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08/07/1998 | FRANCE | N°96-42118

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 08 juillet 1998, 96-42118


Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Riom, 19 février 1996) que M. Y... a été engagé par la société Wavin SA le 1er août 1984 ; qu'en exécution de deux contrats des 31 janvier et 26 février 1991, il a été détaché auprès de la société Wavin BV en Hollande pour une période de 3 ans à compter du 1er mars 1991, la société Wavin SA s'engageant à lui offrir un emploi équivalent à celui qu'il occupait auparavant, au terme de cette période, et se réservant de résilier le contrat initial, momentanément suspendu, en cas de cessation prématurée du dÃ

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Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Riom, 19 février 1996) que M. Y... a été engagé par la société Wavin SA le 1er août 1984 ; qu'en exécution de deux contrats des 31 janvier et 26 février 1991, il a été détaché auprès de la société Wavin BV en Hollande pour une période de 3 ans à compter du 1er mars 1991, la société Wavin SA s'engageant à lui offrir un emploi équivalent à celui qu'il occupait auparavant, au terme de cette période, et se réservant de résilier le contrat initial, momentanément suspendu, en cas de cessation prématurée du détachement pour l'une des causes visées dans l'acte du 31 janvier 1991 ; que la société Wavin BV ayant mis fin à l'affectation de M. Y... en Hollande le 15 septembre 1992 en raison d'une restructuration de ses services, la société Wavin SA ne l'a pas réintégré et l'a licencié pour suppression de poste le 22 janvier 1993 ;

Attendu que la société Wavin SA fait grief à l'arrêt d'avoir jugé le licenciement de M. Y... abusif et de l'avoir condamnée au paiement de dommages-intérêts, alors, selon le moyen, que, d'une première part, aux termes de l'article 2 de l'avenant conclu par les parties le 31 janvier et le 1er mars 1991, la contrat initial (contrat d'emploi simple) était suspendu durant le temps du détachement de M. Y... au service de la société Wavin BV ; que la société Wavin BV a mis fin au détachement le 15 septembre 1992 ; qu'en décidant, dès lors, que la société Wavin SA avait licencié pour un motif autre que celui contractuellement prévu alors que le contrat initial à nouveau en vigueur ne comportait aucune restriction au droit de licencier de la société Wavin, la cour d'appel de Riom a nécessairement violé l'article 1134 du Code civil ; alors, que de deuxième part, l'article 8 de l'avenant du 31 janvier et du 1er mars 1991 conclu avec la société Wavin SA qui n'envisageait que les conséquences d'une faute grave commise par M. Y... lors de son affectation au service de la société Wavin BV n'excluait nullement la possibilité pour la société Wavin SA de rompre le contrat pour un motif économique ; qu'en jugeant qu'aux termes de cet article 8, la société Wavin SA s'interdisait de résilier le contrat le liant à M. Y... sauf dans le cas où la société Wavin mettrait fin à l'affectation de celui-ci pour faute grave, la cour d'appel de Riom a donc dénaturé la convention liant les parties et ainsi violé les dispositions de l'article 1134 du Code civil ; alors que, de troisième part, le droit de licencier reconnu à l'employeur en application de l'article L. 122-4 du Code du travail constitue un droit d'ordre public ; qu'en outre, les dispositions de l'article L. 321-1 et suivants du Code du travail sont elles aussi d'ordre public ; qu'en décidant, néanmoins, de donner son plein effet au contrat qui selon elle interdisait la société Wavin SA de licencier M. Y... pour un motif économique, la cour d'appel de Riom a nécessairement privé sa décision de toute base légale au regard des articles L. 122-4 et L. 321-1 du Code du travail ; alors, de quatrième part, pour démontrer qu'elle avait bien tenté de reclasser M. Y..., la société Wavin SA avait versé aux débats une note interne en date du 17 septembre 1992 émanant de sa direction des ressources humaines ainsi que deux courriers en réponse datés du 25 et du 30 septembre 1992 dans lesquels les directeurs généraux des sociétés Teri SA et Wavin SA indiquaient bien que le reclassement de M. Y... dans leur entité n'était pas possible même dans des postes de qualification moindre ; qu'en estimant que les pièces versées aux débats par la société Wavin SA ne démontraient nullement la réalité des recherches qu'elle aurait entreprises pour reclasser M. Y..., la cour d'appel de Riom a donc dénaturé le contenu des pièces versées aux débats par la société Wavin SA et ainsi violé, une fois encore l'article 1134 du Code civil ; alors, de cinquième part, que la société Wavin SA avait dans ses conclusions tout particulièrement insisté sur le fait que l'impossibilité de reclassement de M. Y... ressortait des pièces que celui-ci avait lui-même versées aux débats puisque M. Y... avait notamment communiqué une note interne daté du 8 mars 1993 émanant de M. X..., directeur général de la société Wavin SA qui informait l'ensemble du personnel des difficultés économiques rencontrées par la société ;

