Donne acte à la société anonyme ITM France de son désistement envers les sociétés Colgate-Palmolive, Procter et X... France, Henkel France, Scarmor, Scaouest, Socamaine, Scanormande, Scaso, Scadif, Socara, Scapalsace, Galec, Lever, Scachap ;
Attendu qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué (Paris, 13 décembre 1995) que le Conseil de la Concurrence a été saisi en 1992, par le ministre de l'Economie, de pratiques mises en oeuvre sur le marché des lessives par les sociétés Henkel France, Lever, Procter et X... France, et Colgate Y..., fournissant ensemble près de 90 % des produits vendus en France ; que ces lessives sont vendues à hauteur de 30 % par deux distributeurs regroupés sous les enseignes de Leclerc et Intermarché ; qu'en ce qui concerne les commerçants arborant l'enseigne Leclerc, ceux-ci se groupent au sein de sociétés coopératives d'achat régionales au nombre de 16, elles-mêmes étant réunies à l'échelon national au sein de la société coopérative Galec ; que les magasins Intermarché sont liés par des contrats de franchisage à la société ITM entreprises, la politique commerciale de l'ensemble des distributeurs portant l'enseigne Intermarché étant définie par la société ITM France ; que le Conseil, ayant estimé constitutif d'ententes prohibées un certain nombre de pratiques liées au référencement de produits lessiviers par un certain nombre de sociétés de distribution, a prononcé à l'encontre des auteurs de ces pratiques illicites des sanctions pécuniaires ;
Sur le premier moyen, pris en ses trois branches :
Attendu que la société ITM France fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du Conseil de la Concurrence l'ayant condamnée au paiement d'une sanction pécuniaire, alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'en l'absence de dispositions spécifiques expresses d'origine législative, la notification du rapport obéit aux règles de portée générale édictées en la matière par le nouveau Code de procédure civile ; que, conformément à ces règles, la notification, s'agissant d'une société, doit être effectuée au siège social de celle-ci ; qu'à défaut d'une telle notification, le délai impératif imparti à la société destinataire pour produire un mémoire en réponse prévu à l'article 21 de l'ordonnance du ler décembre 1986 ne peut courir et cette société ne peut se voir privée du bénéfice de ce délai de deux mois pour assurer sa défense dans le cadre de la procédure devant le Conseil de la Concurrence ; qu'en l'espèce, le rapport établi par le rapporteur a été adressé à la société ITM France en ses locaux commerciaux situés à Longjumeau alors que son siège social est installé à Paris, étant précisé qu'il n'est ni allégué ni établi que le Conseil de la Concurrence n'ait pu connaître l'adresse de ce siège social du fait du comportement de la société ITM France et qu'il n'est pas contesté, au contraire, que le Conseil de la Concurrence avait connaissance de cette adresse, y ayant précédemment à la notification du rapport fait parvenir un courrier de convocation aux fins d'audition du président de la société ITM France ; qu'en conséquence, cette notification n'a pas fait courir à l'égard de la société ITM le délai de dépôt du mémoire en réponse au rapport ; que la cour d'appel en a cependant décidé autrement, violant par là même ensemble les dispositions de l'article 6, paragraphe 1, et de l'article 6, paragraphe 2 b, de la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales, les dispositions de l'article 18 de l'ordonnance de 1986 et les dispositions de l'article 21 de cette même ordonnance ; alors, d'autre part, que, dans ses conclusions prises devant la cour d'appel, la société ITM France faisait valoir que ni la notification des griefs, ni le rapport ne traitaient de l'argumentation développée par le Conseil de la Concurrence sur la base du rapprochement, du courrier de la société Henkel à la société ITM France en date du 3 mai 1990, du courrier de la société ITM France en date du 2 juillet 1990 auquel étaient annexés différents relevés de prix afférents à l'année 1990 commandés par cette dernière à la société Panel de gestion, de troisième part, de l'exemplaire de l'Argus de la distribution n° 87 valable du 9 au 28 avril 1990, toutes pièces qui ne figuraient pas dans celles annexées au rapport, de sorte que la société ITM France n'avait eu connaissance de cette argumentation qu'à la lecture de la décision et n'avait pas été invitée à y répondre lors de la séance et la société ITM France en déduisait que la procédure devant le Conseil de la Concurrence n'avait pas été pleinement contradictoire en violation de l'article 18 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ;
que, pour décider que ce moyen et ses éléments de fait se trouvaient dans le débat, la cour d'appel s'est bornée à constater qu'en pages 29 et 30 de la notification des griefs, le rapporteur avait fait figurer des tableaux reprenant les relevés de prix et qu'il avait fait ressortir en conclusion que le prix relevé correspondait au prix indicatif diffusé auprès des magasins de la société ITM, éléments chiffrés et argumentation qui ne concernaient que la seule année 1991, la cour d'appel n'a pas établi que l'argumentation et les éléments de fait relatifs à l'année 1990 avaient fait l'objet d'une discussion contradictoire et ne s'est donc pas expliquée sur le moyen soulevé par la société ITM sur ce point, privant par là même sa décision de base légale au regard des dispositions de l'article 18 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ; et alors, enfin, que la présence du rapporteur et du rapporteur général au délibéré du Conseil de la Concurrence, rapporteur qui est susceptible de par sa connaissance