Met, sur sa demande, le cabinet Lecurieux-Belfond hors de cause sur le premier moyen ;
Attendu que M. X..., notaire, a établi, le 29 janvier 1988, en réitération d'un acte sous seing privé signé le 25 novembre 1987, un acte portant vente d'un fonds de commerce appartenant à la société Pierre, à M. Gauthier et à son épouse, Mme Auger, aujourd'hui divorcés ; que cette vente ayant été ultérieurement annulée, par un arrêt du 4 avril 1991, à la demande des époux Gauthier, ceux-ci ont ensuite assigné M. X... et la société Lecurieux-Belfond, cabinet d'expertise comptable, en réparation de leurs préjudices ;
Sur les seconds moyens du pourvoi principal de M. Gauthier, et du pourvoi incident de Mme Auger, qui sont identiques :
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir écarté toute responsabilité du cabinet Lecurieux-Belfond, alors que, en ne répondant pas aux conclusions par lesquelles les époux Gauthier avaient fait valoir que la promesse de vente avait été conclue sous la condition suspensive de l'obtention d'un prêt bancaire, lequel leur avait été accordé au vu du budget prévisionnel établi par le cabinet d'expertise qui aurait dû insister auprès du vendeur pour obtenir les éléments nécessaires à l'établissement d'un document fiable, la cour d'appel aurait violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que, par motifs adoptés du jugement, confirmé sur ce point, les juges du fond ont relevé, d'une part, que le document établi par le cabinet étant postérieur à l'acte de promesse de vente, il n'avait pu avoir aucune incidence sur la décision des époux de contracter avec le vendeur, d'autre part, que cette étude était destinée à être présentée à l'appui d'une demande de prêt, finalité qui n'impliquait pas nécessairement l'examen des résultats de l'exploitation ayant suivi la date de clôture du dernier exercice comptable, étant observé que les époux ne prétendaient pas avoir demandé une telle recherche, et, enfin, qu'il n'était pas établi que ce cabinet eût eu connaissance, lors de l'élaboration de l'étude, des informations suffisantes pour déceler la baisse de chiffre d'affaires intervenue en 1987 ; que, par ces motifs, la cour d'appel, qui a ainsi répondu aux conclusions visées par le moyen, a légalement justifié sa décision ;
Mais, sur les premiers moyens des mêmes pourvois, qui sont identiques :
Vu l'article 1382 du Code civil ;
Attendu que, pour débouter M. Gauthier et Mme Auger de leur action en responsabilité contre M. X..., l'arrêt énonce, d'une part, qu'il n'était pas établi que le notaire ait eu connaissance, même partielle, des chiffres d'affaires et des bénéfices de l'exercice 1987-1988 et qu'il ait donc manqué à ses obligations au regard des mentions légales devant être portées dans l'acte de vente, et, d'autre part, que les époux n'apportaient aucun élément permettant d'établir, entre l'omission des données comptables de l'exercice 1987-1988 dans l'acte de vente et leur consentement tant à la signature du compromis qu'à celle de l'acte notarié, un lien de causalité suffisant pour retenir une faute quelconque à la charge du notaire, ajoutant ensuite que ce consentement avait été vicié par la méconnaissance de la réalité de l'activité du fonds de commerce qu'ils achetaient mais sûrement pas par l'omission des données chiffrées relatives à cette activité dans l'acte notarié ou dans le compromis ;
Attendu qu'en se prononçant ainsi, alors, qu'en sa qualité d'officier public, le notaire est tenu de veiller à l'efficacité des actes qu'il établit et qu'il appartenait à M. X... de prendre toutes mesures permettant de sauvegarder les intérêts des acquéreurs en application des exigences de l'article 12 de la loi du 29 juin 1935, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a dit que M. X... n'avait pas engagé sa responsabilité professionnelle envers M. Gauthier et Mme Auger, l'arrêt rendu le 9 janvier 1996, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Chambéry.