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13/01/1998 | FRANCE | N°96-80341

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 13 janvier 1998, 96-80341


REJET sur les pourvois formés par :
- X... Graziano,
- Y... Patrick,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Besançon, chambre correctionnelle, en date du 7 décembre 1995, qui a condamné le premier, pour blessures involontaires, à 6 mois d'emprisonnement avec sursis et 5 000 francs d'amende, le second, pour blessures involontaires et infraction à la réglementation relative à la sécurité du travail, à 6 mois d'emprisonnement avec sursis et 20 000 francs d'amende, a ordonné l'affichage et la publication de la décision et prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu le mémoire produit, commu...

REJET sur les pourvois formés par :
- X... Graziano,
- Y... Patrick,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Besançon, chambre correctionnelle, en date du 7 décembre 1995, qui a condamné le premier, pour blessures involontaires, à 6 mois d'emprisonnement avec sursis et 5 000 francs d'amende, le second, pour blessures involontaires et infraction à la réglementation relative à la sécurité du travail, à 6 mois d'emprisonnement avec sursis et 20 000 francs d'amende, a ordonné l'affichage et la publication de la décision et prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu le mémoire produit, commun aux demandeurs ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 222-19, alinéa 1, 222-44, 222-46, 131-35, 131-27 du Code pénal, L. 262-2, L. 263-2-1 du Code du travail, 5 du décret du 8 janvier 1965, 593 du Code de procédure pénale, défaut de réponse à conclusions, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré Graziano X... coupable de blessures involontaires ayant entraîné une incapacité de travail supérieure à 3 mois et d'infraction au Code du travail ;
" qu'il résulte suffisamment, tant des pièces du dossier, notamment du rapport du contrôleur du travail (PV de constat du 2 mars 1994), des mesures effectuées au lieu de l'accident, ensuite de la sommation interpellative du 20 novembre 1995, que du témoignage de l'ouvrier apprenti ayant été et ayant assisté à la chute de Abdelhak Z... le 1er mars 1995, des déclarations constantes et renouvelées à l'audience de la Cour de Abdelhak Z..., et enfin que des déclarations de Graziano X... lui-même tant aux enquêteurs qu'à la Cour, que la hauteur à laquelle devaient travailler les ouvriers de l'entreprise Zannelec sur le chantier de l'école supérieure de Belfort se situait bien au-delà de 3 mètres ; qu'en effet, à l'endroit de l'accident, la hauteur du sol au plafond était de 3 mètres 59 et la hauteur du sol au chemin des câbles utilisé par les deux électriciens était de 4 mètres 18 pour le câble droit et de 4 mètres 27 pour le câble gauche ; que, pour tirer-pousser les câbles électriques, Abdelhak Z... et M. A... devaient être au sommet de l'échelle parisienne utilisée, mesurant plus de 3 mètres de hauteur, le corps engagé dans le faux plafond, pour atteindre les chemins de câblages à plus de 4 mètres 20 de hauteur ; que, dès lors, Abdelhak Z..., ouvrier hautement qualifié, était parfaitement fondé à demander que soit mis à sa disposition un échafaudage type pont-roulant avec garde-corps, seul dispositif efficace et nécessaire à éviter, à cette hauteur, tout risque de chute ; que Graziano X..., qui a prétendu et persiste à prétendre aujourd'hui que si cette demande lui avait été faite, il aurait fourni un tel dispositif, ne saurait, sans se contredire, dénier l'existence de la demande faite par Abdelhak Z... alors qu'il a déclaré aux services de police que " cependant j'estimais que, vu le temps que devait durer ce travail supplémentaire, ce n'était pas la peine d'installer un pont " ; qu'en se bornant à donner deux échelles à Abdelhak Z... alors qu'il connaissait bien le chantier et savait que des ouvriers allaient travailler " à environ 3 mètres du sol ", Graziano X... a délibérément contrevenu aux dispositions du décret n° 65-48 du 8 janvier 1965, réprimées par l'article L. 263-2 et L. 263-6 du Code du travail, alors surtout que son attention avait été attirée par Abdelhak Z... sur le risque de ce chantier et que lui-même s'est dit " conscient des risques " de ce type, mais estimait " qu'il ne fallait pas d'échafaudage