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08/02/2000 | FRANCE | N°98-82373;99-81218

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 08 février 2000, 98-82373 et suivant


IRRECEVABILITE et REJET des pourvois formés par :
- Y... Jean-Jacques,
contre :
1. Le jugement du tribunal de police de Bordeaux, en date du 13 octobre 1997, qui, dans les poursuites exercées contre lui pour dépassement de la durée du travail dans une entreprise de transport routier, a rejeté l'exception de nullité de la citation ;
2. Contre l'arrêt de la cour d'appel de Bordeaux, chambre correctionnelle, en date du 12 janvier 1999, qui l'a condamné, pour dépassement de la durée maximale de travail dans les transports routiers, à 11 amendes de 3 000 francs chacune. r>LA COUR,
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu le mémo...

IRRECEVABILITE et REJET des pourvois formés par :
- Y... Jean-Jacques,
contre :
1. Le jugement du tribunal de police de Bordeaux, en date du 13 octobre 1997, qui, dans les poursuites exercées contre lui pour dépassement de la durée du travail dans une entreprise de transport routier, a rejeté l'exception de nullité de la citation ;
2. Contre l'arrêt de la cour d'appel de Bordeaux, chambre correctionnelle, en date du 12 janvier 1999, qui l'a condamné, pour dépassement de la durée maximale de travail dans les transports routiers, à 11 amendes de 3 000 francs chacune.
LA COUR,
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu le mémoire produit ;
I. Sur le pourvoi formé contre le jugement du 13 octobre 1997 :
Sur la recevabilité du pourvoi :
Attendu qu'aux termes de l'article 546 du Code de procédure pénale, la faculté d'appeler appartient au prévenu, à la personne civilement responsable, au procureur de la République et à l'officier du ministère public près le tribunal de police notamment lorsque la peine encourue est celle prévue pour les contraventions de cinquième classe ;
Que, pour l'application de cette disposition lorsque le tribunal est saisi de plusieurs contraventions lui permettant de prononcer plusieurs amendes, il y a lieu de totaliser les amendes encourues en vue de déterminer si le jugement est susceptible d'appel ;
Attendu que Jean-Jacques Y... a été poursuivi pour dépassement de la durée maximale de travail dans les transports routiers, à raison de onze salariés, faits punis de contravention de 4e classe, par l'article R. 261-3 du Code du travail ; que le tribunal, par jugement frappé de pourvoi, a rejeté l'exception de nullité de la citation ;
Que cependant, le jugement attaqué étant susceptible d'appel, par application de l'article 546 précité, ce jugement ne pouvait être déféré à la Cour de Cassation ;
Qu'il n'importe que ledit jugement ait déclaré à tort être rendu en dernier ressort, dès lors qu'à la demande du prévenu, la cour d'appel avait examiné son bien-fondé ;
D'où il suit que le pourvoi doit être déclaré irrecevable ;
II. Sur le pourvoi formé contre l'arrêt du 12 janvier 1999 :
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 551, 565, 593 du Code de procédure pénale, 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale :
" en ce que le jugement du 13 octobre 1997 et l'arrêt du 12 janvier 1999 ont rejeté l'exception de nullité de la citation soulevée par Jean-Jacques Y... ;
" aux motifs que selon l'article 565 du Code de procédure pénale, la nullité ne peut être prononcée que lorsqu'elle a eu pour effet de porter atteinte aux intérêts de la personne concernée ; que l'article L. 212-1 du Code du travail fixe à 10 heures la durée quotidienne maximale de travail effectif ; que la possibilité de dérogation par décret est prévue par le 2e alinéa de cet article ainsi que par l'article L. 212-2, l'article R. 261-3 prévoyant pour sa part que les infractions à ces dispositions sont réprimées par des contraventions de 4e classe ; que le décret du 26 janvier 1983, relatif à la durée du travail dans les entreprises de transport routier, prévoit en son article 7 la possibilité de porter à 12 heures une fois par semaine, et exceptionnellement deux fois par semaine, la durée quotidienne de travail effectif ; qu'il y a lieu de rappeler que ce décret a été pris en application des articles L. 212-1 et 2 du Code du travail ; que les infractions poursuivies le sont sur la base de ce décret puisqu'elles ne concernent que les dépassements supérieurs à 12 heures, et non à 10 heures, de la durée quotidienne de travail effectif ; qu'au surplus le prévenu a reçu un exemplaire complet du procès-verbal dressé le 5 juin 1996, et que ce procès-verbal explique de manière claire et précise quels sont les textes d'incrimination et de répression ; que, dans ces conditions, le prévenu n'a pas pu avoir de doute sur l'objet et la portée de la citation ; qu'en tout état de cause, il n'y a pas eu d'atteinte aux intérêts de la défense dès lors que les textes visés sont exacts, qu'ils sont seulement incomplets en ce qui concerne l'incrimination, mais que la poursuite est effectuée sur la base du décret d'application, dont les dispositions dérogatoires sont plus favorables au prévenu que le texte général visé dans la citation ;
" alors que la citation doit, à peine de nullité, énoncer, de manière détaillée, la nature et la cause de la prévention retenue ainsi que les articles de la loi définissant l'incrimination pour permettre au prévenu d'organiser utilement sa défense ; qu'en affirmant, pour rejeter l'exception de nullité de la citation litigieuse, qu'il n'y avait pas eu d'atteinte aux intérêts de la défense tout en constatant que cette citation était incomplète quant à la définition de l'infraction poursuivie faute de viser le décret du 26 janvier 1983 qui fixe la durée maximale de travail journalier dans les entreprises de transport routier, ce dont il résultait que Jean-Jacques Y... n'avait pas été précisément informé de la prévention dont il était l'objet ni mis en mesure de préparer utilement sa défense laquelle supposait, notamment, qu'il ait pu vérifier la légalité de ce texte réglementaire qui servait de base aux poursuites, le tribunal de police et la cour d'appel ont violé les textes précités " ;
