Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 26 janvier 1993), que Mme Y... a travaillé comme secrétaire réceptionniste à partir du 8 octobre 1984, d'abord à mi-temps au service de M. X..., docteur en médecine, puis à temps complet au service de la SCM Basse-Le-Reun, constituée en novembre 1986 ; qu'après avoir fait l'objet, le 29 septembre 1989, d'une mise à pied conservatoire, elle a été licenciée pour fautes lourdes par une lettre du 6 octobre 1989, lui reprochant d'avoir tenu des propos portant atteinte à l'honorabilité du docteur X... auprès de certains patients, ainsi que des propos désobligeants ou injurieux à l'égard de certains patients, et d'avoir favorisé le détournement de la clientèle du docteur X... ; qu'elle a engagé une instance prud'homale afin d'obtenir le paiement de diverses sommes à titre de salaires, d'indemnités de congés payés, de préavis et de licenciement et à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive ;
Sur le premier moyen :
Attendu que Mme Y... fait grief à l'arrêt d'avoir dit le licenciement fondé sur une faute grave et de l'avoir déboutée de l'ensemble de ses demandes à l'exception de celle relative aux indemnités de congés payés, alors, selon le moyen, qu'elle avait soutenu dans ses conclusions qu'étant chargée par le docteur X... de nettoyer les seringues de mésothérapie à usage unique dont il se servait, elle s'était exprimée sur ses conditions de travail et s'était bornée à émettre une opinion sur la réutilisation par ce médecin des aiguilles souillées par une première utilisation et sur les risques de contamination qui en résultaient pour les patients et pour elle-même, compte tenu de ses conditions de travail ; qu'elle avait fait valoir que les propos visés dans la lettre de licenciement correspondaient à l'exercice normal par le salarié du droit d'expression qui lui est reconnu par la loi et par la jurisprudence ; qu'en statuant comme elle l'a fait sans répondre à ces conclusions, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que la cour d'appel a relevé que la salariée avait déclaré en public, alors qu'elle se trouvait dans une agence bancaire ou dans des fonds de commerce du quartier, que le docteur X..., qui soignait notamment des homosexuels, dont certains étaient atteints du SIDA, ne prenait pas les mesures nécessaires à la stérilisation des aiguilles qu'il utilisait, ce qui pouvait entraîner la transmission du virus ; qu'elle a constaté que ces propos, qui n'étaient étayés par aucun élément, avaient pour but de ruiner la réputation du docteur X... ; qu'il résulte de ces énonciations que les propos litigieux, tenus à l'extérieur de l'entreprise, ne pouvaient constituer l'exercice du droit d'expression prévu par l'article L. 461-1 du Code du travail, mais qu'il s'agissait d'imputations caractérisant un abus de la liberté d'expression reconnue au salarié ; que la cour d'appel a ainsi répondu aux conclusions invoquées ;
Sur les deuxième et troisième moyens réunis :
Attendu que Mme Y... fait aussi grief à l'arrêt d'avoir statué comme il l'a fait, alors, selon le deuxième moyen, d'une part, que les dispositions de la convention collective ne concernent que le personnel médical ayant accès aux dossiers des malades ; que les fonctions de Mme Y... se bornaient à recevoir les malades, à répondre au téléphone et à nettoyer les aiguilles ; qu'elle n'avait pas accès aux dossiers des malades et n'était pas tenue de respecter le secret professionnel ; alors, d'autre part, que, pour retenir la violation de ce secret, la cour d'appel a fait état de simples rumeurs circulant chez des commerçants sans citer ses sources ; et alors, enfin, selon le troisième moyen, qu'il appartenait aux juges du fond de rechercher si les pratiques médicales du docteur X... présentaient un risque pour Mme Y... et pour les patients ; qu'en se bornant à dire que le fait que le docteur X... n'utilisait pas des aiguilles jetables n'était d'aucun intérêt, en affirmant seulement qu'une secrétaire-réceptionniste n'avait pas à porter un jugement sur les pratiques du médecin qui l'employait, la cour d'appel n'a pas rempli sa mission ;
Mais attendu, d'abord, que l'obligation qui est faite au personnel des cabinets médicaux, par l'article 50 de la Convention collective nationale du 14 octobre 1981, d'observer une discrétion absolue à l'égard des malades et de leur entourage s'applique indistinctement à tous les salariés d'un cabinet médical, qu'ils aient ou non accès aux dossiers des malades ;
Attendu, ensuite, que la cour d'appel a précisé que la preuve des indiscrétions commises par Mme Y... résultaient des attestations produites et de la mesure d'instruction diligentée par les premiers juges ;
Et attendu, enfin, que, dès lors qu'elle avait retenu l'existence d'une violation de l'obligation de discrétion et d'une volonté délibérée de nuire à la réputation de l'employeur, la cour d'appel n'était pas tenue de procéder à la recherche invoquée ;
D'où il suit que les moyens, qui manquent en fait pour partie, ne sont pas fondés pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.