approfondie du dossier de conférer une orientation nouvelle à l'affaire sur laquelle les parties n'auraient pas eu à se prononcer, est de nature à priver celles-ci des garanties que sont le principe du respect dû au contradictoire et l'égalité des armes entre les parties et consacre par là même la méconnaissance de l'exigence d'un procès équitable posée par l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que décidant, en l'espèce, que la présence du rapporteur général et du rapporteur, sans voix délibérative, au délibéré du Conseil de la Concurrence qui n'a fondé sa décision que sur des éléments du rapport, constatation parfaitement erronée ainsi que le démontrent les précédents développements de ce mémoire ampliatif, n'avait pas entaché de nullité la décision prononcée par celui-ci, la cour d'appel a statué en violation des dispositions sus-évoquées ;
Mais attendu, d'une part, qu'aucune disposition de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ne prévoit que la notification du rapport doit être faite au siège social dès lors que l'entreprise concernée a pu avoir connaissance de ce rapport et a disposé du délai de deux mois prévu par l'article 21 de l'ordonnance pour y répondre ; qu'en l'espèce, la cour d'appel ayant relevé que la notification des griefs avait été faite avant l'envoi du rapport à l'adresse des locaux commerciaux de la société ITM France, sans que cette entreprise ait fait savoir ultérieurement qu'elle demandait que le rapport soit adressé à son siège social, l'arrêt n'encourt pas les griefs de la première branche du premier moyen ;
Attendu, d'autre part, que l'arrêt ayant constaté que la liste des prix figurant aux annexes du rapport " était reprise dans les tableaux des pages 29 et 30 de la notification des griefs " à partir des " relevés de prix adressés le 2 juillet 1990 par ITM à la société Henkel ", il en découlait que la société ITM France avait eu connaissance de ces éléments de preuve, qui étaient dans le débat, et avait eu la possibilité d'en contester contradictoirement la véracité, ce qu'elle n'a pas fait ;
Attendu, enfin, que l'article 25 de l'ordonnance énonce que le rapporteur et le rapporteur général assistent au délibéré sans voix délibérative ; qu'en l'espèce, la cour d'appel ayant constaté que le Conseil n'avait " fondé sa décision que sur les éléments du rapport discutés contradictoirement ", il n'est pas justifié que le principe de la contradiction ait été violé en méconnaissance des dispositions de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que la société ITM France fait encore grief à l'arrêt d'avoir rejeté son recours, alors, selon le pourvoi, que la production, devant la cour d'appel saisie d'un recours tendant à l'annulation et la réformation d'une décision de sanction prononcée par le Conseil de la Concurrence, d'observations écrites émanant de cette autorité administrative et répondant aux critiques émises par les parties à l'encontre de sa propre décision, est de nature à fausser le débat devant la juridiction judiciaire et méconnaît en conséquence l'exigence d'un procès équitable posée par l'article 6.1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Mais attendu que les dispositions de l'article 9, alinéa 1, du décret du 19 octobre 1987 relatif aux recours exercés devant la cour d'appel de Paris, qui prévoient que le Conseil de la Concurrence qui n'est pas partie à l'instance a la faculté de présenter des observations écrites lors de l'instance de la cour d'appel, ne sont pas de nature à fausser le débat dans la mesure où les parties ont la possibilité de répliquer aux observations de cette autorité administrative ; qu'ayant relevé qu'il n'était pas " établi ni même soutenu que le principe de la contradiction aurait été violé ", par le fait que le Conseil de la Concurrence ait adressé des observations écrites à la cour d'appel concernant ce litige, l'arrêt n'encourt pas les griefs du moyen ;
Sur le troisième moyen :
Attendu que la société ITM France fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté son recours, alors, selon le pourvoi, que tout jugement doit à peine de nullité contenir l'exposé de prétentions respectives des parties et de leurs moyens ; que ne satisfait pas à cette exigence l'arrêt qui omet de relater l'une des demandes présentée par l'une des parties et les moyens soulevés au soutien de celle-ci ; qu'en l'espèce, ne ressortent pas des énonciations de l'arrêt attaqué ni la contestation élevée par la société ITM France s'agissant de l'avantage octroyé par Henkel pour progression du chiffre d'affaires, ni les moyens décisifs soulevés par la société ITM France au soutien de cette même demande ; que, par l'omission de ces mentions d'un caractère substantiel, la décision frappée de pourvoi a méconnu les dispositions de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu qu'aucun texte ne déterminant sous quelle forme la mention des prétentions et des moyens doit être faite, il suffit qu'elle résulte, même succinctement, des énonciations de la décision ; qu'il ressort de la motivation de l'arrêt attaqué qu'il a été répondu à l'argumentation de la société ITM France concernant la ristourne que lui accordait la société Henkel, l'arrêt ayant relevé que " cet avantage artificiel ne saurait être justifié ni par le fait que le groupement ITM était l'un des deux clients les plus importants, ni par la volonté légitime exprimée par Henkel de reconquérir un marché " ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le quatrième moyen, pris en ses six branches : (sans intérêt) ;
Sur le cinquième moyen : (sans intérêt) ;
Sur le sixième moyen, pris en ses deux branches : (sans intérêt) ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.