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17/06/1997 | FRANCE | N°95-83010

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 17 juin 1997, 95-83010


REJET du pourvoi formé par :
- X... Pedro,
contre l'arrêt de la cour d'appel d'Amiens, 6e chambre, en date du 3 mars 1995, qui l'a condamné pour homicide involontaire et infraction aux règles relatives à la sécurité des travailleurs, à 15 jours d'emprisonnement avec sursis et 20 000 francs d'amende et qui a prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Vu les mémoires ampliatif et additionnel produits ;
Sur le moyen de cassation, pris de la violation des articles 591 et 593 du Code de procédure pénale, L. 263. 2. 1 du Code du travail, 121-1 et 221-6 du Code pénal

, 25 du décret du 23 août 1947, défaut de motifs et manque de base légale :
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REJET du pourvoi formé par :
- X... Pedro,
contre l'arrêt de la cour d'appel d'Amiens, 6e chambre, en date du 3 mars 1995, qui l'a condamné pour homicide involontaire et infraction aux règles relatives à la sécurité des travailleurs, à 15 jours d'emprisonnement avec sursis et 20 000 francs d'amende et qui a prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Vu les mémoires ampliatif et additionnel produits ;
Sur le moyen de cassation, pris de la violation des articles 591 et 593 du Code de procédure pénale, L. 263. 2. 1 du Code du travail, 121-1 et 221-6 du Code pénal, 25 du décret du 23 août 1947, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Pedro X... coupable des faits qui lui étaient reprochés et l'a condamné à 15 jours d'emprisonnement avec sursis et 20 000 francs d'amende ;
" aux motifs adoptés des premiers juges que la manutention de l'appareillage entrait dans le cadre de l'ensemble des opérations de maintenance dont Pedro X... avait la responsabilité en sa qualité de chef du département décapage et laminage ; que, même si certaines négligences ont été commises par des subalternes, il n'en demeure pas moins que l'absence de mode opératoire défini concrètement avant l'exécution d'une opération incluse dans l'ensemble des travaux de maintenance, prévus pendant le mois d'août 1991, constitue une faute personnelle de Pedro X... ; que la faute est d'autant plus caractérisée que l'opération envisagée nécessitait le choix d'une équipe spécialisée nantie des consignes particulières outre l'utilisation d'un matériel mieux approprié, et qu'une telle organisation pouvait et devait être prévue dès avant le départ de Pedro X... en vacances ;
" aux motifs propres que " l'accident mortel du travail en cause est survenu le 6 août 1991, vers 9 heures 15, dans le département décapage-laminage du site de Montataire de la société Sollac ; que la victime Jean-Louis Y..., 36 ans, était opérateur P1 sur la ligne de décapage et travaillait pour le compte de la société Sollac depuis le 5 novembre 1973 ; qu'il a été blessé mortellement en raison du déséquilibre puis de la chute au cours d'une opération de manutention d'un équipement de montage ; qu'à la période des faits Pedro X... était chef du département de décapage-laminage et titulaire pour son département d'une délégation de pouvoirs en matière d'hygiène et de sécurité " ; que l'alinéa 3 du décret du 13 août 1947 prévoyait qu'un agent devait constamment assurer la liaison entre le conducteur du pont roulant et les ouvriers au sol et qu'il devait se situer à un endroit d'où il puisse voir tout travailleur situé dans le champ d'action de l'appareil ; que cette prescription n'avait pas été observée au cours de la manoeuvre effectuée le 6 août, Z... étant à la fois opérateur actif dans les manoeuvres d'élingage et signaleur pour guider le pontier ; que la hauteur de l'appareil et la rareté de sa manipulation exigeaient un surcroît de précautions ; que, néanmoins, pour y procéder, quatre salariés venant d'entreprise de travail temporaire avaient été choisis : qu'ainsi le chef d'équipe avait agi trop vite et n'avait pas donné les consignes suffisantes et adéquates ; que l'ensemble des carences ayant entraîné l'accident ont été commises dans le cadre de l'ensemble des opérations de maintenance dont Pedro X... avait la responsabilité en sa qualité de chef du département décapage-laminage ; qu'il invoque ensuite une délégation de responsabilité ; mais que, si d'un côté la délégation de pouvoirs dont il est lui-même bénéficiaire est bien claire et précise, par contre d'un autre côté il ne peut justifier d'une délégation écrite qu'il aurait consentie à son subordonné et que la note qu'il cite, en date du 12 juin 1991, s'apparente plus à une note de service dans laquelle il donne des instructions ; qu'en raison de ces motifs et de ceux retenus par le tribunal et qui sont justifiés il convient de déclarer Pedro X... coupable ;
" alors, d'une part, que la délégation de pouvoirs n'obéit à aucune forme sacramentelle, de sorte qu'en se déterminant par la considération que l'expression " délégation de pouvoirs " n'ait pas été reprise par écrit, la cour d'appel prive sa décision de toute base légale au regard des textes susvisés ;
