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26/10/1999 | FRANCE | N°97-45457

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 26 octobre 1999, 97-45457


Sur le moyen unique :

Attendu que M. X..., engagé le 1er septembre 1988 en qualité d'ouvrier conducteur sur machine à imprimer par la société Silvallac, domiciliée à Wittenheim, a été en arrêt de travail pour maladie du 6 février 1995 au 12 février 1995 ; que l'employeur ayant décompté un délai de carence de trois jours sur son salaire, le salarié a saisi la juridiction prud'homale de demandes en maintien du salaire par application de l'article 616 du Code civil local et en paiement de dommages-intérêts ;

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt attaqué (

Colmar, 29 septembre 1997) de l'avoir condamné à payer au salarié une somme à ti...

Sur le moyen unique :

Attendu que M. X..., engagé le 1er septembre 1988 en qualité d'ouvrier conducteur sur machine à imprimer par la société Silvallac, domiciliée à Wittenheim, a été en arrêt de travail pour maladie du 6 février 1995 au 12 février 1995 ; que l'employeur ayant décompté un délai de carence de trois jours sur son salaire, le salarié a saisi la juridiction prud'homale de demandes en maintien du salaire par application de l'article 616 du Code civil local et en paiement de dommages-intérêts ;

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt attaqué (Colmar, 29 septembre 1997) de l'avoir condamné à payer au salarié une somme à titre de rappel de salaire pour le mois de février 1995, alors, selon le moyen, de première part, que l'employeur peut toujours déroger, par un accord atypique, aux lois et règlements en vigueur dès lors que cet accord contient des dispositions plus favorables que celles des textes légaux et réglementaires ; qu'en l'espèce l'engagement pris par la société Silvallac d'appliquer, en cas d'absence du salarié, un délai de carence pour le paiement de la rémunération est conforme à l'article 616 du Code civil local qui fait dépendre le maintien de la rémunération de la répercussion qu'a pu avoir l'absence du salarié sur la vie de l'entreprise dès lors que l'application de ce délai de carence est uniquement fonction du taux d'absentéisme dans l'entreprise ; que cet engagement de l'employeur est même globalement plus favorable aux salariés puisqu'il prévoit, au contraire de l'article 616 du Code civil local, le paiement du salaire pour la partie de l'absence supérieure à trois jours même si cette absence a des conséquences sur la bonne marche de l'entreprise ; qu'ainsi en retenant que l'application d'un délai de carence de trois jours par la société Silvallac est contraire aux dispositions d'ordre public de l'article 616 du Code civil local applicable en Alsace-Moselle, la cour d'appel a violé ledit article 616 du Code civil local ainsi que l'article 1134 du Code civil ; de deuxième part, que l'application d'un délai de carence par la société Silvallac en cas d'absence du salarié étant uniquement fonction du taux d'absentéisme dans l'entreprise, la nature de cette absence est indifférente ; que l'application de ce délai de carence qui vise indistinctement tous les salariés absents ne saurait donc aboutir à sanctionner une faute ou une absence de faute du salarié de sorte qu'il ne peut y avoir une quelconque discrimination entre les salariés en fonction de la nature de leur absence ; qu'en outre cette mesure visant des salariés qui, du fait de leur absence, ne fournissent aucune activité ouvrant droit à rémunération, la retenue sur le salaire ne peut s'analyser en une sanction pécuniaire illicite ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé derechef l'article 616 du Code civil local ainsi que l'article 1134 du Code civil ; de troisième part, que dans ses écritures d'appel, M. X... ne contestait nullement que son absence d'une semaine au cours du mois de février 1995 avait provoqué une désorganisation de l'entreprise et, en particulier, des pertes de commandes et des retards importants de livraisons ; qu'il se contentait de reprocher à la société Silvallac son imprévoyance en ce qui concerne le remplacement des salariés à des postes vitaux ; qu'ainsi en retenant que la société Silvallac ne rapportait aucune preuve concernant les pertes de commandes et les retards importants de livraisons qu'elle alléguait, la cour d'appel a dénaturé les termes du litige et violé les articles 4 et 5 du nouveau Code de procédure civile ; de quatrième part, que pour apprécier si l'absence d'un salarié constitue, notamment au regard des répercussions sur la marche de l'entreprise, un temps relativement sans importance pour lequel le salarié doit conserver son droit à rémunération, le juge prud'homal doit se placer à l'époque de cette absence ;

