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28/04/1997 | FRANCE | N°96-82607

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 28 avril 1997, 96-82607


REJET ET CASSATION PARTIELLE sur les pourvois formés par :
- X... Nadine, prévenue,
- l'administration des Douanes et Droits Indirects, partie poursuivante,
contre l'arrêt n° 98 de la cour d'appel de Saint-Denis-de-la-Réunion, chambre correctionnelle, en date du 11 avril 1996, qui, après avoir déclaré Nadine X... et la société SEFBF coupables d'infractions à la législation sur les contributions indirectes, a débouté partiellement l'Administration de ses demandes.
LA COUR,
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Sur les faits et la procédure :
At

tendu qu'il résulte des pièces de procédure que les agents de l'administration des D...

REJET ET CASSATION PARTIELLE sur les pourvois formés par :
- X... Nadine, prévenue,
- l'administration des Douanes et Droits Indirects, partie poursuivante,
contre l'arrêt n° 98 de la cour d'appel de Saint-Denis-de-la-Réunion, chambre correctionnelle, en date du 11 avril 1996, qui, après avoir déclaré Nadine X... et la société SEFBF coupables d'infractions à la législation sur les contributions indirectes, a débouté partiellement l'Administration de ses demandes.
LA COUR,
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Sur les faits et la procédure :
Attendu qu'il résulte des pièces de procédure que les agents de l'administration des Douanes et Droits Indirects, lors d'un contrôle effectué en juin 1994, ont établi que la société SEFBF, dirigée par Nadine X..., et placée depuis en liquidation judiciaire, exploitait 104 appareils automatiques de jeu, sans avoir acquitté la taxe sur les spectacles ;
Que Nadine X... et la société SEFBF, représentée par son liquidateur, citées comme prévenues, ont été reconnues coupables d'infraction à la législation sur les contributions indirectes ; que Nadine X... et la société SEFBF ont été condamnées solidairement au paiement de 104 amendes de 200 francs, et Nadine X... seule au paiement de la pénalité proportionnelle ; que l'administration a été déboutée de ses demandes tendant au paiement des droits fraudés ;
En cet état :
Io Sur le pourvoi de Nadine X... :
Attendu qu'aucun moyen n'est produit ;
IIo Sur le pourvoi de l'administration des Douanes et des Droits Indirects :
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation de l'article 1791 du Code général des impôts, des articles 47, 48, 50, 51 et 53 de la loi n° 85-98 du 25 janvier 1985, ensemble les articles 591 et 593 du Code de procédure pénale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré irrecevable la demande de l'administration des Douanes et droits indirects à l'encontre de la société SEFBF en paiement d'une pénalité proportionnelle ;
" aux motifs que, contrairement à ce que soutient l'administration des Douanes, l'action en paiement de la pénalité proportionnelle est assimilable à l'action civile, de sorte que cette Administration n'est pas recevable à réclamer, devant la juridiction répressive, la condamnation au paiement de la pénalité proportionnelle lorsque, comme en l'espèce, la prévenue a été soumise à une procédure de liquidation judiciaire et qu'elle n'a pas déclaré sa créance dans le cadre de la procédure collective, alors que celle-ci a une origine antérieure au jugement de liquidation judiciaire en date du 11 janvier 1995 ;
" alors que, premièrement, en matière de contributions indirectes, la mise en redressement judiciaire de la personne poursuivie, qu'elle le soit en qualité de prévenue ou de solidairement responsable, ne fait pas obstacle à ce qu'elle puisse être condamnée sur les poursuites de l'Administration à une pénalité proportionnelle ; qu'en effet, en raison de sa nature mixte et son objet répressif, les dispositions de la loi du 25 janvier 1985 ne sont pas applicables aux pénalités proportionnelles prévues par l'article 1791 du Code général des impôts ; que en décidant que l'administration des Douanes n'était pas recevable à demander le paiement d'une pénalité proportionnelle fondée sur l'article 1791 du Code général des impôts à la société SEFBF, les juges du fond ont violé les dispositions susvisées ;
" alors que, deuxièmement, et en tout cas, les juges du fond ne peuvent se borner à affirmer qu'un créancier n'a pas déclaré sa créance, adoptant en cela les prétentions du débiteur, sans examiner les pièces du dossier ni rechercher l'état de la procédure de liquidation judiciaire ; que, ce faisant, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard des textes susvisés " ;
Vu lesdits articles ;
Attendu qu'en matière de contributions indirectes la mise en redressement judiciaire de la personne poursuivie ne fait pas obstacle à ce qu'elle puisse être condamnée, sur les poursuites de l'Administration, aux amende, pénalité proportionnelle et confiscation prévues par l'article 1791 du Code général des impôts ;