Attendu que, pour rejeter l'exception de nullité de la citation présentée par le prévenu, la cour d'appel relève à bon droit que si le décret du 26 janvier 1983 pris en application des textes généraux d'incrimination ne figure pas dans ladite citation, celle-ci vise les articles L. 212-1 et L. 212-2 du Code du travail, qui définissent l'infraction poursuivie, ainsi que le texte de loi qui la réprime ; qu'elle ajoute que l'intéressé a reçu un exemplaire complet du procès-verbal qui vise tous les textes d'incrimination et de répression, et qu'ainsi aucune atteinte n'a été portée aux droits de la défense ;
Que le moyen ne peut, dès lors, être accueilli ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 3 bis de l'ordonnance n° 58-1310 du 23 décembre 1958, 15 du règlement CEE n° 3820-85 du 20 décembre 1985, 121-1 du Code pénal, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Jean-Jacques Y... coupable d'avoir dépassé à 11 reprises la durée maximale de travail journalier ;
" aux motifs qu'en sa qualité de chef d'entreprise, Jean-Jacques Y... avait l'obligation d'informer ses salariés du contenu de la réglementation en vigueur, de leur donner les instructions nécessaires aux fins de la respecter et de s'assurer de la stricte et constante exécution, par les intéressés, de ladite réglementation, édictée dans le but de garantir la sécurité des travailleurs ; or, non seulement le prévenu ne rapporte pas la preuve d'avoir accompli ces diligences, mais la multiplicité des infractions retenues à son encontre démontre au contraire que le non-respect de la réglementation sociale en vigueur constituait pour lui un mode habituel de gestion de son entreprise ; que Jean-Jacques Y... doit en conséquence être déclaré coupable des 11 infractions matériellement commises par ses préposés, étant observé qu'il convient de préciser que les infractions ont eu lieu courant avril 1996 et non le 5 juin 1996 ;
" alors que, dans le cadre d'une poursuite exercée contre le dirigeant d'une entreprise de transport à qui il est reproché d'avoir laissé contrevenir par ses préposés aux règles concernant la durée du travail en ne prenant pas les dispositions de nature à en assurer le respect, il appartient au ministère public de prouver non seulement que les salariés ont dépassé la durée maximale du travail, condition préalable de l'infraction reprochée au chef d'entreprise, mais encore la faute d'abstention commise par ce dernier et qui serait à l'origine de l'infraction commise par les préposés ; que, dès lors, en déduisant la culpabilité de Jean-Jacques Y... de ce que celui-ci ne rapportait pas la preuve qu'il avait accompli les diligences qui lui incombait aux fins de faire respecter par ses préposés la réglementation en vigueur, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé les textes précités ;
" et alors, en tout état de cause, que Jean-Jacques Y... faisait valoir, dans ses conclusions d'appel, qu'il avait rempli son obligation de faire respecter par ses préposés la réglementation des conditions de travail dans les transports routiers, dès lors qu'il versait aux débats les documents par lesquels il avait informé les salariés du contenu de cette réglementation, avait vérifié le respect des instructions données en confiant au laboratoire ATRA Consultant, dans le cadre d'un accord du 23 novembre 1994, le soin de procéder à une étude systématique des disques de chronotachygraphe et en sanctionnant par des mises en garde les conducteurs qui méconnaissent les instructions données ; qu'en se bornant à affirmer, pour déclarer Jean-Jacques Y... coupable d'avoir laissé dépasser, par ses préposés, à 11 reprises, la durée maximale de travail journalier effectif, qu'il n'établissait pas avoir accompli l'obligation qui lui incombait de prendre les mesures de nature à assurer le respect de la réglementation en vigueur, sans s'expliquer sur les diligences précédemment rappelées qui établissaient pourtant qu'il avait pris soin de s'assurer du respect de la durée maximale du travail dans son entreprise, la cour d'appel a entaché sa décision d'une insuffisance de motifs " ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 132-7 du Code pénal, R. 261-3 du Code du travail, contradiction de motifs, excès de pouvoir :
" en ce que l'arrêt attaqué a condamné Jean-Jacques Y... à 11 amendes de 3 000 francs ;
" aux motifs que Jean-Jacques Y... doit être déclaré coupable des 11 dépassements de la durée maximale de travail journalier commis par les conducteurs, J.- C. Z...(9 dépassements), Pierre X... (1 dépassement) et Salvador A... (1 dépassement), dès lors qu'il n'établit pas avoir respecté l'obligation qui pesait sur lui en sa qualité de chef d'entreprise d'informer ses salariés du contenu de la réglementation en vigueur, de leur donner les instructions nécessaires aux fins de la respecter et de s'assurer de la stricte et constante exécution, par les intéressés, de ladite réglementation ;
" alors que le nombre d'amendes encourues par l'exploitant d'une entreprise de transport reconnu coupable d'avoir laissé dépasser la durée maximale de travail journalier effectif est fonction du nombre de chauffeurs ayant dépassé cette durée et non du nombre de dépassements constatés ; qu'en condamnant Jean-Jacques Y... à 11 amendes tout en constatant que les 11 dépassements de la durée quotidienne maximale de travail avaient été commis par trois conducteurs, la cour d'appel a méconnu le principe susénoncé " ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que, pour condamner Jean-Jacques Y... à 11 amendes, les juges, après avoir caractérisé autant de dépassements de la durée journalière de travail effectif commis par trois conducteurs de l'entreprise qu'il dirige, relèvent qu'en sa qualité de chef d'entreprise, ce dernier ne rapporte pas la preuve d'avoir informé ses salariés du contenu de la réglementation, de leur avoir donné les instructions nécessaires aux fins de la respecter et de s'être assuré de sa constante application ;
Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que les moyens ne peuvent être accueillis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
Par ces motifs :
I. Sur le pourvoi contre le jugement du 13 novembre 1997 :
Le DECLARE IRRECEVABLE ;
II. Sur le pourvoi formé contre l'arrêt du 12 janvier 1999 :
Le REJETTE.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 98-82373;99-81218
Date de la décision : 08/02/2000
Sens de l'arrêt : Irrecevabilité et rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