qu'en l'espèce pour apprécier les répercussions sur la bonne marche de la société Silvallac de l'absence de M. X... pendant une semaine, du 6 au 12 février 1995, la cour d'appel a retenu que l'effectif au dernier jour du mois de février était de 125 salariés et qu'un certain nombre d'heures d'absence étaient programmé ; qu'en se plaçant ainsi à une date postérieure à l'absence de M. X... pour apprécier les répercussions qu'avait pu avoir une telle absence sur le fonctionnement de l'entreprise, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 616 du Code civil local ; de cinquième part, que pour l'application de l'article 616 du Code civil local applicable en Alsace-Moselle, la durée de l'absence, et donc la condition liant le droit à maintien de rémunération aux absences d'un temps relativement sans importance, doit être appréciée à chaque arrêt de travail sans faire une appréciation globale de l'absentéisme du salarié ; qu'en retenant que M. X... n'avait eu aucune autre absence pour maladie entre les mois de janvier et de septembre 1995, la cour d'appel s'est livrée à une appréciation globale de l'absentéisme du salarié et a violé l'article 616 du Code civil local ; de sixième part, que le juge prud'homal ne saurait prétendre substituer son appréciation à celle de l'employeur ; que pour dire que l'absence de M. X... pendant une semaine s'analysait en un temps relativement sans importance, la cour d'appel a retenu que la spécialisation de M. X..., conducteur de machine à imprimer, aurait dû conduire l'employeur à envisager l'absence impromptue du salarié ; qu'en se substituant ainsi à l'employeur pour déterminer l'attitude que celui-ci aurait dû avoir pour pallier l'absence d'un salarié, la cour d'appel a violé l'article 616 du Code civil local ;

Mais attendu, d'abord, qu'aux termes de l'article 616 du Code civil local, l'obligé à la prestation de services ne perd pas sa prétention à la rémunération par le fait qu'il aurait été empêché d'effectuer la prestation de services pour une cause qui lui était personnelle, sans sa faute, pendant un temps relativement sans importance ; que s'il est possible pour l'employeur de déroger, par engagement unilatéral, aux dispositions précitées, la dérogation ne peut pas, en vertu du principe fondamental du droit du travail énoncé dans l'article L. 132-4 du Code du travail, être opposée au salarié si elle est moins favorable à ce dernier ; qu'ayant fait ressortir, en ce qui concerne les absences pour maladie de courte durée, que les dispositions de l'engagement unilatéral prises par l'employeur étaient, dans la situation particulière du salarié, moins favorables que celles de l'article 616 du Code civil local qui exclut tout délai de carence dans le versement de la garantie de salaire, la cour d'appel, abstraction faite d'un motif surabondant, critiqué par la deuxième branche du moyen, a exactement décidé que seul ce texte devait être appliqué ;

Attendu, ensuite, que pour le surplus, le moyen, sous couvert des griefs non fondés de défaut de base légale et de violation de la loi, ne tend qu'à remettre en discussion devant la Cour de Cassation les éléments de fait et de preuve souverainement appréciés par les juges du fond qui ont constaté que la durée de l'absence du salarié avait constitué un temps relativement sans importance ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé dans aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 97-45457
Date de la décision : 26/10/1999
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

ALSACE-LORRAINE - Code civil local - Article 616 - Domaine d'application - Engagement unilatéral de l'employeur - Caractère moins favorable - Portée .

CONTRAT DE TRAVAIL, EXECUTION - Employeur - Pouvoir de direction - Engagement unilatéral - Dispositions moins favorables que celles de l'article 616 du Code civil local - Portée

ALSACE-LORRAINE - Contrat de travail - Salaire - Maladie du salarié - Article 616 du Code civil local - Engagement unilatéral de l'employeur - Caractère moins favorable - Portée

Aux termes de l'article 616 du Code civil local, l'obligé à la prestation de services ne perd pas sa prétention à la rémunération par le fait qu'il aurait été empêché d'effectuer la prestation de services pour une cause qui lui était personnelle, sans sa faute, pendant un temps relativement sans importance. S'il est possible pour l'employeur de déroger, par engagement unilatéral, à ces dispositions, la dérogation ne peut pas, en vertu du principe fondamental du droit du travail énoncé dans l'article L. 132-4 du Code du travail, être opposée au salarié si elle est moins favorable à ce dernier.


Références :

Code civil local 616
Code du travail L132-4

Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar, 29 septembre 1997

A RAPPROCHER : Chambre sociale, 1994-10-11, Bulletin 1994, V, n° 265, p. 179 (rejet) et les arrêts cités.


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 26 oct. 1999, pourvoi n°97-45457, Bull. civ. 1999 V N° 398 p. 292
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1999 V N° 398 p. 292

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Gélineau-Larrivet .
Avocat général : Avocat général : M. Lyon-Caen.
Rapporteur ?: Rapporteur : Mme Bourgeot.
Avocat(s) : Avocat : la SCP Gatineau.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1999:97.45457
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