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12/03/1997 | FRANCE | N°96-86596

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 12 mars 1997, 96-86596


REJET des pourvois formés par :
- X... Yvon :
1° contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel d'Orléans, en date du 30 mai 1996, qui, dans l'information suivie contre lui pour vols et tentative de vol avec arme, a rejeté sa demande en annulation d'actes de la procédure ;
2° contre l'arrêt de ladite chambre d'accusation, en date du 14 novembre 1996, qui l'a renvoyé devant la cour d'assises du Loiret sous l'accusation de vols avec arme.
LA COUR,
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu le mémoire produit ;
I. Sur le pourvoi formé

contre l'arrêt du 30 mai 1996 :
Sur le premier moyen de cassation, pris de la ...

REJET des pourvois formés par :
- X... Yvon :
1° contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel d'Orléans, en date du 30 mai 1996, qui, dans l'information suivie contre lui pour vols et tentative de vol avec arme, a rejeté sa demande en annulation d'actes de la procédure ;
2° contre l'arrêt de ladite chambre d'accusation, en date du 14 novembre 1996, qui l'a renvoyé devant la cour d'assises du Loiret sous l'accusation de vols avec arme.
LA COUR,
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu le mémoire produit ;
I. Sur le pourvoi formé contre l'arrêt du 30 mai 1996 :
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 63-4, 170 à 174 et 593 du Code de procédure pénale, ensemble violation des droits de la défense et du principe de l'égalité des justiciables, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué de la chambre d'accusation de la cour d'appel d'Orléans du 30 mai 1996 a refusé de prononcer la nullité des procès-verbaux de garde à vue d'Yvon X... ainsi que de toute la procédure subséquente ;
" aux motifs que la décision prise collectivement par un barreau de suspendre toute participation des avocats au service des commissions d'office constitue une circonstance insurmontable à l'exercice du droit de demander la commission d'office d'un avocat ; que, si au moment de l'expiration de la vingtième heure de garde à vue les policiers se trouvaient en transport de justice depuis 12 h 30 dans les Hauts-de-Seine, c'est en raison du refus du bâtonnier de l'Ordre des avocats d'Orléans et, sachant que ce droit ne pourrait être exercé, que la décision fut prise d'organiser un transport sans qu'il y ait lieu d'aviser le bâtonnier d'un autre ressort ; que la loi ne fait aucune obligation à l'officier de police judiciaire de mettre à sa disposition un tableau de l'Ordre, mais l'oblige seulement à contacter l'avocat désigné ou le bâtonnier, ce à quoi il a été satisfait ;
" alors, d'une part, que l'entretien avec un avocat, soit choisi, soit commis d'office, constitue une formalité substantielle, dont la violation porte nécessairement atteinte aux intérêts de la personne qu'elle concerne, au principe de l'égalité des justiciables et aux droits de la défense ; qu'en l'espèce, faute de pouvoir obtenir la désignation par le bâtonnier d'un avocat commis d'office en raison de la décision prise collectivement par un barreau de suspendre toutes commissions d'office, l'officier de police judiciaire devait mettre la personne gardée à vue en mesure de désigner sur le tableau de l'Ordre des avocats un avocat intervenant à titre personnel ; que les procès-verbaux de garde à vue doivent donc être annulés pour violation d'une formalité substantielle ainsi que la procédure subséquente ;
" alors, d'autre part, que, aux termes de l'article 63-4 du Code de procédure pénale, le gardé à vue peut s'entretenir avec un avocat lorsque vingt heures se sont écoulées depuis le début de la mesure ; qu'en l'espèce la chambre d'accusation a constaté que les services de police, après avoir tenté en vain d'obtenir un avocat commis d'office 2 heures avant la vingtième heure, n'ont pas vérifié, à la vingtième heure de garde à vue, si la suspension des commissions d'office par le barreau d'Orléans était maintenue ou si un avocat pouvait être commis d'office par le bâtonnier de l'Ordre du ressort dans lequel le gardé à vue avait été transporté ; que, en décidant néanmoins qu'il avait été satisfait aux obligations de l'article 63-4 du Code de procédure pénale, l'arrêt attaqué ne se trouve pas légalement justifié " ;
Attendu que, pour rejeter la demande en annulation d'Yvon X..., l'arrêt attaqué énonce que, l'intéressé ayant demandé à s'entretenir avec un avocat commis d'office lors de son placement en garde à vue, le 3 août 1993, à 17 h 10, l'officier de police judiciaire a pris contact, le 4 août à 11 h 15, avec le bâtonnier de l'Ordre des avocats d'Orléans qui lui a fait savoir que, conformément à une décision prise en assemblée générale du barreau, le service des commissions d'office était suspendu et qu'aucun avocat ne se déplacerait ; que la chambre d'accusation ajoute qu'en raison de l'information fournie par le bâtonnier le transport dans le département des Hauts-de-Seine a été mis en oeuvre à 12 h 30, sans qu'il y ait eu lieu de prendre contact avec le bâtonnier du ressort concerné ; qu'enfin, les juges énoncent que l'article 63-4 du Code de procédure pénale ne fait pas obligation à l'officier de police judiciaire de mettre le tableau de l'Ordre des avocats à la disposition de la personne gardée à vue ;