Attendu que, pour déclarer irrecevable la demande de l'Administration tendant à la condamnation solidaire de la SEFBF avec Nadine X... au paiement de la pénalité proportionnelle, la cour d'appel énonce que cette pénalité, de nature civile, ne peut être prononcée par la juridiction répressive à l'encontre d'une société en liquidation judiciaire ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors que les amendes et les pénalités prévues par le texte précité, qui ont le double caractère d'une peine et d'une réparation civile, ne sont pas soumises aux dispositions des articles 47 et 48 de la loi du 25 janvier 1985, la cour d'appel a méconnu le texte et le principe rappelés ci-dessus ;
Que, dès lors, la cassation est encourue de ce chef ;
Et sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 1791, 1799 à 1800 et 1804 B du Code général des impôts, 126 B, annexe IV, du Code général des impôts, des articles 47, 48, 50, 51 et 53 de la loi n° 85-98 du 25 janvier 1985, ensemble les dispositions des articles 591 et 593 du Code de procédure pénale :
" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la demande de paiement de droits fraudés à l'encontre, d'une part, de Nadine X... et, d'autre part, de la société SEFBF ;
" aux motifs que, pour débouter l'administration des Douanes de sa demande de paiement des droits fraudés à l'encontre de Nadine X..., le tribunal a considéré que seule la société SEFBF était tenue au paiement des taxes, et que le simple fait qu'en sa qualité de gérante de la société elle puisse se voir reprocher l'infraction prévue par l'article 1791 du Code général des impôts n'implique pas pour autant qu'elle puisse être déclarée redevable personnellement des taxes impayées ; qu'en statuant ainsi, et alors, d'une part, que la société SEFBF était seule redevable du paiement des sommes fraudées au sens de l'article 1800 du Code général des impôts et, d'autre part, aux motifs qui précèdent que l'Administration ne peut lui réclamer cette réparation civile, les premiers juges l'ont justement déboutée de cette demande dirigée contre Nadine X... ;
" alors que, premièrement, l'infraction de non-paiement de la taxe sur les spectacles est caractérisée à l'encontre de Nadine X..., ès qualités de gérante de la société SEFBF, en ce qu'elle avait la charge, en cette qualité, de pourvoir au paiement de l'impôt ; qu'elle était, en conséquence, tenue solidairement du paiement des droits fraudés ; qu'en décidant de débouter l'administration des Douanes de sa demande en paiement des droits fraudés à l'encontre de Nadine X..., sans préciser en quoi le fait qu'en sa qualité de gérante de la société elle ne pouvait se voir reprocher l'infraction prévue par l'article 1791 du Code général des impôts, bien qu'elle en fût tenue solidairement, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard des dispositions susvisées ;
" alors que, deuxièmement, les juges du fond ne peuvent se borner à affirmer qu'un créancier n'a pas déclaré sa créance, adoptant en cela les prétentions du débiteur, sans examiner les pièces du dossier ni rechercher l'état de la procédure de liquidation judiciaire ; que, ce faisant, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard des textes susvisés " ;
Vu lesdits articles ;
Attendu qu'en vertu de l'article 1804 B du Code général des impôts, en matière de contributions indirectes, en plus des pénalités fiscales prévues aux articles 1791 à 1804 A de ce Code, le tribunal ordonne le paiement des sommes fraudées ou indûment obtenues à raison de l'infraction ;
Attendu que, pour dire n'y avoir lieu à condamner solidairement les prévenues au paiement des droits fraudés, la cour d'appel énonce que seule la société était redevable du paiement de ces droits, à l'exclusion de sa gérante, et que l'ouverture d'une procédure collective rend irrecevable la demande de l'Administration dirigée contre la société ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors que, si, en raison de son caractère de réparation civile, cette condamnation ne pouvait être prononcée à l'encontre de la société en liquidation, Nadine X..., condamnée sur le fondement de l'article 1791 du Code général des impôts, était personnellement tenue au paiement des droits fraudés, la cour d'appel a méconnu le principe susvisé ;
D'où il suit que la cassation est derechef encourue ;
Par ces motifs :
Io Sur le pourvoi de Nadine X... :
Le REJETTE ;
IIo Sur le pourvoi de l'administration des Douanes et Droits Indirects :
CASSE ET ANNULE, en ses seules dispositions ayant refusé de condamner la société SEFBF à la pénalité proportionnelle et Nadine X... au paiement des droits fraudés, l'arrêt de la cour d'appel de Saint-Denis-de-la-Réunion, en date du 11 avril 1996, toutes autres dispositions de l'arrêt demeurant expressément maintenues ;
Et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée :
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Paris.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 96-82607
Date de la décision : 28/04/1997
Sens de l'arrêt : Rejet et cassation partielle
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1° IMPOTS ET TAXES - Impôts indirects et droits d'enregistrement - Pénalités et peines - Pénalités - Pénalité proportionnelle - Prononcé - Prévenu placé en liquidation judiciaire - Conditions.