CASSATION - Décisions susceptibles - Juridictions de jugement - Tribunal de police - Décision non susceptible d'appel - Définition.

APPEL CORRECTIONNEL OU DE POLICE - Appel de police - Décisions susceptibles - Peine encourue - Pluralité de contraventions - Amendes totalisées

TRIBUNAL DE POLICE - Appel - Décisions susceptibles - Peine encourue - Pluralité de contraventions - Amendes totalisées

Il résulte de l'article 546 du Code de procédure pénale que lorsque plusieurs amendes sont encourues il y a lieu de les totaliser pour savoir si le jugement est susceptible d'appel ; le pourvoi contre un jugement susceptible d'appel en raison de cette totalisation n'est pas recevable si le demandeur n'a pas usé de la voie de l'appel. (1).


Références :

Code de procédure pénale 546

Décision attaquée : Tribunal de police, 1997-10-13 et cour d'appel de Bordeaux (chambre correctionnelle), 1999-01-12

CONFER : (1°). (1) A rapprocher : Chambre criminelle, 1991-04-11, Bulletin criminel 1991, n° 174 (2°), p. 445 (irrecevabilité)

arrêt cité.


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 08 fév. 2000, pourvoi n°98-82373;99-81218, Bull. crim. criminel 2000 N° 57 p. 154
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2000 N° 57 p. 154

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Gomez
Avocat général : Avocat général : Mme Fromont.
Rapporteur ?: Rapporteur : Mme Karsenty.
Avocat(s) : Avocat : la SCP Guiguet, Bachellier et de la Varde.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2000:98.82373
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