La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

09/02/2000 | FRANCE | N°99-83310

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 09 février 2000, 99-83310


REJET du pourvoi formé par :
- X...,
contre l'arrêt de la cour d'assises des Pyrénées-Atlantiques, en date du 24 mars 1999, qui, pour viols et agressions sexuelles aggravés, l'a condamné à 8 ans d'emprisonnement et à 8 ans d'interdiction des droits civiques, civils et de famille, ainsi que contre l'arrêt du même jour par lequel la Cour a prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 5 et 6.2 de la Convention européenne des droits de l'homme, 148-1, 215, 215-1, 315, 316, 591

et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale, ...

REJET du pourvoi formé par :
- X...,
contre l'arrêt de la cour d'assises des Pyrénées-Atlantiques, en date du 24 mars 1999, qui, pour viols et agressions sexuelles aggravés, l'a condamné à 8 ans d'emprisonnement et à 8 ans d'interdiction des droits civiques, civils et de famille, ainsi que contre l'arrêt du même jour par lequel la Cour a prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 5 et 6.2 de la Convention européenne des droits de l'homme, 148-1, 215, 215-1, 315, 316, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale, du principe de la présomption d'innocence :
" en ce que la cour d'assises, statuant, par arrêt incident du 22 mars 1999, a rejeté la demande de mise en liberté de X... ;
" aux motifs que l'expert a conclu que l'état de santé de l'accusé est compatible avec une incarcération sous réserve d'un suivi médical qui peut être réalisé actuellement à la maison d'arrêt de Pau ; que la mise en détention de l'accusé résulte de l'ordonnance de prise de corps, laquelle est indissociable de l'arrêt de renvoi dûment signifié ; qu'il ressort de la décision de la chambre d'accusation que des risques de pressions sur les témoins et la victime sont à craindre eu égard à l'oralité des débats dont la tenue de ceux-ci doivent se dérouler sur 2 jours, étant précisé que certains témoins n'ont pas été entendus au cours de la procédure ; que, dans ces conditions, la demande de mise en liberté de X... doit être rejetée, les obligations du contrôle judiciaire apparaissant insuffisantes pour éviter de tels risques ;
" alors, d'une part, que le régime de la mise en état, qui contraint l'accusé qui se trouve en liberté à se constituer prisonnier la veille de l'audience de la cour d'assises, porte atteinte au droit de toute personne à la liberté et à la sûreté et au principe de la présomption d'innocence, protégés par les dispositions des articles 5 et 6.2 de la Convention européenne des droits de l'homme ; qu'en rejetant la demande de mise en liberté de X..., placé sous contrôle judiciaire depuis le début de l'information et constitué prisonnier la veille de sa comparution, la cour d'assises a violé les textes susvisés ;
" alors, d'autre part, que, pour rejeter la demande de mise en liberté d'un accusé détenu en exécution de l'ordonnance de prise de corps, la cour d'assises est tenue de constater, en fonction des éléments de l'espèce, que cette mesure serait de nature à nuire au bon déroulement du procès, à la manifestation de la vérité ou à la mise en exécution, en cas de condamnation, de la sanction prononcée ; qu'en l'espèce, en se bornant à invoquer par des motifs vagues un risque de pressions sur les témoins et la victime, sans préciser les circonstances de l'espèce sur lesquelles elle se fondait, la cour d'assises n'a pas satisfait à l'exigence de motivation des arrêts statuant sur un incident contentieux ;
" alors, enfin, que, l'arrêt de mise en accusation du 5 mai 1998 n'ayant pas jugé nécessaire de substituer à la mesure de contrôle judiciaire dont l'accusé faisait l'objet un placement en détention provisoire, il appartenait à la cour d'assises de constater l'existence d'éléments de fait nouveaux depuis cet arrêt conduisant à craindre que la mise en liberté de X... puisse être "de nature à nuire au bon déroulement du procès, à la manifestation de la vérité ou la mise à exécution, en cas de condamnation, de la sanction prononcée" ; qu'en refusant de procéder à ces constatations, et fondant son refus de remise en liberté de l'accusé sur l'arrêt de mise en accusation du 5 mai 1998, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des textes susvisés " ;
Attendu qu'en exécution de l'ordonnance de prise de corps décernée contre lui par l'arrêt de mise en accusation, X... s'est constitué prisonnier la veille de l'audience, ainsi que lui en faisait obligation l'article 215-1, alinéa 1er, du Code de procédure pénale ;
Que cette obligation est conforme aux dispositions de l'article 5.1.c de la Convention européenne des droits de l'homme selon lesquelles une personne peut être privée de sa liberté si elle a été arrêtée ou détenue en vue d'être conduite devant l'autorité judiciaire compétente, lorsqu'il y a des raisons plausibles de soupçonner qu'elle a commis une infraction ;
Attendu que, par ailleurs, en rejetant la demande de mise en liberté au motif de l'existence de risques de pressions sur les témoins dont certains n'avaient pas été précédemment entendus, la Cour a justifié sa décision au regard de nécessités tenant à la manifestation de la vérité et au bon déroulement du procès ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6.1 de la Convention européenne des droits de l'homme, 304, 315, 316, 325, 331 et 591 du Code de procédure pénale :
" en ce que la Cour, par arrêt incident du 23 mars 1999, a refusé de donner acte à la défense qu'un témoin acquis aux débats, qui n'avait pas encore été entendu, s'était entretenu avec trois jurés pendant la suspension d'audience, et n'a pas jugé utile d'ordonner une enquête ;
