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27/06/2000 | FRANCE | N°99-86634

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 27 juin 2000, 99-86634


CASSATION sur le pourvoi formé par :
- la société X..., partie civile,
contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Bordeaux, en date du 14 septembre 1999, qui, dans une information suivie contre Jacqueline Y..., épouse Z..., et Roger Z... du chef de destruction d'un bien par incendie, a prononcé la nullité d'actes de la procédure.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande, en défense et en réplique ;
Sur la recevabilité du pourvoi contestée en défense ;
Attendu que l'arrêt attaqué ayant prononcé l'annulation, notamment, du réquisitoir

e introductif du 1er mars 1996 et de toutes les pièces subséquentes, a implicitemen...

CASSATION sur le pourvoi formé par :
- la société X..., partie civile,
contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Bordeaux, en date du 14 septembre 1999, qui, dans une information suivie contre Jacqueline Y..., épouse Z..., et Roger Z... du chef de destruction d'un bien par incendie, a prononcé la nullité d'actes de la procédure.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande, en défense et en réplique ;
Sur la recevabilité du pourvoi contestée en défense ;
Attendu que l'arrêt attaqué ayant prononcé l'annulation, notamment, du réquisitoire introductif du 1er mars 1996 et de toutes les pièces subséquentes, a implicitement mais nécessairement admis une exception mettant fin à l'action publique dès lors qu'ensuite de cette décision, la prescription triennale est acquise ; qu'ainsi le pourvoi de la partie civile est recevable en application de l'article 575, alinéa 2, 3°, du Code de procédure pénale ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 60, 77-1, 173, 174, 575, alinéa 2, 3°, et 593 du Code de procédure pénale :
" en ce que l'arrêt attaqué, faisant droit à la requête en nullité d'actes des époux Z..., a prononcé la nullité du rapport de l'expert M... (cote D 4), du procès-verbal de synthèse de l'enquête diligentée (cote D 1) qui s'y réfère, du réquisitoire introductif du 1er mars 1996 (D 16) qui se fonde sur le rapport annulé, et de toutes les pièces et actes de l'information subséquente, mettant par là même fin à la procédure, ainsi que, par l'acquisition de la prescription, à l'action publique ;
" aux motifs que l'expert M..., requis le 13 octobre 1995 en qualité de personne qualifiée pour procéder à des constatations et des examens qui ne pouvaient être différés, a, à son initiative, adressé pour analyse au laboratoire du professeur L... des résidus de combustion qu'il avait lui-même prélevés, et a intégré dans son rapport et dans ses conclusions le résultat desdites analyses, ainsi qu'il ressort de son rapport pages 5 et 8 ; qu'il résulte de l'article 60 du Code de procédure pénale que seul un officier de police judiciaire peut recourir à une personne qualifiée ; que le professeur L..., n'ayant pas été régulièrement requis, n'avait aucune qualité pour procéder à des analyses ni pour déposer un rapport, irrégularité qui constitue une nullité substantielle ; que cette irrégularité affecte le rapport de l'expert M... et toutes les pièces et actes de la procédure qui s'y réfèrent, notamment le réquisitoire introductif dont il constitue le fondement essentiel ;
" alors, d'une part, qu'il résulte du procès-verbal de transport, constatations et de mesures prises (D 2) que c'est M. Ribes, substitut du procureur de la République, qui a ordonné l'analyse du prélèvement, ce qui implique que c'est lui, ou un officier de police judiciaire autorisé par lui, qui a requis le professeur L... inscrit sur la liste des experts de la cour d'appel de Dijon réquisition pouvant être orale et dont l'acceptation ne nécessitait aucune nouvelle prestation de serment, l'expert M...,"avisé de cette décision", s'étant borné à lui adresser, le 14 octobre 1995, le prélèvement à analyser (cf. rapport page 5, paragraphe 3) ; qu'en concluant, néanmoins, à l'irrégularité de la réquisition du professeur L..., prétendument intervenue "à l'initiative de l'expert M... ", et à la nullité du rapport L..., l'arrêt attaqué a violé les textes susvisés ;
" alors, d'autre part, que l'éventuelle nullité du rapport du professeur L..., concluant à la présence possible de l'essence pour auto dans l'échantillon analysé, ne pouvait entraîner la nullité totale du rapport de l'expert M..., qui fonde son soupçon d'incendie volontaire sur l'absence de traces d'effraction, sur l'absence de raison accidentelle évidente, sur la violence du développement du sinistre et l'embrasement généralisé de l'immeuble, sur l'absence de mobilier dans le château (seul l'immeuble étant assuré), sur la découverte d'un foyer indépendant avec des indices de mise à feu suspects, et sur des mesures de vapeurs d'hydrocarbure permettant d'envisager la présence d'une substance inflammable ; que, toutes ces constatations, effectuées antérieurement à l'analyse des prélèvements, étant indépendantes de l'analyse effectuée par le professeur L... et des conclusions de celui-ci, la chambre d'accusation ne pouvait procéder à l'annulation entière du rapport M..., mais devait se borner, après annulation du rapport L..., à ordonner la cancellation des quelques passages du rapport M... se référant au rapport L... ; qu'en prononçant la nullité totale du rapport de l'expert M..., l'arrêt attaqué a donc violé les textes susvisés ;
" alors, de troisième part, que, à supposer nul le rapport M..., cette nullité ne pouvait affecter la validité du procès-verbal de synthèse, qui vise, outre ce rapport et l'analyse L..., treize autres pièces d'enquête préliminaire, révélant notamment que le château acheté pour 920 000 francs avait été assuré pour 10 787 000 francs, que la garantie expirait le 20 octobre 1995, soit 7 jours après le sinistre, et que ce dernier s'était déclaré peu après le départ des propriétaires, éléments d'enquête suffisants pour retenir l'hypothèse d'un acte volontaire ; qu'il y avait donc lieu de maintenir le procès-verbal de synthèse en procédant à la cancellation des références au rapport M... ; qu'en annulant le procès-verbal de synthèse au seul motif qu'il se réfère à ce rapport, la chambre d'accusation a violé les textes susvisés ;
" alors, enfin, que l'annulation d'un acte de l'enquête préliminaire n'entraîne pas celle du réquisitoire introductif, lorsque celui-ci est fondé sur d'autres actes ou pièces de la procédure ; que le réquisitoire introductif (D 16) ne vise pas le rapport M..., mais le procès-verbal de synthèse ; que la nécessité de maintenir cet acte malgré l'éventuelle nullité du rapport M... entraînera celle de maintenir le réquisitoire introductif, la saisine du juge d'instruction étant déterminée par les treize pièces non annulées visées par le procès-verbal de synthèse " ;
Vu l'article 60 du Code de procédure pénale ;
Attendu qu'aux termes de l'article 60, alinéa 1er, du Code de procédure pénale, s'il y a lieu de procéder à des constatations ou à des examens techniques ou scientifiques, l'officier de police judiciaire a recours à toutes personnes qualifiées ;
Que, selon l'article 41, alinéa 2, du même Code, le procureur de la République dirige l'activité des officiers et agents de la police judiciaire dans le ressort de son tribunal ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que, sur instruction d'un substitut du procureur de la République de Périgueux, un officier de police judiciaire de la gendarmerie agissant selon la procédure de délit flagrant, a requis, en application de l'article 60 du Code de procédure pénale, M. M..., expert, en vue d'effectuer les recherches nécessaires pour déterminer l'origine de l'incendie du château de Breuilh appartenant à Jacqueline Z... ; que cet expert a effectué un prélèvement qu'il a adressé aux fins d'analyse à un laboratoire dirigé par le professeur L..., lui-même expert inscrit sur une liste, dont le rapport a été annexé à celui de l'expert M... ;
Attendu que les époux Z..., mis en examen pour destruction d'un bien par incendie, ont saisi la chambre d'accusation, en application de l'article 173 du Code de procédure pénale ;
Que, pour prononcer l'annulation du rapport de l'expert M..., du procès-verbal de synthèse de l'enquête, du réquisitoire introductif et de toute la procédure subséquente, cette juridiction retient que le professeur L... n'ayant pas été régulièrement requis n'avait aucune qualité pour procéder à des analyses ni pour déposer un rapport ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors qu'il ressort des pièces de la procédure que la décision de faire procéder à l'analyse du prélèvement réalisé par l'expert M... a été prise sur instruction donnée à l'officier de police judiciaire par un substitut du procureur de la République, la chambre d'accusation n'a pas justifié sa décision ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le premier moyen proposé :
CASSE ET ANNULE, l'arrêt susvisé de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Bordeaux, en date du 14 septembre 1999 ;
Et pour qu'il soit à nouveau jugé conformément à la loi ;
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre d'accusation de la cour d'appel d'Agen.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 99-86634
Date de la décision : 27/06/2000
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1° CHAMBRE D'ACCUSATION - Arrêts - Arrêt constatant la nullité du réquisitoire introductif - Pourvoi de la partie civile - Recevabilité - Condition.

