Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Douai, 16 mai 1995), qu'une station de lavage de véhicules dépendant du réseau de la société Hypromat France (HF) a été installée dans une zone pavillonnaire résidentielle ; que, se plaignant de troubles anormaux de voisinage, des voisins, la SCI Soginorpa, les époux Z... et les époux X..., après avoir provoqué la désignation d'un expert en référé, ont assigné en réparation de leurs préjudices la société HF et la société Lavage 2000, exploitant de la station selon le contrat de franchise passé avec celle-ci ; que ces deux sociétés ont été condamnées in solidum à indemnisation ;
Sur le premier moyen du pourvoi principal :
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir retenu la responsabilité de la société HF, en tant que franchiseur, à l'égard des victimes de ces troubles, alors, selon le moyen, que le Tribunal, après avoir constaté que la responsabilité du franchiseur ne pouvait être engagée envers les voisins du franchisé sur le fondement de la théorie des troubles anormaux du voisinage, s'était prononcé " en dépit de l'absence de production aux débats du contrat de franchise définissant précisément les obligations respectives des parties contractantes ", tandis que la cour d'appel avait elle-même souligné dans son arrêt avant-dire droit l'intérêt, pour la solution du litige, de connaître le contrat de franchise qui avait été produit en cause d'appel ; que, cependant, la cour d'appel n'a examiné les obligations contractuelles de la société Hypromat France envers la société Lavage 2000 que dans le cadre de l'appel en garantie formé par celle-ci contre celle-là ; que, dès lors, en affirmant la responsabilité de la société Hypromat France, franchiseur, à l'égard des voisins de la société Lavage 2000, franchisé, sur le seul fondement des motifs du jugement exclusifs de tout examen des stipulations du contrat de franchise dont seule la méconnaissance aurait pu constituer également une faute engageant la responsabilité du franchiseur envers les tiers, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ;
Mais attendu que l'arrêt retient que l'implantation de la station était la conséquence de la légèreté des études effectuées par le franchiseur, qui, tant dans ses documents publicitaires à destination des futurs franchisés qu'aux termes du contrat de franchise, s'était engagé à l'égard du franchisé à une obligation d'assistance et de conseil dans le choix d'un terrain adapté à l'exploitation ;
Que, de ces constatations et énonciations, la cour d'appel a pu déduire que la société HF avait commis des fautes engageant sa responsabilité quasi délictuelle envers les voisins ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen du pourvoi principal :
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir réparti la charge pénale de la responsabilité à raison de deux tiers pour la société HF et d'un tiers pour le franchisé, alors, selon le moyen, d'une part, que le contrat de franchise stipule en préambule : " le franchisé reconnaît en outre prendre le risque d'ouvrir un centre sous sa seule responsabilité et sans garantie de succès ", et dans l'alinéa suivant : " en conséquence, le présent accord est destiné à décrire toutes les conditions pour l'exploitation, par le franchisé, d'un centre lui appartenant et géré sous sa seule responsabilité, mais en strict respect de la formule du franchiseur, et afin d'obtenir le meilleur chiffre d'affaires possible " ; qu'il en résulte que le franchisé s'est engagé à assurer sous sa seule responsabilité toutes les conséquences de la gestion du centre de lavage, y compris nécessairement les dommages causés aux tiers, ce qui caractérise bien une clause d'exclusion de garantie du franchiseur ; qu'en décidant le contraire, par référence uniquement à la première des deux phrases précitées sans la rapprocher de la seconde, la cour d'appel a méconnu la loi des parties et a ainsi violé l'article 1134 du Code civil ; d'autre part, qu'il résulte clairement des stipulations de l'article 4 du contrat de franchise relatives aux obligations du franchiseur que le rôle de conseil de ce dernier est strictement limité à l'appréciation de la rentabilité potentielle du site et que son rôle d'assistance à l'installation et à l'agencement consiste exclusivement à s'assurer que la station de lavage s'harmonise au réseau Hypromat ; qu'il résulte tout aussi clairement des stipulations de l'article 5 dudit contrat relatives aux obligations du franchisé que celui-ci ne peut ouvrir la station au public qu'après avoir reçu du franchiseur un certificat qui ne porte que sur la conformité de l'implantation et de l'aménagement aux standards du réseau Hypromat, à l'exclusion expresse de toute approbation du franchiseur concernant le terrain et les travaux, que le franchisé doit encore veiller au respect des lois et règlements en matière d'urbanisme, sanitaire, de sécurité et d'hygiène, et qu'il