" aux motifs que la Cour peut légalement refuser de donner acte de faits qui se seraient produits en dehors de sa présence ; qu'il n'apparaît pas utile d'ordonner des investigations à l'effet d'en vérifier l'exactitude ;
" alors, d'une part, que la cour d'assises a le droit et l'obligation de donner acte de faits qui ne se sont pas produits en sa présence, si ces faits sont prouvés par la partie qui en demande acte ; qu'en restreignant son pouvoir de donner acte aux seuls faits qui se sont déroulés en sa présence, la Cour a méconnu sa propre compétence et violé les droits de la défense ;
" alors, d'autre part, que la défense a indiqué, à l'appui de sa demande de donner acte, qu'elle tenait l'information du fait allégué de M. Y..., témoin acquis aux débats, qui avait vu un autre témoin acquis aux débats, M. X..., enquêteur, discuter avec trois jurés dans la salle des pas-perdus quelques minutes avant la reprise de l'audience ; que, dès lors, la Cour devait examiner cet élément de preuve et se prononcer, au vu de cet élément de preuve et de tous autres, sur la réalité du fait dénoncé ; qu'en refusant de le faire, pour un motif de droit erroné, la Cour a derechef méconnu les droits de la défense ;
" alors, enfin, qu'il résulte de l'article 6-1 de la Convention européenne des droits de l'homme que toute juridiction nationale a l'obligation de vérifier si, par sa composition, elle constitue "un tribunal impartial" au sens de cette disposition, lorsque surgit sur ce point une contestation qui apparaît sérieuse ; qu'en refusant d'ordonner une enquête sur le point de savoir si trois jurés avaient communiqué avec un témoin lors d'une suspension des débats, en violation des dispositions de l'article 304 du Code de procédure pénale et de se prononcer sur la force probante des éléments de preuves fournis sur ce fait par la défense, la cour d'assises a méconnu les principes et textes susvisés et les droits de la défense " ;
Attendu qu'il résulte du procès-verbal des débats que les avocats de X... ont déposé des conclusions tendant à obtenir acte de ce qu'un témoin, Benoît X..., enquêteur, avait été vu en train de discuter avec trois jurés, ainsi que le leur avait rapporté un autre témoin déjà entendu ; qu'ils ont sollicité qu'une enquête soit ordonnée ;
Attendu que la Cour a rejeté la demande en énonçant que les faits se seraient produits hors de sa présence et qu'il n'apparaissait pas utile d'ordonner des investigations pour en vérifier l'exactitude ;
Attendu qu'en cet état, les griefs allégués ne sont pas encourus ;
Que, d'une part, les magistrats composant la Cour n'étaient pas en mesure de constater personnellement des faits qui se seraient produits hors de leur présence ;
Que, d'autre part, en rejetant la demande d'enquête, la Cour a usé de son pouvoir souverain d'appréciation et n'a pas méconnu les textes légaux ou conventionnels invoqués, dès lors que les faits allégués ne mettaient pas en cause l'impartialité de la juridiction de jugement ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 349 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que la Cour et le jury ont répondu par l'affirmative aux questions nos 3, 6, 8, 13, 16 et 18 relatives à la circonstance aggravante d'autorité libellées en ces termes : "l'accusé X... avait-il autorité sur Y... comme étant le concubin de la mère de la mineure habitant avec celui-ci ?"
" alors que la question relative à une circonstance aggravante doit en énoncer les éléments constitutifs et se référer à la question sur le fait principal ; qu'en interrogeant la Cour et le jury sur la circonstance d'autorité de l'auteur, sans préciser que cette autorité devait s'exercer à la date des faits spécifiés dans la question principale, le président a méconnu les textes susvisés ; que la déclaration de culpabilité est ainsi privée de tout fondement légal " ;
Attendu que les questions critiquées n'encourent pas le grief allégué, dès lors que chacune d'elles fait suite à une question principale interrogeant la Cour et le jury sur la culpabilité de l'accusé pour des viols et des agressions sexuelles commis à des dates déterminées ;
Qu'ainsi, le moyen ne peut être admis ;
Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des articles 331 ancien du Code pénal, 349 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que la Cour et le jury ont répondu par l'affirmative aux questions suivantes : Question n° 14 : "l'accusé X... est-il coupable d'avoir à Beauzelle, entre le 1er septembre 1987 et le 5 décembre 1989, commis des attentats à la pudeur avec violence, contrainte ou surprise sur Y..." ? Question n° 15 : "Y... était-elle à la date des faits ci-dessus spécifiés âgée de moins de 15 ans pour être née le 6 décembre 1974" ?
" alors que la circonstance de violence, contrainte ou surprise étant une circonstance aggravante du délit d'attentat à la pudeur, prévu et réprimé par l'article 331 ancien du Code pénal, en vigueur au moment des faits de l'espèce, est entachée de complexité la question principale qui comprend cette circonstance ; que, dès lors, la déclaration de culpabilité de X... est nulle" ;
Attendu que, la peine prononcée trouvant son seul support légal dans les réponses affirmatives de la Cour et du jury aux questions régulièrement posées, qui ont déclaré l'accusé coupable de viols aggravés, il n'y a pas lieu d'examiner un moyen relatif à des délits connexes ;
Et attendu qu'aucun moyen n'est produit contre l'arrêt civil, que la procédure est régulière et que la peine a été légalement appliquée aux faits déclarés constants par la Cour et le jury ;
REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 99-83310
Date de la décision : 09/02/2000
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1° COUR D'ASSISES - Procédure antérieure aux débats - Ordonnance de prise de corps - Exécution - Convention européenne des droits de l'homme - Article 5 - paragraphe 1 - c.