" alors, d'autre part, qu'en présence d'un document établi pour la période des congés payés, qui indiquait que M. A..., " ingénieur du service maintenance ", serait le pilote des travaux, qu'il devrait organiser toutes les réunions préparatoires, s'assurer de la disponibilité des moyens et superviser le déroulement de tous les travaux pendant la période d'arrêt, la cour d'appel ne pouvait à nouveau, sans priver sa décision de base légale, décider qu'un tel document n'aurait pas eu pour effet de transférer les compétences et les moyens nécessaires au subordonné du demandeur pour assumer la responsabilité des travaux litigieux pendant la fermeture de l'usine ;
" alors, enfin et subsidiairement que, s'agissant d'une manutention par pont roulant, les juges du fond ne pouvaient, sans ajouter au décret du 23 août 1947 des dispositions sur la qualification des intervenants qui n'y figurent aucunement, affirmer que le mode opératoire et les consignes à donner auraient relevé exclusivement de la compétence de Pedro X... avant son départ en vacances et exclu celle de son subordonné, M. A..., ingénieur chargé de la maintenance, de sorte que l'arrêt confirmatif attaqué ne caractérise pas légalement une faute personnelle de Pedro X... et se trouve privé de base légale au regard des textes susvisés " ;
Et sur le moyen additionnel pris de la violation des articles L. 263-1 du Code du travail, 121-1, 121-3 et 221-6 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, insuffisance de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Pedro X... coupable des faits qui lui étaient reprochés et l'a condamné à 15 jours d'emprisonnement avec sursis et 20 000 francs d'amende ;
" aux motifs propres et adoptés que la manutention de l'appareillage entrait dans le cadre des opérations dont ce chef d'établissement avait la responsabilité ; que la note de service ne définissait pas concrètement le mode opératoire de l'opération de manutention qui devait être accomplie pendant les vacances sous la responsabilité d'un ingénieur ; qu'il aurait appartenu à Pedro X... de choisir l'équipe spécialisée, de donner des consignes particulières et de définir le matériel approprié ; qu'ainsi le défaut d'intervention d'un agent de liaison entre le conducteur du pont roulant et les ouvriers chargés de poser les élingues était imputable au chef d'établissement, même si des fautes avaient pu être commises par des subalternes ;
" alors qu'il résulte d'une telle motivation que Pedro X..., en sa qualité de chef d'entreprise en cours de congés, avait accompli des diligences normales compte tenu de la situation en prenant une note de service sur des opérations à accomplir en son absence sous le contrôle d'un ingénieur et que la nature de sa mission et les moyens dont il disposait, pendant ses congés, au moment de l'accident, ne pouvaient aucunement le conduire à contrôler personnellement qu'une équipe de manutentionnaires composée de quatre personnes et non de trois et qu'il existait une liaison suffisante entre le conducteur du pont roulant et les personnes chargées de placer les élingues, de sorte qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés " ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué qu'un salarié de l'entreprise Sollac a trouvé la mort par écrasement lors de la manoeuvre d'un pont roulant destiné à déplacer un appareil de 2, 5 tonnes pour permettre l'entretien d'une cage de laminage ;
Attendu que Pedro X..., chef du département décapage-laminage et titulaire d'une délégation de pouvoirs en matière d'hygiène et de sécurité, a été attrait devant la juridiction correctionnelle sous la prévention d'infraction à l'article 25 du décret du 23 août 1947, concernant les appareils de levage, et d'homicide involontaire ;
Attendu que, pour le déclarer coupable de ces chefs, l'arrêt attaqué retient, par motifs propres et adoptés, que les prescriptions du décret susvisé ont été méconnues, le même ouvrier étant à la fois opérateur et signaleur et n'ayant pas une vue d'ensemble des autres opérateurs ; que, la manoeuvre prévue ayant un caractère exceptionnel, le mode opératoire aurait dû être concrètement défini avant l'exécution des travaux, d'autant que l'opération envisagée nécessitait une équipe spécialisée nantie de consignes particulières et non, comme en l'espèce, des salariés intérimaires ; que, pour écarter le moyen de défense tiré par Pedro X... d'une prétendue subdélégation de pouvoirs, les juges énoncent que la note du 12 juin 1991 qu'il invoque est une note de service qui ne contient aucune subdélégation de pouvoirs ;
Attendu qu'il résulte de ces constatations et énonciations, relevant de l'appréciation souveraine des juges, que le prévenu, pourvu de la compétence, de l'autorité et des moyens nécessaires à l'exercice de sa mission, n'a pas accompli, avant son départ en congés annuels, les diligences normales qui lui incombaient pour assurer le respect des règles relatives à la sécurité des travailleurs chargés d'effectuer en son absence les travaux prévus au cours de cette période et qui exigeaient des précautions particulières ; que ce manquement ayant concouru à la survenance de l'accident, la cour d'appel a justifié sa décision, tant au regard des articles 319 et 221-6 du Code pénal, que de son article 121-3, dans sa rédaction issue de la loi du 13 mai 1996 ;
D'où il suit, abstraction faite d'un motif erroné, mais surabondant, relatif à l'absence de preuve écrite de la subdélégation de pouvoirs, que les moyens ne sauraient être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 95-83010
Date de la décision : 17/06/1997
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

