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26/03/1998 | FRANCE | N°96-85201

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 26 mars 1998, 96-85201


REJET des pourvois formés par :
- X... Gérard,
- Y... Jacques,
- Z... René,
- A... Jacques,
- B... Léon,
contre l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, 5e chambre, en date du 15 février 1996, qui, pour escroqueries, a condamné Gérard X... à 18 mois d'emprisonnement avec sursis et 30 000 francs d'amende, Jacques Y... à 1 an d'emprisonnement avec sursis et 20 000 francs d'amende, René Z... à 4 ans d'emprisonnement avec sursis et 100 000 francs d'amende, Jacques A... à 2 ans d'emprisonnement avec sursis et 50 000 francs d'amende, Léon B... à 1 an d'emprison

nement avec sursis et 50 000 francs d'amende, et a prononcé sur les intérêts civ...

REJET des pourvois formés par :
- X... Gérard,
- Y... Jacques,
- Z... René,
- A... Jacques,
- B... Léon,
contre l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, 5e chambre, en date du 15 février 1996, qui, pour escroqueries, a condamné Gérard X... à 18 mois d'emprisonnement avec sursis et 30 000 francs d'amende, Jacques Y... à 1 an d'emprisonnement avec sursis et 20 000 francs d'amende, René Z... à 4 ans d'emprisonnement avec sursis et 100 000 francs d'amende, Jacques A... à 2 ans d'emprisonnement avec sursis et 50 000 francs d'amende, Léon B... à 1 an d'emprisonnement avec sursis et 50 000 francs d'amende, et a prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
I. Sur le pourvoi de Léon B... :
Attendu qu'aucun mémoire n'est produit par ce demandeur ;
II. Sur les autres pourvois :
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation : (sans intérêt) ;
Sur le premier moyen de cassation : (sans intérêt) ;
Sur le premier moyen de cassation : (sans intérêt) ;
Sur le deuxième moyen de cassation : (sans intérêt) ;
Sur le deuxième moyen de cassation proposé par Me Choucroy en faveur de Gérard X..., pris de la violation des articles 15 et 18 du décret du 22 décembre 1959, 78 de l'arrêté du 23 décembre 1959, 1382 du Code civil, 2, 3 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré recevable la constitution de partie civile du Trésor public et a condamné le prévenu à verser la somme de 44 000 francs à l'agent judiciaire du Trésor public ;
" aux motifs, qu'aux termes de l'article 15 du décret du 22 décembre 1959, l'Etat exerce un prélèvement sur le produit brut des jeux ; que l'article 18 du décret du 22 décembre 1959 dispose expressément que les sommes représentant le montant du prélèvement progressif au profit de l'Etat deviennent, dès leur entrée dans la cagnotte, la propriété de l'Etat ; que les mêmes dispositions sont reprises par l'article 78 de l'arrêté du 23 décembre 1959 ; que, dès lors, l'agent judiciaire du Trésor, en vertu du mandat légal institué par l'article 38 de la loi du 3 avril 1995, doit être déclaré recevable en sa constitution de partie civile ; que les procédés de fraude mis en exergue dans cette procédure ont abouti à un accroissement fictif des gains de certains joueurs, et par conséquent à une diminution des recettes enregistrées ; que le préjudice subi de ce fait par l'Etat revêt le caractère direct et certain requis par la loi pour ouvrir droit à indemnisation ; que la Cour dispose des éléments suffisants pour, au vu des déclarations spontanées des uns, des mises en cause pour les autres, déterminer la réparation civile due par les différents prévenus en considération de leur activité délictuelle respective, à hauteur des profits illicites retirés de leur participation à l'escroquerie ; que, concernant le demandeur, la Cour dispose dans la procédure d'éléments suffisants pour fixer à la somme de 44 000 francs la réparation civile mise à sa charge, à raison d'une participation équivalente à l'escroquerie ;
" alors que le juge correctionnel n'est compétent pour prononcer la condamnation du prévenu à des réparations civiles qu'autant que cette condamnation est fondée sur un préjudice découlant directement de l'infraction ; qu'en l'espèce, le préjudice subi par le Trésor public ne se rattache pas directement à l'infraction d'escroquerie poursuivie ; qu'en effet, la diminution du montant des redevances fiscales perçues par le Trésor public pour le compte de l'Etat et des collectivités locales concernées, par suite de la réduction frauduleuse de l'assiette, ne constitue qu'un préjudice par ricochet ; que, pour en avoir autrement décidé, la Cour n'a pas légalement justifié sa décision " ;
Sur le deuxième moyen de cassation proposé par la société civile professionnelle Piwnica et Molinié en faveur de Jacques Y..., pris de la violation des articles 2, 3, 591 et 593 du Code de procédure pénale, 1560 et annexe IV, 146 et 147 du Code général des impôts, violation de la loi, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré l'agent judiciaire du Trésor public recevable en sa constitution de partie civile pour le délit d'escroquerie reproché au prévenu et a condamné celui-ci à verser au Trésor une somme de 44 000 francs au titre de la réparation du préjudice subi ;
" aux motifs que, selon les dispositions combinées de l'article 15 du décret du 22 décembre 1959, 18 du décret du 22 décembre 1959 et de l'article 78 de l'arrêté du 23 décembre 1959, l'Etat exerce un prélèvement progressif sur le produit brut des jeux qui devient, dès son entrée dans la cagnotte, propriété de l'Etat ; qu'en conséquence, l'agent judiciaire est recevable en sa constitution de partie civile, au même titre que la SA Cannes Balnéaire, pour obtenir réparation du préjudice consécutif à la diminution des recettes enregistrées, suite aux procédés de fraude constatés ;
" alors que, pour être recevable devant les juridictions répressives, l'action civile suppose l'existence d'un préjudice personnel et directement causé par l'infraction ; que le délit d'escroquerie retenu contre le prévenu n'a causé de préjudice direct qu'à la seule personne victime des manoeuvres frauduleuses à qui appartiennent les sommes escroquées ; que tel n'est pas le cas du préjudice allégué par l'Etat du fait de la diminution des prélèvements consécutive à la diminution des recettes, l'Etat n'étant, selon les énonciations de l'arrêt, propriétaire que des sommes prélevées sur la cagnotte une fois constituée ; qu'en se prononçant ainsi, l'arrêt attaqué a privé sa décision de base légale " ;
Sur le troisième moyen de cassation proposé par la société civile professionnelle Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez en faveur de Jacques A... et de René Z..., pris de la violation des articles 15 et 18 du décret du 22 décembre 1959 portant réglementation des jeux dans les casinos des stations balnéaires, thermales et climatiques, 1382 du Code civil, 2, 3, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré recevable la constitution de partie civile de l'agent judiciaire du Trésor et a condamné Jacques A... et René Z..., solidairement avec deux autres coprévenus, à lui verser la somme de 661 650 francs à titre de réparation ;