1° CONVENTION EUROPEENNE DES DROITS DE L'HOMME - Article 5 - 1 c - Cour d'assises - Ordonnance de prise de corps - Exécution - Compatibilité.

1° L'obligation imposée par l'article 215-1, alinéa 1er, du Code de procédure pénale est conforme aux dispositions de l'article 5.1.c de la Convention européenne des droits de l'homme selon lesquelles une personne peut être privée de sa liberté si elle a été arrêtée ou détenue en vue d'être conduite devant l'autorité judiciaire compétente, lorsqu'il y a des raisons plausibles de soupçonner qu'elle a commis une infraction.

2° COUR D'ASSISES - Détention provisoire - Demande de mise en liberté - Demande présentée au cours du procès - Rejet - Critères.

2° DETENTION PROVISOIRE - Demande de mise en liberté - Cour d'assises - Demande présentée au cours du procès - Rejet - Critères.

2° Pour apprécier la possibilité de faire droit à une demande de mise en liberté présentée par un accusé au cours des débats, la cour d'assises n'est pas tenue de se prononcer en considération des critères fixés par l'article 144 du Code de procédure pénale mais doit, notamment, rechercher si, en fonction des éléments de l'espèce, une telle mesure n'est pas de nature à nuire au bon déroulement du procès, à la manifestation de la vérité ou à la mise à exécution, en cas de condamnation, de la sanction prononcée(1).

3° COUR D'ASSISES - Arrêts - Arrêt incident - Arrêt statuant sur une demande de donné acte - Obligation de se prononcer sur la réalité des faits allégués - Faits ne s'étant pas produits à l'audience.

3° COUR D'ASSISES - Compétences respectives du président - de la Cour - de la Cour et du jury - Cour - Donné acte - Réalité des faits allégués - Faits ne s'étant pas produits à l'audience - Effet.

3° C'est à bon droit que la Cour refuse de donner acte de faits qui se seraient produits hors de l'audience, qu'elle n'a pas été en mesure de constater et qui, tels qu'ils sont allégués, ne mettent pas en cause l'impartialité de la cour d'assises, et c'est en usant de son pouvoir souverain d'appréciation qu'elle rejette, par décision motivée, la demande d'enquête sollicitée (2).


Références :

1° :
1° :
3° :
Code de procédure pénale 144
Code de procédure pénale 215-1 2° :
Code de procédure pénale 349
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 5.1.c

Décision attaquée : Cour d'assises des Pyrénées-Atlantiques, 24 mars 1999

CONFER : (2°). (1) Cf. Chambre criminelle, 1998-03-31, Bulletin criminel 1998, n° 120, p. 321 (rejet)

arrêt cité ;

Chambre criminelle, 1998-09-24, Bulletin criminel 1998, n° 234 (1°), p. 672 (rejet)

arrêt cité. CONFER : (3°). (2) Cf. Chambre criminelle, 1996-10-09, Bulletin criminel 1996, n° 354, p. 1046 (rejet)

arrêt cité.


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 09 fév. 2000, pourvoi n°99-83310, Bull. crim. criminel 2000 N° 63 p. 169
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2000 N° 63 p. 169

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Gomez
Avocat général : Avocat général : Mme Fromont.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Farge.
Avocat(s) : Avocat : la SCP Waquet, Farge et Hazan.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2000:99.83310
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award