefois s'expliquer sur la nature des dispositions prétendument non reprises et empêchant, à ce titre, de rattacher la rémunération du salarié au statut collectif, n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle et, partant, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil ;

Mais attendu qu'ayant relevé que le mode de rémunération du salarié était déterminé par la lettre d'engagement signée par celui-ci et par les conditions générales de collaboration jointes à cette lettre et que ces conditions générales, élaborées unilatéralement par la société ne reprenaient qu'une partie des dispositions de la convention collective, la cour d'appel a retenu à bon droit que ce mode de rémunération avait une nature contractuelle ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que les Mutuelles du Mans Assurances Vie font encore grief à l'arrêt d'avoir décidé que le mode de rémunération de M. X... ne pouvait être modifié que par voie contractuelle et d'avoir en conséquence décidé que la société ne pouvait appliquer l'accord d'entreprise du 20 juin 1995 sans l'agrément du salarié si bien que la rupture du contrat de travail lui était imputable alors, selon le moyen :

1° qu'aux termes des dispositions de l'article L. 132-23 du Code du travail la convention ou les accords d'entreprise ou d'établissements peuvent adapter les dispositions des conventions de branche ou des accords professionnels ou interprofessionnels applicables dans l'entreprise aux conditions particulières de celle-ci ou des établissements considérés et que la convention ou les accords peuvent comporter des dispositions nouvelles et des clauses plus favorables au salarié ; qu'en l'espèce, l'accord du 20 juin 1995 qui avait été signé, conformément à l'article L. 132-20 du même Code, par la déléguée syndicale CGC, valablement désignée, et par deux délégués du personnel et qui posait en principe que la rémunération ne pourrait être inférieure à la rémunération minimale annuelle de la profession, avait augmenté la partie fixe de la rémunération de M. X... et avait instauré, au bénéfice de ce dernier, trois nouvelles primes non prévues initialement, ce dont il résultait que ces dispositions nouvelles étaient plus favorables au salarié ; que la cour d'appel, qui énonce pourtant que la clause de révision n'autorisait pas les Mutuelles du Mans à appliquer les dispositions de cet accord sans l'agrément de M. X... aux seuls motifs que, loin de se limiter à la révision des taux de commissions, ledit accord avait également apporté une modification à la partie fixe de la rémunération qu'il a augmentée et a intégré dans sa partie variable trois primes qui n'étaient pas prévues ni par le contrat initial, ni par la convention collective, n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et, partant, a violé les articles 1134 du Code civil et L. 132-23 du Code du travail ;

2° en toute hypothèse, que conformément au principe d'autonomie des sources du droit du travail, les interactions entre le contrat de travail et le statut collectif imposent au juge de se référer au principe de faveur, qu'en l'espèce et contrairement aux premiers juges, la cour d'appel, qui pour apprécier le caractère ou non favorable des dispositions litigieuses, s'est bornée à comparer de manière globale les bulletins de salaires du salarié sans rechercher, comme il le lui appartenait, dans quelle mesure le principe de faveur avait été respecté au regard des différents conflits de sources créés par l'accord d'entreprise, a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 132-23 et L. 135-2 du Code du travail ;

3° que les Mutuelles du Mans Assurances Vie faisaient valoir dans leurs conclusions que M. X... avait expressément averti son employeur, par courrier en date du 25 août 1995, de ce qu'il cesserait toute activité dans le cas où les nouvelles dispositions seraient appliquées à compter du 1er septembre 1995 et que le bulletin de salaire du mois de septembre 1995 de M. X... qu'elles produisaient, établi postérieurement à la mise en place du nouvel accord et sur lequel les juges d'appel se sont exclusivement appuyés pour apprécier le caractère ou non favorable des dispositions litigieuses, établissait à lui seul et par lui-même la cessation, par le salarié, de toute activité professionnelle à compter du 1er septembre, cessation directement répercutée en termes comptables sur ledit bulletin dans la colonne réservée aux commissions perçues au titre des affaires conclues ; qu'en se bornant dès lors à prendre en compte les seuls salaires effectivement versés sans examiner, comme il le lui était demandé, les éléments chiffrés de commissions portés sur ce bulletin de salaire et de nature à démontrer la mise à exécution de la menace de cessation d'activité proférée par le salarié quelques jours avant l'application des nouvelles dispositions, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions précitées du Code du travail et l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu qu'un accord collectif ne peut modifier le contrat de travail d'un salarié ; que seules les dispositions plus favorables d'un accord collectif peuvent se substituer aux clauses du contrat ; que la cour d'appel ayant relevé que la rémunération résultant de l'accord collectif était moins favorable au salarié que celle prévue par le contrat a exactement décidé de ne pas appliquer les dispositions de l'accord ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 99-42978
Date de la décision : 13/11/2001
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

1° CONTRAT DE TRAVAIL - EXECUTION - Salaire - Fixation - Mode de fixation - Portée.

1° Ayant relevé que le mode de rémunération du salarié était déterminé par la lettre d'engagement signée par celui-ci et par les conditions générales de collaboration jointes à cette lettre et que ces conditions générales, élaborées unilatéralement par la société ne reprenaient qu'une partie des dispositions de la convention collective, la cour d'appel a retenu à bon droit que ce mode de rémunération avait une nature contractuelle.

2° CONTRAT DE TRAVAIL - EXECUTION - Modification - Modification par un accord collectif - Possibilité (non).

2° CONVENTIONS COLLECTIVES - Dispositions générales - Accord collectif - Application - Condition 2° CONVENTIONS COLLECTIVES - Dispositions générales - Accord collectif - Dispositions plus favorables - Portée.

2° Un accord collectif ne peut modifier le contrat de travail d'un salarié ; seules les dispositions plus favorables d'un accord collectif peuvent se substituer aux clauses du contrat.


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 24 mars 1999

A RAPPROCHER : (2°). Chambre sociale, 1998-10-20, Bulletin 1998, V, n° 435, p. 326 (cassation partielle).


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 13 nov. 2001, pourvoi n°99-42978, Bull. civ. 2001 V N° 340 p. 271
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2001 V N° 340 p. 271

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Sargos .
Avocat général : Avocat général : Mme Barrairon.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Frouin.
Avocat(s) : Avocat : la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2001:99.42978
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