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30/11/1999 | FRANCE | N°98-82729

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 30 novembre 1999, 98-82729


REJET du pourvoi formé par :
- le comité d'entreprise de la SA Vittel, venant aux droits du comité central d'entreprise de la SA Vittel, le comité d'entreprise de Pierval, venant aux droits du comité d'établissement de Pierval, le syndicat CFDT de l'alimentation et des eaux minérales de Vittel, le syndicat CGT de Vittel SA, parties civiles,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Metz, chambre correctionnelle, en date du 10 janvier 1997, qui, sur renvoi après cassation, dans les poursuites exercées contre Alain X..., Jean Y..., Serge C..., Helmut B..., Jean-Pierre A... et Dominiq

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REJET du pourvoi formé par :
- le comité d'entreprise de la SA Vittel, venant aux droits du comité central d'entreprise de la SA Vittel, le comité d'entreprise de Pierval, venant aux droits du comité d'établissement de Pierval, le syndicat CFDT de l'alimentation et des eaux minérales de Vittel, le syndicat CGT de Vittel SA, parties civiles,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Metz, chambre correctionnelle, en date du 10 janvier 1997, qui, sur renvoi après cassation, dans les poursuites exercées contre Alain X..., Jean Y..., Serge C..., Helmut B..., Jean-Pierre A... et Dominique Z... pour entrave au fonctionnement régulier du comité d'entreprise, après relaxe des prévenus, a prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande, en défense et en réplique ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles L. 431-5, L. 432-1, L. 435-3 et L. 483-1 du Code du travail, de l'article 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a débouté le comité central d'entreprise de la société Vittel, le comité d'établissement de Pierval, le syndicat CFDT de l'alimentation et des eaux minérales de Vittel et le syndicat CGT de Vittel de leur demande tenant à la réparation du préjudice que leur avait causé le défaut d'information et de consultation du comité central d'entreprise de la société Vittel et du comité d'établissement Pierval préalables aux décisions préparant la cession de l'établissement et de la marque Pierval ;
" aux motifs qu'il résulte de la procédure que, le 25 février 1992, la société Nestlé, actionnaire majoritaire de la société Vittel, a notifié, comme le lui impose la réglementation européenne, à la Commission des Communautés européennes une offre publique d'achat portant sur les actions de la société Source Perrier ; que la Commission, afin d'assurer la libre concurrence, a exigé, pour agréer l'opération de rachat de Perrier, que la société Nestlé cède à un tiers concurrent une partie de son actif, dont la source Pierval ; que Nestlé ayant accepté, la Commission, le 22 juillet 1992, a décidé, en formulant des réserves, que l'opération de concentration était compatible avec le Marché commun ; que le 18 février 1993, la société Nestlé et le groupe Castel ont conclu un accord prévoyant la cession au groupe Castel de l'exploitation de diverses sources, dont celle de Pierval ; que les demandeurs soutiennent que tant la décision de la Commission du 22 juillet 1992 que l'accord du 18 février 1993 entre Nestlé et le groupe Castel constituent chacun un accord ferme et définitif, irrévocable, qui aurait nécessité préalablement l'information et la consultation des comités d'entreprise, ce qui n'a pas été le cas ; qu'ils ajoutent que, s'agissant d'une opération complexe, l'information et la consultation des comités d'entreprise devaient se faire régulièrement, préalablement à chacune des décisions échelonnées, pendant toute la durée de l'opération de concentration ; que, par sa décision du 22 juillet 1992, la Commission de Bruxelles a déclaré compatible avec les règles du Marché commun l'opération de concentration en question sous réserve de la réalisation de toutes les conditions et obligations contenues dans l'engagement pris par Nestlé ; que si ce dernier stipulait que Nestlé s'engageait à vendre la source Pierval, il n'en reste pas moins que la cession litigieuse, à cette date, n'était pas définitive dans la mesure où l'acquéreur était encore inconnu et que la Commission se réservait de donner son agrément à l'acheteur, lequel devait remplir certaines conditions, comme celle de posséder des ressources financières et une expérience suffisantes ; qu'en outre, aucun prix de cession n'était prévu dans cette décision communautaire qui, ainsi, se révélait être un simple projet puisque subordonnée à des réserves ; que, d'ailleurs, Nestlé avait, au regard des termes de cette décision, encore à cette date, le choix de donner suite ou non à son offre publique d'achat sur les actions de Perrier ; qu'il résulte de la procédure que le comité central d'entreprise a été réuni à l'initiative d'Alain X..., alors directeur général de la société Vittel, le 24 juillet 1992, avec pour objet "l'information du comité central d'entreprise sur un projet de cession d'actif extérieur au site de Vittel" ; que le compte rendu de cette réunion relève que le président a informé les membres du comité central d'entreprise que la Commission des Communautés européennes avait, le 22 juillet 1992, donné son accord à l'acquisition de Perrier par Nestlé sous réserve de conditions qui ont été acceptées par Nestlé, à savoir, notamment, l'obligation de vendre quatre sources, dont Pierval ;
