REJET du pourvoi formé par :
- X... Jean-Yves, prévenu,
- la société Malouine et Granvillaise, civilement responsable,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Rennes, 3e chambre, en date du 5 septembre 1996, qui, dans les poursuites exercées contre Jean-Yves X... du chef d'importation réputée sans déclaration de marchandises prohibées ou fortement taxées, après relaxe du prévenu, a condamné celui-ci au paiement des droits fraudés et déclaré la société malouine et granvillaise, son employeur, civilement responsable.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur les faits,
Attendu qu'il ressort de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure, que Jean-Yves X..., employé de la société Malouine et Granvillaise, commissionnaire en douane, a procédé le 6 janvier 1992, pour le compte d'une société spécialisée dans le négoce de produits agro-alimentaires, au dédouanement d'un mélange de sons originaire d'Algérie, qu'il a déclaré à la position tarifaire 2302 30 10, comme son de froment ayant une teneur en amidon inférieure ou égale à 28 % en poids ;
Qu'à la demande du service des douanes un représentant de la société Malouine et Granvillaise a accepté que soient prélevés des échantillons représentatifs de la marchandise ;
Que, l'analyse de ces échantillons ayant fait apparaître une teneur en amidon de 29,1 %, supérieure à celle admise, une infraction de fausse déclaration d'espèce a été notifiée au commissionnaire en douane et à l'importateur, lesquels ont contesté l'appréciation de l'Administration et sollicité, sur le fondement des articles 104 et 441 du Code des douanes, la consultation de la Commission de conciliation et d'expertise douanière (CCED) ;
Que, cette commission ayant conclu que la marchandise litigieuse, pour avoir une teneur en amidon supérieure à 28 % devait être classée, non à la position 2302 30 10, mais à la position 2302 30 90, Jean-Yves X... et la société Malouine et Granvillaise ont été cités devant la juridiction correctionnelle, par l'Administration, sur le fondement des articles 426 et 414 du Code des douanes, pour fausse déclaration d'espèce ayant eu pour but ou pour effet d'éluder des prélèvements agricoles ;
En cet état,
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 7, 60, 104-1, 414 et 441 du Code des douanes, 385 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a condamné solidairement la société SMG et Jean-Yves X... au paiement de droits prétendument éludés ;
" aux motifs que la société SMG et Jean-Yves X... ne sont pas recevables à invoquer la nullité des prélèvements d'échantillons, la nullité de l'analyse et la nullité de procédure devant la Commission de Conciliation et d'Expertise Douanière, faute d'avoir invoqué in limine litis ces nullités ; que les constatations faites par cette commission, à partir de l'analyse effectuée par le laboratoire des douanes sur les échantillons prélevés par le service lors de l'exercice de son droit de visite et de communication, sont suffisamment probantes d'une teneur en amidon supérieure à 28 % ;
" alors que dans leurs conclusions régulièrement déposées en première instance (E. 5), les demandeurs s'étaient plaints in limine litis de l'absence de prélèvement des échantillons dans les conditions prévues par l'article 441-1 du Codes douanes, par les dispositions du décret n° 71-209 du 18 mars 1971 et par les directives européennes, ce que les énonciations du jugement ne démentent pas ; que les énonciations des notes d'audience ne sauraient suppléer ou contredire les énonciations des conclusions ou du jugement quant à la preuve de la présentation in limine litis d'une exception ; que de surcroît en l'espèce, il ne ressort nullement des notes d'audience (E. 6, E. 7, E. 8) que les demandeurs aient abordé le fond avant de soulever l'exception de procédure " ;
Attendu qu'il ressort de l'examen des pièces de procédure que, si le prévenu a fait valoir, dans ses conclusions de première instance, que la prise d'échantillons avait précédé et non suivi la contestation élevée par l'Administration, en méconnaissance de la lettre de l'article 441-1 du Code des douanes, il a cependant conclu, non à la nullité de la procédure, mais à la nécessité d'un complément d'expertise confié à la CCED sur le fondement de l'article 447-2 du Code précité ;
Attendu qu'en cet état, et dès lors, d'une part, que le prévenu n'a formellement invoqué la nullité de la procédure que pour la première fois en cause d'appel, et, que d'autre part, il ne démontrait pas en quoi la prise des échantillons dans un ordre inverse à celui prévu par les articles 104 et 441 du Code des douanes, mais non prescrit à peine de nullité, avait porté préjudice à ses intérêts, le demandeur ne saurait se faire un grief de la réponse donnée par la Cour à l'incident ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 369-4 et 377 bis du Code des douanes, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué après avoir relaxé la société SMG et son préposé Jean-Yves X... des fins de la poursuite engagée par l'administration des Douanes, les a condamnés solidairement au paiement des droits de douane éludés ;
" aux motifs qu'en vertu de l'article 369 du Code des douanes, les tribunaux ne peuvent dispenser le redevable du paiement des sommes fraudées ; qu'il leur appartient dans ce cas, en dépit de la relaxe, de statuer sur le paiement des droits ; qu'en raison du tarif douanier applicable, le surplus des droits incombant au déclarant en douane s'élève à la somme de 243 261 francs ;
" alors qu'il résulte des dispositions combinées des articles 369-4 et 377 bis du Code des douanes, dans la rédaction issue de la loi de finance rectificative du 30 décembre 1991, que la juridiction répressive, lorsqu'elle est saisie d'une demande de l'administration des Douanes, ne peut, même en cas de relaxe, dispenser le redevable du paiement des sommes qu'elle reconnaît fraudées ou indûment obtenues ; qu'en l'espèce, la cour d'appel ne pouvait pas condamner le commissonnaire en douanes et son préposé en l'absence de fraude établie tant de leur part l'arrêt relevant que la déclaration en douane avait été faite de bonne foi " compte tenu des justificatifs (...) desquels résultait un taux d'amidon n'excédant pas 28 % " que de celle de l'importateur les demandeurs ayant soutenu, sans être contredits, que leur client avait acquis une marchandise vendue comme étant du son dont le taux d'amidon était inférieur à 28 % au vu d'un certificat d'inspection et qu'il avait revendu la marchandise avec la même indication " ;
Attendu que, pour condamner Jean-Yves X... et la société Malouine et Granvillaise, sur le fondement des articles 369-4 et 377 bis du Code des douanes, au paiement des droits fraudés, les juges du second degré observent que la marchandise a été dédouanée sous une position tarifaire erronée, les conclusions de la CCED, étant corroborées par les résultats de l'analyse de ces mêmes produits, effectuée à la demande de l'importateur lui-même, par un laboratoire privé, laissant apparaître une teneur en amidon de 28,45 % également supérieure au seuil admis ;
Que les juges ajoutent que, si la bonne foi de Jean-Yves X... peut être retenue, les documents que l'importateur lui a fait parvenir, en même temps que ses instructions de dédouanement, étant de nature à l'avoir trompé, il demeure néanmoins, avec son employeur, redevable des droits éludés résultant du dédouanement de la marchandise sous une position tarifaire erronée ;
Attendu qu'en prononçant ainsi la cour d'appel a fait l'exacte application des articles 369-4 et 377 bis visés au moyen et justifié sa décision ;
Qu'ainsi, le moyen ne peut qu'être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.