doit souscrire une assurance couvrant sa responsabilité civile ; qu'ainsi le contrat de franchise ne comporte aucune stipulation mettant à la charge du franchiseur une obligation particulière de conseil quant aux troubles que le franchisé serait susceptible d'occasionner aux voisins de l'exploitation ; qu'au surplus, une telle obligation s'apprécie en fonction des besoins de son bénéficiaire et ne saurait s'étendre à ce qu'il ne peut ignorer, ce qui est le cas des troubles anormaux de voisinage occasionnés par une station de lavage conçue pour être ouverte la nuit ; que, dès lors, en décidant qu'en ne fournissant pas à la société Lavage 2000 des éléments d'appréciation lui permettant de prendre sa décision d'implantation en toute connaissance de cause de tels troubles, la société Hypromat France avait manqué à une obligation de conseil et d'assistance qui ne résulte pas des stipulations contractuelles, la cour d'appel a violé l'article 1147 du Code civil ;
enfin que, et en toute hypothèse, en appréciant le partage de responsabilité entre la société Hypromat France et la société Lavage 2000 en fonction, non pas uniquement de la gravité respective de leurs fautes au regard de leurs obligations contractuelles réciproques, mais aussi de leur inégalité économique et technique, la cour d'appel s'est déterminée en équité et non en droit et, par ce motif inopérant, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du Code civil ;
Mais attendu que c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'interpréter le contrat de franchise que la cour d'appel, sans le dénaturer, a estimé que la société HF s'y était engagée à fournir à son franchisé son assistance et son conseil dans le choix d'un terrain adapté à l'exploitation de la station de lavage ;
Et attendu qu'en se référant au rôle déterminant qu'avait eu le franchiseur dans ce choix, qui était, en très grande partie, la conséquence de la légèreté des études qu'il avait effectuées, la cour d'appel, par ces seuls motifs propres et adoptés, n'a pas encouru le grief visé à la troisième branche du moyen ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le premier moyen du pourvoi incident :
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir retenu la responsabilité de la société Lavage 2000 à l'égard des victimes des troubles de voisinage, alors, selon le moyen, d'une part, qu'il résultait des documents soumis à la cour d'appel que la société Hypromat a conçu le centre de lavage et son fonctionnement sur un terrain par elle agréé sans réserve ; que cette implantation qualifiée " d'ineptie " par l'expert Y... traduit l'ampleur de son erreur ; que la société Hypromat a manqué gravement à ses obligations contractuelles d'assistance et de conseil vis-à-vis de la société Lavage 2000 ; qu'elle devait être seule déclarée responsable de la situation née d'une implantation qu'elle a conseillée, favorisée et organisée comme centre de lavage ; que, en retenant néanmoins une certaine responsabilité de la société Lavage 2000, la cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision au regard des articles 1147 et 1382 du Code civil ; d'autre part, que la cour d'appel a relevé l'obligation d'assistance et de conseil du franchiseur, l'absence de sa part de propositions d'éléments d'appréciation, l'expérience et la compétence du même franchiseur, la légèreté de ses études mais n'a constaté aucun manquement caractérisé de la société Lavage 2000 ; qu'elle a mis cependant une part de responsabilité à sa charge ; que la cour d'appel n'a pas, ce faisant, motivé sa décision et qu'elle a violé les articles 1382 du Code civil et 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que la réalité des troubles anormaux de voisinage dus à l'exploitation de son installation par la société Lavage 2000 n'étant pas contestée, le moyen est inopérant ;
Sur le second moyen du pourvoi incident :
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir fixé comme il l'a fait les indemnités réparant les préjudices, alors, selon le moyen, que dans ses conclusions d'appel, la société Lavage 2000 avait fait valoir que des travaux avaient été accomplis dans la station depuis le dépôt du rapport d'expertise et que les troubles avaient considérablement diminué ; que l'appartement des époux Z... avait été reloué et que l'immeuble des époux X... ne subissait plus de moins-value ; que la cour d'appel n'a pas répondu à ce moyen déterminant tiré de l'exécution d'ouvrages et de leur incidence sur le montant des dommages ; qu'elle a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que, par motifs propres et adoptés, l'arrêt relève qu'aucune solution efficace ne pouvait être apportée à la situation et qu'il n'était pas possible, au vu de l'ensemble des pièces et justifications versées aux débats, d'évaluer les préjudices autrement que ne l'avait fait le Tribunal ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois principal et incident.