pour ce travail qui ne nécessitait qu'une échelle " ; que, de surcroît, et outre son refus de fournir les éléments ou matériels de sécurité adaptés au poste de travail de ce chantier, Graziano X... a fourni des échelles dont l'une était manifestement très usagée, voire en mauvais état, ainsi qu'a pu le constater le contrôleur du travail lors de sa visite du chantier, le lendemain de l'accident, précisant : " un des sabots de cette échelle était usé et les échelons abîmés " ; que ce constat suffit à conforter les déclarations de Abdelhak Z... qui a toujours affirmé que, sur les deux échelles mises à sa disposition, l'une était neuve (il la donnera à l'apprenti, M. A...) et l'autre était " rafistolée, en mauvais état " ; qu'en l'ayant fait remarqué à Graziano X..., ce dernier devait répondre " qu'on avait toujours travaillé comme ça " ;
qu'ainsi, Graziano X..., soit par inconscience, soit par négligence, s'est affranchi des règlements existant en matière de sécurité du travail ; qu'il s'est donc rendu coupable des infractions qui lui sont reprochées ;
" alors que, d'une part, en état de la relaxe dont Graziano X... avait bénéficié en première instance et qui avait été motivée par la circonstance qu'aucun élément du dossier ne permet d'établir que les salariés travaillaient à une hauteur supérieure à trois mètres, cette distance devant s'entendre à partir des pieds ou du plan de travail, l'inspecteur du travail n'ayant effectué aucun relevé, et la victime ayant indiqué qu'elle " avait les pieds entre 2, 50 mètres et 3 mètres du sol ", la cour d'appel ne pouvait omettre de répondre aux chefs péremptoires des conclusions d'appel du demandeur soulignant que les pieds de la victime se situaient au maximum à 2, 57 mètres du sol ; que la victime pouvait difficilement travailler bras tendus en sorte que la hauteur à laquelle travaillait Abdelhak Z... se situait au maximum à 20 cm au-dessus ou en-dessous de sa tête ; que Abdelhak Z... travaillait donc à une hauteur inférieure à 3 mètres en sorte que le décret du 8 janvier 1965 n'était pas applicable et qu'aucune faute n'était imputable à l'employeur et au chef de chantier ;
" alors, d'autre part, qu'il résulte des déclarations de Abdelhak Z... (procès-verbal du 16 juin 1994) que si l'échelle n'était pas neuve, elle n'était pas abîmée avant la chute, qu'il n'a pas eu l'impression, en s'en servant, de prendre un risque supplémentaire par rapport au fait d'utiliser une échelle neuve ; qu'ainsi, la Cour n'a pu, sans dénaturer le procès-verbal versé aux débats et sans se contredire, déclarer que Abdelhak Z... a toujours affirmé que l'échelle mise à sa disposition était " rafistolée " et " en mauvais état " ; qu'en outre, la nature même du travail effectué justifiait l'utilisation d'un dispositif léger eu égard à la progression rapide des passages de câbles, qu'ainsi l'utilisation d'une échelle double constituait un poste de travail adapté à la tâche effectuée ; qu'en affirmant le contraire, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision " ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 131-35, 131-27, 222-19, alinéa 1, 222-44, 222-46 du Code pénal, L. 262-2, L. 263-2-1 du Code du travail, 5 du décret du 8 janvier 1965, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré Patrick Y... coupable de blessures involontaires ayant entraîné une incapacité totale temporaire de plus de 3 mois et d'infraction au Code du travail ;
" aux motifs que Patrick Y..., président-directeur général de l'entreprise, qui considère quant à lui que Abdelhak Z... étant un ouvrier hautement qualifié, " il lui appartenait de s'assurer qu'il travaillait dans des conditions de sécurité réglementaires " et " qu'il en avait les moyens matériels ", semble éluder, ce disant, sa responsabilité alors, cependant, qu'il n'a pas délivré de délégations de pouvoirs ni à son conducteur de travaux, Graziano X..., ni, de plus fort, à son ouvrier hautement qualifié, Abdelhak Z... ; qu'il s'ensuit que ce dernier ne disposait d'aucun pouvoir de donner des ordres, ni celui de les faire respecter, ni même de pouvoir se procurer le matériel nécessaire à la sécurité ; que, dans ces conditions, il s'est rendu coupable des infractions qui lui sont reprochées ;