" aux motifs qu'aux termes de l'article 15 du décret du 22 décembre 1959, l'Etat exerce un prélèvement sur le produit brut des jeux ; que, par ailleurs, l'article 18 de ce décret dispose que les sommes représentant le montant du prélèvement progressif au profit de l'Etat deviennent dès leur entrée dans la cagnotte la propriété de celui-ci, les mêmes dispositions étant reprises par l'article 78 de l'arrêté du 23 décembre 1959 ; que, dès lors, l'agent judiciaire du Trésor public doit être déclaré recevable en sa constitution de partie civile... ; que la SA Cannes Balnéaire, exploitant du casino, ne sollicitant que 45 % des sommes représentant la réparation du préjudice occasionné, compte tenu des 55 % revenant à l'agent judiciaire du Trésor, qui ne formule aucune réserve à l'endroit de cette répartition, il en sera tenu compte dans le prononcé des condamnations... ; que, Léon B... ayant admis avoir perçu au titre des gains illicites pour la période concernée la somme de 1 203 000 francs, sur laquelle il a rétrocédé au trio Z...- A...- C... un pourcentage de 60 % représentant leur part convenue d'avance, ces quatre prévenus seront condamnés solidairement à payer pareille somme aux parties civiles, soit 661 650 francs au profit de l'agent judiciaire du Trésor ;
" alors qu'aux termes de l'article 15 du décret du 22 décembre 1959, en matière de jeux de contrepartie, le produit brut sur lequel l'Etat exerce un prélèvement s'entendant de la différence entre le montant cumulé de l'avance initiale et des avances complémentaires éventuelles et le montant de l'encaisse constatée en fin de partie, il en résulte, dès lors, que des escroqueries aux jeux, si elles ont pour effet de porter atteinte nécessairement aux droits du casino, ne sont pas nécessairement faites au préjudice du Trésor ; que, dès lors, l'arrêt infirmatif attaqué, qui a, en l'espèce, considéré que, sur la base d'un gain illicite de 1 203 000 francs, le Trésor avait été privé de ses droits à hauteur de 55 % de cette somme, a, en l'état de ce raisonnement, tout à fait hypothétique, violé le principe selon lequel seul un préjudice certain peut donner lieu à réparation " ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que, pour infirmer sur ce point le jugement déféré et déclarer recevable la constitution de partie civile de l'agent judiciaire du Trésor, l'arrêt attaqué énonce " qu'aux termes de l'article 15 du décret du 22 décembre 1959 l'Etat exerce un prélèvement sur le produit brut des jeux ; que, par ailleurs, l'article 18 de ce décret dispose expressément que les sommes représentant le montant du prélèvement progressif au profit de l'Etat deviennent, dès leur entrée dans la cagnotte, la propriété de l'Etat " ;
Que les juges ajoutent que, compte tenu du pourcentage des sommes escroquées réclamé par la société Cannes Balnéaire, exploitant le casino, le préjudice du Trésor public s'élève à 55 % de ces sommes ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, qui caractérisent un préjudice direct et certain, la cour d'appel a justifié sa décision sans encourir les griefs allégués ;
Que, dès lors, les moyens ne peuvent être accueillis ;
Sur le troisième moyen de cassation proposé par Me Choucroy en faveur de Gérard X..., pris de la violation des articles 1382 du Code civil, 2, 3 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a condamné le prévenu à verser la somme de 44 000 francs à l'agent judiciaire du Trésor public et la somme de 36 000 francs à la société Cannes Balnéaire ;
" aux motifs que les procédés de fraude mis en exergue dans cette procédure ont abouti à un accroissement fictif des gains de certains joueurs et, par conséquent, à une diminution des recettes enregistrées ; que le préjudice subi de ce fait, tant par la société Cannes Balnéaire que par l'Etat, revêt le caractère direct et certain requis par la loi pour ouvrir droit à indemnisation ; que la Cour dispose d'éléments suffisants pour, au vu des déclarations spontanées des uns, des mises en cause pour les autres, déterminer la réparation civile due par les différents prévenus en considération de leur activité délictuelle respective, à hauteur des profits illicites retirés de leur participation à l'escroquerie ; que, concernant le demandeur, la Cour dispose, dans la procédure, d'éléments suffisants pour fixer à la somme de 80 000 francs la réparation civile mise à sa charge à raison d'une participation équivalente à l'escroquerie ;
" alors que, si le juge apprécie souverainement le préjudice découlant d'une infraction, il en est autrement lorsque cette appréciation est déduite de motifs insuffisants, erronés ou contradictoires ; qu'en l'espèce, la cour d'appel ne pouvait, pour déterminer le préjudice prétendument subi par les parties civiles, se borner à invoquer les déclarations des uns, des mises en cause pour les autres et fixer arbitrairement à 80 000 francs la réparation du préjudice à raison d'une participation équivalente à l'escroquerie ; qu'ainsi, la cour d'appel s'est fondée sur des motifs insuffisants, lesquels ne sauraient justifier la condamnation prononcée " ;
Sur le troisième moyen de cassation proposé par la société civile professionnelle Piwnica et Molinié en faveur de Jacques Y..., pris de la violation des articles 2, 3, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a condamné Jacques Berard à payer les sommes de 44 000 francs à l'agent judiciaire du Trésor et 36 000 francs à la société Cannes Balnéaire ;
" aux motifs que la Cour dispose, dans la procédure, d'éléments suffisants pour fixer à la somme de 80 000 francs la réparation civile mise à leur charge respective, à raison d'une participation équivalente à l'escroquerie ; que la société Cannes Balnéaire, exploitant du casino, ne sollicitant que 45 % des sommes représentant la réparation du préjudice occasionné, compte tenu des 55 % revenant à l'agent judiciaire du Trésor, il en sera tenu compte dans le prononcé des condamnations ;
" alors qu'en se bornant à viser " la procédure " pour déterminer le préjudice des parties civiles, la cour d'appel, qui n'a pas recherché le montant, exact, des sommes prétendument soustraites aux parties civiles, résultant des infractions reprochées au prévenu, a ainsi privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés " ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que les moyens, qui ne font que remettre en question l'appréciation souveraine du préjudice par les juges du fond, dans la limite des conclusions dont ils sont saisis, ne peuvent qu'être écartés ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme :
REJETTE les pourvois.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 96-85201
Date de la décision : 26/03/1998
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1° JEUX DE HASARD - Casinos - Impôts et prélèvements sur les recettes - Sommes dues à l'Etat et à la commune.