1° CASSATION - Décisions susceptibles - Chambre d'accusation - Arrêt constatant la nullité du réquisitoire introductif - Pourvoi de la partie civile - Recevabilité - Condition.

1° En application de l'article 575, alinéa 2, 3° du Code de procédure pénale, la partie civile est recevable à se pourvoir contre l'arrêt d'une chambre d'accusation qui annule un réquisitoire introductif dès lors qu'ensuite de cette annulation l'action publique se trouve éteinte par l'effet de la prescription.

2° CHAMBRE D'ACCUSATION - Nullités de l'instruction - Examen de la régularité de la procédure - Annulation d'actes - Acte de l'enquête préliminaire - Recours à une personne qualifiée - Régularité - Condition.

2° CHAMBRE D'ACCUSATION - Pouvoirs - Etendue - Nullités de l'instruction.

2° Selon l'article 41 du Code de procédure pénale, le procureur de la République dirige l'activité des officiers et agents de police judiciaire en vue de la recherche et de la poursuite des infractions à la loi pénale. Par ailleurs, l'article 60 dudit Code n'exige pas qu'une réquisition écrite soit délivrée à la personne qualifiée à laquelle l'officier de police judiciaire peut avoir recours dans une enquête de crime ou de délit flagrant. Dès lors, une chambre d'accusation ne peut annuler le rapport d'un expert désigné en qualité de personne qualifiée par application de l'article 60 du Code de procédure pénale pour rechercher les causes d'un incendie, auquel est annexé le rapport d'un autre expert chargé d'analyser les prélèvements effectués par le premier, sans qu'une réquisition écrite ait été délivrée au second par l'officier de police judiciaire, dès lors qu'il ressort des pièces de la procédure que la décision de faire procéder à ces analyses a été prise sur instruction donnée à l'officier de police judiciaire par un magistrat du Parquet.


Références :

1° :
2° :
Code de procédure pénale 41, 60
Code de procédure pénale 575, al. 2, 3°

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux (chambre d'accusation), 14 septembre 1999


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 27 jui. 2000, pourvoi n°99-86634, Bull. crim. criminel 2000 N° 244 p. 719
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2000 N° 244 p. 719

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Gomez
Avocat général : Avocat général : Mme Fromont.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Joly.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Waquet, Farge et Hazan, M. Choucroy.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2000:99.86634
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