Attendu que, le 28 mars 1994, la société Dassault a notifié aux délégués syndicaux centraux de l'entreprise ainsi qu'aux secrétaires et élus des comités d'établissement sa décision " de dénoncer l'usage relatif au montant du budget d'oeuvres sociales et culturelles versé aux comités d'établissement " ; qu'elle précisait dans la même correspondance que ce budget serait fixé désormais à 3 % de la masse salariale au lieu de 5 % et que la dénonciation prendrait effet à compter du 1er janvier 1995 ; que le comité d'établissement d'Argonay a fait assigner la société Dassault aviation et son établissement d'Argonay à l'effet d'obtenir que la société soit tenue de lui verser en application de l'article L. 432-9 du Code du travail une somme égale à 5 % de la masse salariale et, subsidiairement, que la société soit tenue de lui verser en application de l'article R. 432-11 du même Code une somme au moins égale à la contribution la plus importante versée au cours des trois années précédant la mise en application de la décision du 28 mars 1994 ;
Sur le premier moyen :
Attendu que le comité d'établissement d'Argonay de la société Dassault aviation fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir débouté de sa demande tendant au maintien du versement à son profit par ladite société de la subvention des activités sociales et culturelles de l'article L. 432-9 du Code du travail au taux de 5 % de la masse salariale de l'établissement alors, selon le moyen, qu'il résulte des constatations de l'arrêt attaqué que, dès l'origine, au 1er janvier 1946, le montant du budget des oeuvres sociales du comité d'entreprise nouvellement créé était fixé à 5 % du total des rémunérations des personnels productifs et improductifs, que dès lors ainsi que le soulignait le comité d'établissement, il appartenait à la société de démontrer que ce taux ne résultait pas d'une obligation légale mais d'un usage éventuel, et d'établir si des dépenses sociales avaient été antérieurement exposées, seule l'entreprise détenant les éléments financiers et comptables permettant de vérifier le taux légal de subvention des activités sociales et culturelles, qu'en se bornant à affirmer, de ce chef, qu'il n'était pas établi que des sommes aient été affectées aux dépenses sociales et culturelles, la cour d'appel a violé l'article L. 432-9 du Code du travail ; alors, en toute hypothèse, que la cour d'appel, qui n'a pas répondu aux conclusions du comité d'établissement, de ce chef, n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; alors, en outre, que dans ses conclusions d'appel, la société Dassault aviation relevait qu'il était absolument certain que Marcel X... avait, durant la période de 1943 à 1945, le souci de développer à concurrence de 5 % des salaires les oeuvres sociales offertes aux salariés de son entreprise, que le motif susvisé procède donc d'une méconnaissance des termes du litige, en violation de l'article 4 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu qu'appréciant souverainement les éléments de preuve qui lui étaient soumis, la cour d'appel a relevé qu'il n'était pas établi que des sommes étaient affectées aux dépenses sociales de l'entreprise avant la création des comités d'entreprise ; qu'elle en a exactement déduit, sans encourir aucun des griefs du moyen, que les conditions d'application de l'article L. 432-9 du Code du travail, qui fixe la contribution minimale de l'employeur sur la base des sommes affectées aux dépenses sociales de l'entreprise au cours des trois dernières années précédant la prise en charge des activités sociales et culturelles par le comité d'entreprise, n'étaient pas remplies ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen, pris en sa deuxième branche : (sans intérêt) ;
Mais sur le second moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article R. 432-11 du Code du travail ;
Attendu que l'employeur peut dénoncer un usage ou un accord conclu avec le comité d'entreprise ou d'établissement, ayant pour objet de fixer sa contribution aux activités sociales et culturelles du comité, à la condition que cette dénonciation n'ait pas pour effet de réduire la subvention de l'entreprise en dessous des minima fixés, soit par une convention collective, soit par les articles L. 432-9 et R. 432-11.1, alinéa 2, du Code du travail ; que, dans ce dernier cas, le chiffre le plus avantageux atteint au cours des trois dernières années précédant la dénonciation n'est maintenu qu'autant que la masse salariale reste constante et que, si celle-ci diminue, la contribution subit la même variation ;
Attendu que pour rejeter la demande subsidiaire du comité d'établissement d'Argonay de la société Dassault aviation fondée sur les dispositions de l'article R. 432-11 du Code du travail, la cour d'appel a énoncé que l'article R. 432-11 permettait au ministre du Travail de déterminer par voie de décret les conditions de financement des oeuvres sociales dans les entreprises où les sommes mises à la disposition du comité d'entreprise ne permettent pas d'assurer le fonctionnement normal des oeuvres, que toutefois aucun décret n'ayant été pris, le comité d'établissement d'Argonay de la société Dassault aviation ne pouvait se prévaloir de cet article ;
Attendu, cependant, que l'article R. 432-11 ne se borne pas à prévoir qu'un décret peut déterminer les conditions de financement des institutions sociales dans les entreprises où les sommes mises à la disposition du comité d'entreprise ne permettent pas d'assurer le fonctionnement normal des institutions sociales, mais fixe la contribution minimale de l'employeur aux activités sociales et culturelles du comité ;
D'où il suit qu'en statuant comme elle l'a fait, par un motif inopérant, alors que la dénonciation par l'employeur de l'usage ayant pour objet de fixer sa contribution aux activités sociales et culturelles du comité ne pouvait avoir pour effet de réduire la contribution de l'entreprise en dessous du minimum fixé par l'article R. 432-11 du Code du travail, la cour d'appel a violé les dispositions de cet article ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 26 septembre 1995, entre les parties, par la cour d'appel de Chambéry ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble.