Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 11 mai 1995), que sur ordre de la société Entrepose International, qui était candidate pour la construction d'un gazoduc au Bangladesh, la banque Indosuez a émis au profit de la société Titas Gas une garantie de soumission ; que la banque s'y est engagée à payer à la société Titas Gas une somme de 450 000 dollars américains : 1° si le soumissionnaire retire son offre durant la période de validité indiquée... dans son offre, ou 2° si le soumissionnaire ayant fait l'objet d'une notification d'acceptation de son offre... pendant la durée de validité de ladite offre... ne signe pas ou refuse de signer le marché si cela lui a été demandé... ; qu'il était précisé que l'engagement serait exécuté à réception de sa première demande écrite sans que le client ait à justifier de sa demande ; que l'attribution du marché a été notifiée à la société Entrepose, mais sous réserve du " règlement de tous points en suspens par voie de négociation... " ; que la société Entrepose a demandé en conséquence la prorogation de la validité de son engagement de garantie de soumission ; qu'au cours de ces négociations la société Entrepose a refusé l'exigence nouvelle de son interlocutrice selon laquelle celle-ci voulait se réserver une faculté discrétionnaire de résiliation unilatérale de la convention envisagée, à tout moment de son exécution ; que la société Entrepose a, alors, rompu les pourparlers et refusé de proroger encore la garantie de soumission ; que la société Titas Gas a, avant son expiration, appelé la garantie de la banque Indosuez, laquelle s'est exécutée, malgré les informations reçues de la société Entrepose sur les conditions de la renonciation à sa soumission ; que la banque a judiciairement réclamé remboursement à la société Entrepose ; que celle-ci lui a reproché d'avoir procédé au paiement en dehors des conditions prévues dans son engagement ;
Attendu que la banque Indosuez fait grief à l'arrêt du rejet de sa demande, alors, selon le pourvoi, que la garantie à première demande est autonome par rapport au contrat de base et que, dès lors, le donneur d'ordre ne peut se prévaloir de ses rapports avec son cocontractant, bénéficiaire de la garantie ou des difficultés d'exécution de ce contrat pouvant l'opposer à ce dernier, sauf à établir le caractère manifestement abusif ou frauduleux aux yeux de la banque de l'appel de la garantie ; qu'en l'espèce l'attribution du marché à Entrepose International avait été régulièrement notifiée à cette société et à la banque ; que les modalités d'exécution de ce marché faisaient l'objet d'une négociation entre les parties ; que, si Titas Gas avait formulé une exigence jugée inacceptable par l'attributaire du marché, cette exigence l'avait été au cours d'une négociation dont Titas Gas avait demandé la poursuite ; que la rupture des relations contractuelles, intervenue à l'initiative du donneur d'ordre à l'occasion d'un différend d'ordre contractuel et alors que l'autre partie entendait poursuivre la discussion, ne pouvait conférer à l'appel de la garantie un caractère manifestement abusif aux yeux de la banque et interdire à celle-ci d'honorer l'engagement de garantie à première demande qu'elle avait pris ; qu'en refusant de faire droit à la demande de remboursement l'arrêt attaqué a violé les dispositions de l'article 1134 du Code civil ;
Mais attendu qu'après avoir retenu que les conditions nouvelles que la société Titas Gas a tenté d'imposer tardivement étaient très différentes de celles prévues à l'appel d'offres et évidemment, dès lors, inacceptables pour la société soumissionnaire, la cour d'appel a pu décider que la banque, informée de cette situation, devait tenir pour manifestement abusif l'appel de la garantie fondé sur le refus de la société Entrepose de souscrire un projet de convention non conforme au cahier des charges ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.