que l'accord entre Nestlé et le groupe Castel du 18 février 1993 ne pouvait, à cette date, être considéré comme définitif puisque, d'une part, ce n'est que le 10 juin 1993 que la Commission, par courrier de l'un de ses membres, a confirmé l'agrément donné à l'acquéreur comme cela était prévu au considérant 136 de la décision du 22 juillet 1992, d'autre part, l'assemblée générale extraordinaire de la société Vittel, seule compétente pour décider la cession d'un actif social, n'avait encore pris aucune décision formelle à ce sujet ; que le 26 février 1993, le comité central d'entreprise a été de nouveau réuni afin "d'être consulté sur le projet de cession de la source Pierval suite à la décision de la Commission des Communautés européennes du 22 juillet 1992" ; qu'aux termes mêmes de l'ordre du jour de cette réunion, la cession de la source Pierval n'était pas effectivement acquise de façon irréversible puisqu'il s'agissait d'un projet nécessaire au respect des conditions formulées par la décision du 22 juillet 1992 de la Commission ; que, d'ailleurs, lors d'une autre réunion du comité central d'entreprise de Vittel, en date du 8 mars 1993, portant sur la "cession des sources suite à la décision de la Commission des Communautés européennes", le président a précisé que la cession de Pierval était jusqu'à ce jour "au stade de l'étude" et que, désormais, il s'agissait "d'un projet maintenant arrêté" ; qu'il est relevé que les termes employés dans ce compte rendu font tous référence à la future cession et ne considèrent pas cette dernière comme définitivement acquise au jour de la réunion ; que la décision définitive, irrévocable, de céder la source Pierval au groupe Castel a été prise par les organes compétents de la société Vittel, à savoir l'assemblée générale extraordinaire, le 28 mai 1993 ; qu'ainsi, il apparaît que les organes représentatifs du personnel ont été régulièrement informés et consultés antérieurement à la cession de Pierval, dès le 24 juillet 1992, puis en février et mars 1993, laquelle est devenue définitive au regard de la loi française le 28 mai 1993, et le 10 juin 1993 au regard du droit communautaire ;
" alors que, lorsqu'une mesure concernant l'organisation, la gestion et la marche générale de l'entreprise s'inscrit dans une procédure complexe comportant des décisions échelonnées, le comité d'entreprise doit être consulté à l'occasion de chacune d'elles ; qu'en l'espèce, il résulte des constatations de l'arrêt attaqué qu'avant toute information et consultation des institutions représentatives du personnel, la société Nestlé s'était engagée devant la Commission des Communautés européennes à vendre la source Pierval, le 22 juillet 1992, et qu'elle avait conclu avec le groupe Castel un accord prévoyant la cession à ce groupe de l'exploitation de diverses sources dont celle de Pierval, le 18 février 1993 ; que ces engagements, tant devant la Commission des Communautés européennes qu'à l'égard du groupe Castel, constituaient des décisions irréversibles dans le cadre de la procédure engagée de cession et d'offre publique d'achat, peu important qu'elles dussent être complétées dans les phases ultérieures de cette procédure, et devaient donner lieu à la consultation des instances représentatives du personnel ; qu'en décidant autrement, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des textes susvisés " ;
Attendu que, pour débouter les parties civiles de leurs demandes, la cour d'appel retient que le directeur général de la société Vittel a réuni, le 24 juillet 1992, le comité central d'entreprise, pour l'informer d'un projet de cession d'actifs extérieurs au site de Vittel ; qu'elle énonce que selon le compte rendu de cette réunion, cette information a porté sur l'accord donné par la Commission des Communautés européennes à l'acquisition de Perrier par Nestlé sous réserve de conditions qui ont été acceptées par cette dernière, à savoir notamment l'obligation de vendre quatre sources dont Pierval ;
Que les juges précisent que l'accord du 18 février 1993 entre Nestlé et le groupe Castel, qui s'est porté acquéreur, ne pouvait être considéré comme définitif, puisque ce n'est que postérieurement que la Commission a confirmé l'agrément donné à cette opération ; qu'elle ajoute que les réunions ultérieures avec les organes représentatifs du personnel des 26 février et 8 mars 1993 portaient, ainsi qu'il résulte de leurs comptes rendus, sur ce projet encore au stade de l'étude, et qui n'a été accepté que le 28 mai 1993, lors de la réunion de l'assemblée générale extraordinaire ; qu'elle en conclut que les organes représentatifs du personnel ont été régulièrement informés et consultés avant la cession de Pierval ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, la cour d'appel a justifié sa décision ;
Que le moyen ne peut, dès lors, qu'être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 98-82729
Date de la décision : 30/11/1999
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

TRAVAIL - Comité d'entreprise - Délit d'entrave - Eléments constitutifs - Elément matériel - Défaut de consultation - Décision préalable de la Commission des Communautés européennes.

Justifie sa décision déboutant les parties civiles de leurs demandes, dans les poursuites exercées contre les dirigeants d'une société pour entrave au fonctionnement régulier du comité d'entreprise, une cour d'appel qui retient que le comité d'entreprise a été régulièrement consulté sur un projet de cession d'actifs ayant fait l'objet d'un accord donné sous certaines conditions par la Commission des Communautés européennes. .


Références :

Code du travail L431-5, L432-1, L435-3, L483-1

Décision attaquée : Cour d'appel de Metz (chambre correctionnelle), 10 janvier 1997


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 30 nov. 1999, pourvoi n°98-82729, Bull. crim. criminel 1999 N° 283 p. 876
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1999 N° 283 p. 876

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Gomez
Avocat général : Avocat général : Mme Commaret.
Rapporteur ?: Rapporteur : Mme Karsenty.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Célice, Blancpain et Soltner, la SCP Masse-Dessen, Georges et Thouvenin.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1999:98.82729
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