La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

11/03/1998 | FRANCE | N°97-80983

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 11 mars 1998, 97-80983


REJET du pourvoi formé par :
- X... Régis,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Bordeaux, 3e chambre, en date du 16 janvier 1997, qui, pour refus de restituer son permis de conduire invalidé par la perte totale des points, l'a condamné à une amende de 10 000 francs.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 5, 6.1, 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 2 du Protocole additionnel n° 4 :
" en ce que l'arrêt attaqué a écarté l'exception tirée de

l'incompatibilité de la loi du 10 juillet 1989 avec la Convention européenne de...

REJET du pourvoi formé par :
- X... Régis,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Bordeaux, 3e chambre, en date du 16 janvier 1997, qui, pour refus de restituer son permis de conduire invalidé par la perte totale des points, l'a condamné à une amende de 10 000 francs.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 5, 6.1, 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 2 du Protocole additionnel n° 4 :
" en ce que l'arrêt attaqué a écarté l'exception tirée de l'incompatibilité de la loi du 10 juillet 1989 avec la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
" aux motifs qu'il n'existe aucune incompatibilité entre ces deux textes dès lors que la perte partielle de points est subordonnée à la reconnaissance de la culpabilité de l'auteur de l'infraction, soit par le juge pénal, soit par la personne concernée elle-même qui, en s'acquittant d'une amende forfaitaire, renonce expressément à la garantie d'un procès équitable ; que la circonstance selon laquelle seul un ressortissant français peut faire l'objet d'une mesure de retrait de point est sans effet au regard de l'application de l'article 6 de la Convention ;
" alors, d'une part, que le droit de toute personne à un procès équitable implique qu'un juge puisse se prononcer non seulement sur la culpabilité de l'auteur de l'infraction, mais également sur l'application de toute sanction découlant de cette infraction ; que, comme l'admet expressément la cour d'appel, la perte partielle de points consécutive à l'infraction s'applique de plein droit et échappe à l'appréciation des juridictions répressives ; que le caractère automatique de cette sanction et de celle constituée par l'annulation du permis pour défaut de points n'est pas conforme aux conditions édictées par l'article 6.1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
" et alors, d'autre part, que, aux termes de l'article 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, la liberté de circuler en voiture, reconnue par la Convention, doit être assurée sans distinction aucune suivant la nationalité ; que, comme le soutenait le demandeur dans ses écritures d'appel, la loi du 10 juillet 1889, qui met en place un système de retrait de points et d'annulation du permis de conduire pour défaut de points, applicable aux seuls titulaires d'un permis de conduire français, institue une discrimination prohibée entre titulaires d'un permis français et titulaires d'un permis étranger ; que, en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les articles 5 et 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 2 du Protocole additionnel n° 4 " ;
Attendu que Régis X... est poursuivi pour avoir refusé de se soumettre à l'injonction qui lui a été faite de restituer son permis de conduire, invalidé par la perte de tous les points ;
Que, pour écarter l'exception tirée de la non-conformité de la loi du 10 juillet 1989, instituant le permis de conduire à points à l'article 6, paragraphe 1, de la Convention européenne des droits de l'homme, la juridiction du second degré énonce que la perte partielle des points, bien que s'appliquant de plein droit et échappant à l'appréciation des juridictions répressives, est subordonnée à la reconnaissance de la culpabilité de l'auteur de l'infraction, soit par le juge pénal, après examen préalable de la cause par un tribunal indépendant et impartial, soit par la personne concernée elle-même qui, en s'acquittant d'une amende forfaitaire, renonce expressément à la garantie d'un procès équitable ; que les juges ajoutent que, le fait que seul le titulaire d'un permis français puisse faire l'objet d'une mesure de retrait de points est sans effet au regard du texte conventionnel précité ;
Attendu qu'en prononçant ainsi, la cour d'appel a justifié sa décision sans encourir les griefs allégués ;
Qu'en effet, aucune règle de droit international ne fait obstacle à ce qu'un Etat applique à ses nationaux des règles plus sévères que celles qui s'imposent, sur son territoire, à des ressortissants étrangers ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être admis ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 111-5 du Code pénal, L. 11-5, L. 11-6, L. 19, R. 123, R. 258 et R. 262 du Code de la route :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Régis X... coupable d'avoir refusé de se soumettre à l'injonction qui lui a été faite le 18 janvier 1985 de restituer son permis, à la suite de la perte de tous ses points ;
" aux motifs que la réduction du nombre de points est effective dès que le contrevenant a réglé l'amende forfaitaire ; qu'en l'espèce le prévenu ayant réglé la dernière infraction par lui commise, entraînant la perte totale de ses points, le 8 octobre 1994, le stage effectué les 8 et 9 décembre 1994 est dépourvu de tout effet, intervenant à une date où son permis de conduire n'avait plu d'existence ;
" alors, d'une part, que la suppression du droit de conduire ne devient effective, en cas de retrait de tous les points, que lorsque l'automobiliste reçoit de l'autorité administrative la lettre recommandée lui enjoignant de restituer son permis de conduire invalidé ; que, jusqu'à cette date, l'automobiliste conserve tous les droits attachés à la titularité d'un permis valable, notamment celui d'effectuer un stage de récupération de points ; que, en décidant que le stage effectué par le demandeur les 8 et 9 décembre 1994 était dépourvu de tout effet, bien qu'il n'ait reçu injonction de restituer son permis de conduire que le 18 janvier 1995, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
" alors, d'autre part, que, aux termes de l'article R. 262-3° du Code de la route, la récupération de points prend effet le lendemain de la dernière journée de stage ; qu'ainsi, en l'espèce, Régis X... a reconstitué partiellement son capital de points le 10 décembre 1994 ; que, dès lors, l'injonction de restituer son permis qui lui a été faite le 18 janvier 1995, sans tenir compte des points ainsi récupérés, était illégale, et ne pouvait servir de support à la commission de l'infraction " ;
Attendu qu'il ressort de l'arrêt attaqué que, le 8 octobre 1994, le prévenu s'est acquitté de l'amende forfaitaire relative à la contravention entraînant la perte des derniers points affectés à son permis de conduire ; que, devant les juges du fond, il a soutenu que le 18 janvier 1995, date de la lettre du préfet lui enjoignant de restituer son permis, il avait reconstitué partiellement son capital de points, à la suite d'un stage effectué les 8 et 9 décembre 1994, en application de l'article L. 11-6, alinéa 2, du Code de la route ;
Attendu que, pour écarter cette argumentation, la cour d'appel se prononce par les motifs reproduits au moyen ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, l'arrêt n'encourt pas les griefs allégués ;
Qu'en effet, l'article L. 11-6, alinéa 2, du Code de la route, aux termes duquel le titulaire du permis de conduire peut obtenir la reconstitution partielle de son nombre de points, exclut nécessairement de son champ d'application le conducteur dont le titre de conduite a perdu sa validité en raison de la perte de tous les points ; qu'il n'importe que, dans ce cas, la privation du droit de conduire ne devienne effective qu'après injonction faite à l'intéressé de restituer son permis de conduire invalidé ;
Que, dès lors, le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme :
REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 97-80983
Date de la décision : 11/03/1998
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1° CONVENTION EUROPEENNE DES DROITS DE L'HOMME - Article 14 - Interdiction de discrimination - Discrimination fondée sur l'origine nationale - Portée - Circulation routière - Permis de conduire - Perte de points.