TRAVAIL - Hygiène et sécurité des travailleurs - Responsabilité pénale - Chef d'entreprise - Exonération - Cas - Délégation de pouvoirs - Salarié - Homicide involontaire - Faute - Inobservation des règlements - Défaut d'accomplissement des diligences normales (article 121-3 du Code pénal, rédaction issue de la loi du 13 mai 1996).

TRAVAIL - Responsabilité pénale - Chef d'entreprise - Exonération - Cas - Hygiène et sécurité des travailleurs - Délégation de pouvoirs - Salarié - Homicide involontaire - Inobservation des règlements - Faute - Défaut d'accomplissement des diligences normales (article 121-3 du Code pénal, rédaction loi du 13 mai 1996)

HOMICIDE ET BLESSURES INVOLONTAIRES - Faute - Inobservation des règlements - Réglementation sur la sécurité des travailleurs - Défaut d'accomplissement des diligences normales (article 121-3 du Code pénal, rédaction loi du 13 mai 1996)

Justifie sa décision au regard, tant des articles 319 ancien et 221-6 nouveau du Code pénal, que de son article 121-3, dans sa rédaction issue de la loi du 13 mai 1996, la cour d'appel qui relève que le prévenu, titulaire d'une délégation de pouvoirs et pourvu de la compétence, de l'autorité et des moyens nécessaires à l'exercice de sa mission, n'a pas accompli, avant son départ en congés annuels, les diligences normales qui lui incombaient pour assurer le respect des règles relatives à la sécurité des travailleurs chargés d'effectuer, en son absence, les travaux prévus au cours de cette période et qui exigeaient des précautions particulières, et que ce manquement a concouru à la survenance de l'accident. (1).


Références :

Code pénal 221-6, 319, 121-3 (rédaction loi du 13 mai 1996)

Décision attaquée : Cour d'appel d'Amiens, 03 mars 1995

CONFER : (1°). (1) Cf. Chambre criminelle, 1996-10-30, Bulletin criminel 1996, n° 389, p. 1131 (rejet) ;

Chambre criminelle, 1996-11-19, Bulletin criminel 1996, n° 413, p. 1200 (cassation).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 17 jui. 1997, pourvoi n°95-83010, Bull. crim. criminel 1997 N° 237 p. 788
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1997 N° 237 p. 788

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Le Gunehec
Avocat général : Avocat général : M. Dintilhac.
Rapporteur ?: Rapporteur : Mme Simon.
Avocat(s) : Avocat : la SCP Célice, Blancpain et Soltner.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1997:95.83010
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