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28/10/1998 | FRANCE | N°96-44395

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 28 octobre 1998, 96-44395


Sur le moyen unique :

Attendu que M. X..., engagé le 12 février 1990, en qualité de mécanicien poids-lourd, par la société le Bris Occasions PL, a été victime d'un accident du travail le 1er juin 1993 à la suite duquel il a repris le travail le 1er avril 1994 ; que le 7 avril 1994, le médecin du Travail l'a déclaré apte à reprendre son emploi en évitant de grosses manutentions et un travail de précision de la main droite ; qu'après une période de reprise non concluante, le médecin du Travail l'a déclaré, le 21 juin 1994, inapte au poste antérieurement occupé et a p

récisé que seule une étude ergonomique permettrait d'étudier les possibilit...

Sur le moyen unique :

Attendu que M. X..., engagé le 12 février 1990, en qualité de mécanicien poids-lourd, par la société le Bris Occasions PL, a été victime d'un accident du travail le 1er juin 1993 à la suite duquel il a repris le travail le 1er avril 1994 ; que le 7 avril 1994, le médecin du Travail l'a déclaré apte à reprendre son emploi en évitant de grosses manutentions et un travail de précision de la main droite ; qu'après une période de reprise non concluante, le médecin du Travail l'a déclaré, le 21 juin 1994, inapte au poste antérieurement occupé et a précisé que seule une étude ergonomique permettrait d'étudier les possibilités d'adapter le salarié à un poste ne nécessitant pas de travail de force ou de trop grande précision de la main droite ; que le salarié a été licencié le 16 juillet 1994 pour inaptitude et impossibilité de reclassement ; que le salarié, estimant son licenciement sans cause réelle et sérieuse, a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes en indemnité ;

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt attaqué (Rennes, 2 juillet 1996) de l'avoir condamné à payer au salarié une somme à titre de dommages-intérêts toutes causes confondues outre une somme au titre des frais irrépétibles, alors, selon le moyen, d'une part, que pour que puissent être mises en oeuvre les dispositions, spécialement de l'article L. 323-9 du Code du travail sur le reclassement des personnes handicapées, encore faut-il que le salarié pendant la période à prendre en compte ait la qualité de travailleur handicapé reconnue par la commission technique d'orientation et de reclassement professionnel prévue à l'article L. 323-11 ; qu'en l'espèce, il est constant que la lettre de licenciement avec dispense de préavis a été adressée le 16 juillet 1994 au salarié, l'employeur dans ses écritures d'appel faisant valoir que celui-ci a été reconnu handicapé par la COTOREP le 2 août 1994, soit après le licenciement ; qu'ainsi, la cour d'appel a fait à tort application des dispositions de l'article L. 323-9 du Code du travail pour décider que le licenciement ne reposait pas sur une cause réelle et sérieuse, d'où une violation dudit texte, ensemble des articles L. 122-32-5 et L. 323-10 du Code du travail ; alors, d'autre part, et en toute hypothèse, que les possibilités de reclassement du salarié victime d'un accident du travail dans l'entreprise doivent s'apprécier à la date de la résiliation du contrat ou à la date la plus proche de ladite résiliation par licenciement, et non à la date de la reprise du travail ; qu'en retenant ladite date pour se prononcer sur la démonstration de la société appelante, la cour d'appel viole l'article L. 122-32-5 du Code du travail ; alors, de troisième part, que l'employeur insistait sur le fait que le 7 avril 1994, le médecin du Travail ayant déclaré le salarié victime d'un accident du travail " apte, éviter grosses manutentions, travail de précision main droite, à revoir dans un mois ", l'employeur décida alors d'affecter le salarié au rangement de matériels divers à l'aide d'un chariot élévateur ; que le salarié s'étant révélé inapte à accomplir cette tâche, le 18 avril 1994, l'employeur l'informa que son contrat de travail était suspendu dans l'attente des conclusions du médecin du Travail ; que le 21 juin 1994, celui-ci a conclu à l'inaptitude au poste antérieurement occupé et a souligné " à reclasser à tout poste ne nécessitant pas de travail en force et de travail de précision de la main droite " ; qu'en l'état de ces données, l'employeur a convoqué le salarié à un entretien préalable et l'a licencié et a fait valoir notamment dans ses écritures d'appel que l'orientation du salarié vers un autre poste s'était avérée impossible, l'effectif de l'entreprise comprenant deux attachés commerciaux, un responsable du service pièces détachées ayant sous ses ordres six salariés, un chef comptable ayant sous ses ordres un comptable et une secrétaire, en sorte que l'affectation de M. X... à un autre emploi n'était pas envisageable, compte tenu notamment de cet organigramme et des compétences du salarié ; que le seul reclassement possible consistait à orienter M. X... vers une activité de transport et d'acheminement des pièces, à l'exclusion de toute activité de réparation stricto sensu ;