" alors que, d'une part, le chef d'entreprise n'est responsable que de sa faute personnelle ; qu'il appartient à la poursuite d'établir à la charge de l'employeur une faute génératrice de l'accident ; qu'en l'espèce, il résulte des pièces de la procédure que l'échelle était parfaitement adaptée à la tâche accomplie par la victime, à savoir le passage de câbles qui supposait un travail en déplacement constant, qu'il s'agissait d'une échelle " double " supposée beaucoup plus stable, que Abdelhak Z... a déclaré que l'échelle n'était pas abîmée avant la chute ; qu'ainsi les causes de l'accident restent indéterminées ; que la cour d'appel, qui n'a caractérisé aucune faute à la charge du prévenu et a présumé celle-ci sans l'établir, n'a pas légalement justifié sa décision ;
" alors, d'autre part, que le lien de causalité entre la faute du prévenu et l'accident doit être certain, que la seule réalisation de l'accident ne saurait présumer, ni l'existence d'une faute, ni celle d'un lien de causalité ; qu'en l'espèce, la cour d'appel ne pouvait induire du seul accident une méconnaissance présumée des règlements et l'existence d'une faute à l'origine de l'accident ; que, dès lors que les causes de l'accident restent indéterminées, le matériel utilisé étant parfaitement adapté aux travaux entrepris par la victime et rien ne permettant d'établir le mauvais état de l'échelle remise à Abdelhak Z... qui a reconnu lui-même que l'échelle n'était pas abîmée avant la chute, la cour d'appel ne pouvait déclarer l'employeur responsable de l'accident en s'abstenant de caractériser l'existence d'un lien de causalité certain entre la prétendue faute commise par Patrick Y... et l'accident, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision " ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, par des motifs exempts d'insuffisance et répondant aux conclusions des prévenus, caractérisé en tous leurs éléments, tant matériels qu'intentionnel, les délits dont elle a déclaré les prévenus coupables ;
Que les moyens, qui se bornent à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ne peuvent qu'être écartés ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation de l'article 800-1 du Code de procédure pénale, 591 et 593 du même Code, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a constaté que Graziano X... et Patrick Y... étaient redevables chacun d'un droit fixe de procédure de 800 francs auquel était assujetti l'arrêt ;
" alors qu'il résulte de l'article 800-1 du Code de procédure pénale, que, nonobstant toutes dispositions contraires, les frais de justice criminelle, correctionnelle et de police sont à la charge de l'Etat et sans recours envers les condamnés ; que, dès lors, en condamnant les prévenus chacun au droit fixe de procédure de 800 francs, l'arrêt attaqué a violé les dispositions susvisées " ;
Attendu que le droit fixe de procédure, prévu par l'article 1018 A du Code général des impôts, ne figure pas parmi les frais de justice énumérés par l'article R. 92 du Code de procédure pénale, qui, seuls, sont à la charge de l'Etat et sans recours envers les condamnés ;
D'où il suit que le moyen, inopérant, ne peut qu'être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE les pourvois.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 96-80341
Date de la décision : 13/01/1998
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

FRAIS ET DEPENS - Article 1018 A du Code général des impôts - Frais de justice (non).

Le droit fixe de procédure, prévu par l'article 1018 A du Code général des impôts, ne figure pas parmi les frais de justice énumérés par l'article R. 92 du Code de procédure pénale, qui, seuls, sont à la charge de l'Etat et sans recours envers les condamnés.


Références :

CGI 1018 A
Code de procédure pénale R92

Décision attaquée : Cour d'appel de Besançon (chambre correctionnelle), 07 décembre 1995


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 13 jan. 1998, pourvoi n°96-80341, Bull. crim. criminel 1998 N° 12 p. 25
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1998 N° 12 p. 25

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Milleville, conseiller doyen faisant fonction.
Avocat général : Avocat général : M. Le Foyer de Costil.
Rapporteur ?: Rapporteur : Mme Karsenty.
Avocat(s) : Avocat : la SCP Vier et Barthélemy.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1998:96.80341
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