1° En matière de contributions indirectes, la mise en redressement judiciaire de la personne poursuivie ne fait pas obstacle à ce qu'elle puisse être condamnée, sur les poursuites de l'Administration, aux amende, pénalité proportionnelle et confiscation prévues par l'article 1791 du Code général des impôts. Ces pénalités, ayant le double caractère d'une peine et d'une réparation civile, ne sont pas soumises aux dispositions des articles 47 et 48 de la loi du 25 janvier 1985. Encourt, dès lors, la cassation l'arrêt qui déclare irrecevable la demande de l'Administration tendant à la condamnation à la pénalité proportionnelle d'une société poursuivie pour infraction à la législation sur les appareils de jeux automatiques, au motif que, cette société étant en liquidation, elle ne pourrait être condamnée au paiement de cette pénalité(1).

2° IMPOTS ET TAXES - Impôts indirects et droits d'enregistrement - Pénalités et peines - Condamnations pécuniaires - Condamnation au paiement des sommes fraudées ou indûment obtenues - Société en liquidation judiciaire - Condamnation de son dirigeant - Conditions.

2° Selon l'article 1804 B du Code général des impôts, en matière de contributions indirectes, en plus des pénalités fiscales prévues par les articles 1791 à 1804 A de ce Code, le tribunal ordonne le paiement des sommes fraudées ou indûment obtenues à raison de l'infraction. Une telle condamnation, qui présente le caractère d'une réparation civile, ne peut être prononcée contre une société en liquidation judiciaire. Cependant, le dirigeant de la société, reconnu personnellement coupable de l'infraction définie par l'article 1741 du Code général des impôts, doit être également condamné au paiement des droits fraudés. Encourt, dès lors, la cassation, l'arrêt qui, après avoir déclaré une société et sa gérante coupables d'infractions à la législation sur les appareils de jeux automatiques, retient que seule la société est redevable du paiement des droits fraudés, à l'exclusion de sa gérante(2).


Références :

1° :
1° :
2° :
CGI 1791
CGI 1804 B, 1791, 1804 A, 1741
Loi 85-91 du 25 janvier 1985 art. 47, art. 48

Décision attaquée : Cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion (chambre correctionnelle), 11 avril 1996

CONFER : (1°). (1) Cf. Chambre criminelle, 1980-01-07, Bulletin criminel 1980, n° 9, p. 19 (rejet et cassation partielle) ;

Chambre criminelle, 1995-05-11, Bulletin criminel 1995, n° 173, p. 481 (rejet), et les arrêts cités ;

Chambre criminelle, 1996-04-29, Bulletin criminel 1996, n° 173, p. 489 (rejet et cassation partielle par voie de retranchement sans renvoi), et les arrêts cités. CONFER : (2°). (2) Cf. Chambre criminelle, 1982-05-03, Bulletin criminel 1982, n° 108, p. 301 (cassation) ;

Chambre criminelle, 1988-11-03, Bulletin criminel 1988, n° 367, p. 957 (cassation) ;

Chambre criminelle, 1993-11-15, Bulletin criminel 1993, n° 336, p. 839 (cassation) ;

Chambre criminelle, 1996-04-29, Bulletin criminel 1996, n° 173, p. 489 (rejet et cassation partielle par voie de retranchement sans renvoi), et les arrêts cités.


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 28 avr. 1997, pourvoi n°96-82607, Bull. crim. criminel 1997 N° 149 p. 497
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1997 N° 149 p. 497

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Culié, conseiller le plus ancien faisant fonction.
Avocat général : Avocat général : M. Le Foyer de Costil.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. de Larosière de Champfeu.
Avocat(s) : Avocat : M. Foussard.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1997:96.82607
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