que cette orientation qui a été tentée au cours de la première quinzaine du mois d'avril 1994, lors de la reprise du travail par le salarié a été un échec si bien que l'employeur, qui n'était pas tenu de créer un emploi artificiel, sans utilité pratique, s'était trouvé, en l'état de l'avis du médecin du Travail, dans l'impossibilité de reclasser le salarié ; qu'en n'examinant pas le litige dans son épure et en faisant état de motifs erronés tirés de la mise en oeuvre des dispositions de l'article L. 323-9 du Code du travail et inopérants tirés d'une possible subvention, la cour d'appel ne justifie pas légalement son arrêt au regard des dispositions de l'article L. 122-32-5 du Code du travail ;

Mais attendu qu'il résulte de l'article L. 122-32-5 du Code du travail que l'employeur doit, au besoin en les sollicitant, prendre en considération les propositions du médecin du Travail en vue d'un reclassement du salarié ;

Et attendu que la cour d'appel a constaté que l'employeur avait procédé de façon prématurée au licenciement pour inaptitude sans prendre en considération les propositions du médecin du Travail relatives à l'intérêt de faire procéder à une étude ergonomique pour étudier les possibilités d'adapter le poste du salarié, dont elle a relevé le caractère partiel de l'inaptitude, à ses capacités physiques diminuées ; qu'il appartenait à l'employeur de saisir l'inspecteur du Travail du recours prévu à l'article L. 241-10-1 du Code du travail s'il était en désaccord avec les propositions du médecin du travail ; qu'il en résulte que la cour d'appel, a, par ces seuls motifs, pu décider que l'employeur n'avait pas satisfait aux obligations mises à sa charge par l'article L. 122-32-5 du Code du travail ; que le moyen n'est pas fondé ;

Attendu, cependant que le pourvoi n'est pas abusif ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 96-44395
Date de la décision : 28/10/1998
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement - Formalités préalables - Accident du travail ou maladie professionnelle - Inaptitude physique du salarié - Propositions du médecin du Travail - Prise en considération - Obligation de l'employeur .

CONTRAT DE TRAVAIL, EXECUTION - Maladie du salarié - Accident du travail ou maladie professionnelle - Inaptitude au travail - Proposition d'un emploi adapté - Obligation de l'employeur - Propositions du médecin du Travail - Contestation - Défaut - Portée

TRAVAIL REGLEMENTATION - Hygiène et sécurité - Médecine du Travail - Avis du médecin - Contestation - Contestation devant l'inspecteur du Travail - Défaut - Effet

TRAVAIL REGLEMENTATION - Hygiène et sécurité - Médecine du Travail - Examens médicaux - Inaptitude physique du salarié - Proposition de mesures individuelles - Prise en considération - Obligation de l'employeur

Ne satisfait pas aux obligations mises à sa charge par l'article L. 122-32-5 du Code du travail l'employeur qui procède de façon prématurée au licenciement du salarié pour inaptitude sans prendre en considération les propositions du médecin du Travail, contre lesquelles il n'a pas exercé le recours prévu à l'article L. 241-10-1 du Code du travail, relatives à l'intérêt de faire procéder à une étude ergonomique pour étudier les possibilités d'adapter le poste du salarié à ses capacités physiques diminuées.


Références :

Code du travail L122-32-5, L241-10-1

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 02 juillet 1996

A RAPPROCHER : Chambre sociale, 1995-07-19, Bulletin 1995, V, n° 254, p. 183 (cassation partielle).


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 28 oct. 1998, pourvoi n°96-44395, Bull. civ. 1998 V N° 464 p. 347
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1998 V N° 464 p. 347

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Waquet, conseiller doyen faisant fonction. .
Avocat général : Avocat général : M. de Caigny.
Rapporteur ?: Rapporteur : Mme Bourgeot.
Avocat(s) : Avocat : M. Blondel.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1998:96.44395
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