1° CONVENTION EUROPEENNE DES DROITS DE L'HOMME - Protocole additionnel n° 4 - Article 2 - Liberté d'aller et venir - Portée - Circulation routière - Permis de conduire - Perte de points 1° CIRCULATION ROUTIERE - Permis de conduire - Perte de points - Loi du 10 juillet 1989 instituant le permis de conduire à points - Convention européenne des droits de l'homme - Article 14 - Interdiction de toute discrimination fondée sur l'origine nationale - Compatibilité - Protocole additionnel n° 4 - Article 2 - Liberté d'aller et venir - Compatibilité.

1° Aucune règle de droit international ne fait obstacle à ce qu'un Etat applique à ses nationaux des règles plus sévères que celles qui s'imposent, sur son territoire, à des ressortissants étrangers. Ainsi, ni l'article 14 de la Convention européenne des droits de l'homme, ni l'article 2.1 du Protocole additionnel n° 4 à ladite Convention, n'interdisent d'appliquer aux titulaires d'un permis de conduire français la loi du 10 juillet 1989 instituant la procédure de retrait de points et d'invalidation du permis de conduire par la perte totale de points.

2° CIRCULATION ROUTIERE - Permis de conduire - Perte de points - Invalidation du permis par la perte totale des points - Possibilité d'obtenir la reconstitution partielle du nombre de points initial (non).

2° L'article L. 11-6, alinéa 2, du Code de la route, aux termes duquel le titulaire du permis de conduire peut obtenir la reconstitution partielle de son nombre de points, exclut nécessairement de son champ d'application le conducteur dont le titre de conduite a perdu sa validité en raison de la perte de tous les points. Il n'importe que, dans ce cas, la privation du droit de conduire ne devienne effective qu'après injonction faite à l'intéressé de restituer son permis de conduire invalidé(1).


Références :

2° :
2° :
Code de la route L11-5, L11-6 al. 2, R262-3°, L19
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 14

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux, 16 janvier 1997

CONFER : (2°). (1) A comparer: Chambre criminelle, 1997-03-19, Bulletin criminel 1997, n° 112, p. 371 (rejet).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 11 mar. 1998, pourvoi n°97-80983, Bull. crim. criminel 1998 N° 97 p. 259
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1998 N° 97 p. 259

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Guilloux, conseiller le plus ancien faisant fonction.
Avocat général : Avocat général : M. Dintilhac.
Rapporteur ?: Rapporteur : Mme Batut.
Avocat(s) : Avocat : la SCP Waquet, Farge et Hazan.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1998:97.80983
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award