qu'en décidant, néanmoins, de limiter son contrôle aux seules pièces versées aux débats par la société Wavin SA pour vérifier si celle-ci justifiait de son impossibilité de reclasser M. Y..., la cour d'appel de Riom a nécessairement entaché sa décision d'un défaut de réponse à conclusions violant ainsi les dispositions de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que par une interprétation nécessaire des termes des contrats, exclusive de dénaturation, la cour d'appel a estimé que la société Wavin SA s'était obligée à ne pas licencier M. Y... en cas de cessation prématurée du détachement, sauf si cette cessation prématurée résultait d'une faute grave du salarié, ou de la volonté de ce dernier ; qu'ayant constaté que la société Wavin BV avait mis fin à l'affectation de M. Y... en Hollande pour un autre motif que celui contractuellement prévu ; elle en a déduit à bon droit qu'en ne réintégrant pas le salarié, et en le licenciant en raison de la suppression de son emploi, la société Wavin SA avait failli à l'obligation volontairement souscrite par elle en faveur du salarié, de limiter sa faculté de licenciement ; que par ce seul motif elle a légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 96-42118
Date de la décision : 08/07/1998
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement - Droits de l'employeur - Limitation - Limitation par le contrat de travail - Inobservation - Constatations suffisantes .

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement - Droits de l'employeur - Limitation - Limitation par le contrat de travail - Etendue - Interprétation - Pouvoirs des juges

POUVOIRS DES JUGES - Applications diverses - Contrat de travail - Licenciement - Droits de l'employeur - Limitation - Limitation par le contrat de travail - Etendue - Interprétation

C'est par une interprétation nécessaire des termes des contrats liant les parties, exclusive de dénaturation, qu'une cour d'appel, estime que l'employeur s'était obligé à ne pas licencier le salarié détaché en cas de cessation prématurée du détachement, sauf si cette cessation prématurée résultait d'une faute grave du salarié, ou de la volonté de ce dernier. Après avoir constaté que l'employeur avait mis fin au détachement du salarié pour un autre motif que celui contractuellement prévu, la cour d'appel en déduit, à bon droit, qu'en ne réintégrant pas le salarié et en le licenciant en raison de la suppression de son emploi, l'employeur avait failli à l'obligation qu'il avait volontairement souscrite en faveur du salarié, de limiter sa faculté de licenciement.


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Riom, 19 février 1996


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 08 jui. 1998, pourvoi n°96-42118, Bull. civ. 1998 V N° 375 p. 284
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1998 V N° 375 p. 284

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Boubli, conseiller le plus ancien faisant fonction et rapporteur.
Avocat général : Avocat général : M. Martin.
Rapporteur ?: Président : M. Boubli, conseiller le plus ancien faisant fonction et rapporteur.
Avocat(s) : Avocat : la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1998:96.42118
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