1° Aux termes des articles 15 et 18 du décret du 22 décembre 1959 et 77 de l'arrêté du 23 décembre 1959 réglementant les jeux dans les casinos des stations balnéaires, thermales et climatiques, l'Etat et les collectivités locales sont propriétaires de la partie des sommes représentant le montant des impositions et prélèvements dus, dès leur entrée dans la cagnotte(1).

2° ACTION CIVILE - Recevabilité - Etat - Jeux de hasard - Impôts et prélèvements sur les recettes - Détournement des sommes dues.

2° L'Etat et les collectivités locales propriétaires d'une partie des sommes entrées dans la cagnotte, aux termes des articles 18 du décret du 22 décembre 1959 et 77 de l'arrêté du 23 décembre 1959 réglementant les jeux dans les casinos sont recevables à se constituer parties civiles sur les poursuites exercées du chef d'escroquerie contre les croupiers d'un casino et des joueurs complices ayant employé des manoeuvres frauduleuses pour obtenir des sommes qui auraient dû, à défaut, entrer dans la cagnotte.


Références :

Code de procédure pénale 2, 3
Décret du 22 décembre 1959 art. 18 sur les jeux
arrêté du 23 décembre 1959, sur les jeux, art. 77

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 15 février 1996

CONFER : (1°). (1) Cf. Chambre criminelle, 1982-07-06, Bulletin criminel 1982, n° 182, p. 500 (rejet) ;

A rapprocher : Chambre criminelle, 1979-05-03, Bulletin criminel 1979, n° 154, p. 437 (rejet).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 26 mar. 1998, pourvoi n°96-85201, Bull. crim. criminel 1998 N° 118 p. 314
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1998 N° 118 p. 314

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Schumacher, conseiller le plus ancien faisant fonction.
Avocat général : Avocat général : M. Amiel.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Martin.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Piwnica et Molinié, la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, la SCP Ancel et Couturier-Heller, M. Choucroy.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1998:96.85201
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