Attendu qu'en cet état la chambre d'accusation n'a pas méconnu les dispositions de l'article 63-4 du Code de procédure pénale, dès lors que, d'une part, la décision prise collectivement par un barreau de suspendre toute participation des avocats au service des commissions d'office constitue une circonstance insurmontable, que, d'autre part, il ne résulte d'aucune pièce de la procédure qu'Yvon X..., averti de l'impossibilité d'être pourvu d'un avocat d'office, ait manifesté la volonté de désigner un avocat personnel et qu'enfin, a seul qualité pour commettre d'office un avocat le bâtonnier du ressort dans lequel la personne a été placée en garde à vue ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 6, § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué de la chambre d'accusation de la cour d'appel d'Orléans du 30 mai 1996 a refusé de prononcer la nullité des procès-verbaux de garde à vue d'Yvon X... ainsi que de toute la procédure subséquente ;
" aux motifs que les arguments relatifs aux conditions de présentation aux témoins en septembre 1995 lors du tapissage, aux conditions dans lesquelles l'emploi du temps a été vérifié et les difficultés pour obtenir une confrontation avec Mohand Y... sont inopérants en l'espèce, dans la mesure où les dispositions de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme ont pour objet d'assurer le respect des droits de la défense devant la juridiction de jugement où ces droits demeurent entiers ;
" alors que toute personne tient de l'article 6, § 1 de la Convention européenne un droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, par un tribunal indépendant et impartial ; que constitue un " tribunal ", au sens de la Convention, le magistrat instructeur, juridiction d'instruction du premier degré, habilité par la loi à exercer les fonctions judiciaires et, à ce titre, à rendre des ordonnances ; que, dès lors, la juridiction d'instruction est, au même titre que toute juridiction de jugement, soumise à l'exigence d'impartialité qui résulte notamment de son indépendance et de l'obligation pesant sur elle d'instruire à charge et à décharge, et qui est la garantie du respect des droits de la défense ; qu'en l'espèce, en décidant que les droits reconnus par l'article 6, § 1 de la Convention ne trouvent pas application devant la juridiction d'instruction, l'arrêt a violé, par fausse application, le texte susvisé " ;
Attendu que le demandeur ne saurait se faire un grief des motifs par lesquels la chambre d'accusation a refusé d'examiner les exceptions de nullité qu'il soulevait, dès lors que l'audition des témoins, non suivie de leur confrontation avec la personne mise en examen, n'est de nature à entraîner la nullité de la procédure ni sur le fondement du droit interne ni sur celui de la Convention européenne des droits de l'homme ;
Que le défaut de confrontation à ce stade de la procédure n'a pour autre conséquence, au regard des articles 427 et suivants et 323 et suivants du Code de procédure pénale ainsi que de l'article 6, § 3. d de la Convention précitée, que d'ouvrir la faculté au prévenu ou à l'accusé, qui comparaît devant la juridiction de jugement, de citer lesdits témoins, pour permettre qu'il soit contradictoirement discuté de ces éléments de preuve ;
D'où il suit que le moyen ne peut être admis ;
II. Sur le pourvoi formé contre l'arrêt du 14 novembre 1996 :
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 214, 215 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué de la chambre d'accusation de la cour d'appel d'Orléans du 14 novembre 1996 a prononcé la mise en accusation d'Yvon X... du chef de vol à main armée ;
" alors, d'une part, que, dans son mémoire régulièrement déposé, le demandeur faisait valoir que les descriptions des auteurs du vol commis à Marcilly-en-Villette, données par les témoins, ne correspondaient pas à son apparence physique ; qu'en omettant de répondre à cet argument l'arrêt de mise en accusation, qui se fonde pourtant exclusivement sur ces témoignages, se trouve privé de base légale ;
" alors, d'autre part, que l'appréciation des charges par les chambres d'accusation cesse d'être souveraine lorsqu'elle résulte de motifs insuffisants ; qu'en l'espèce, après avoir relevé les charges pesant sur Mohand Y... d'avoir commis le vol à main armée de Thénezay, les juges du fond se sont fondés, pour prononcer la mise en accusation d'Yvon X... pour les mêmes faits, sur la circonstance que les co-mis en examen se connaissaient, d'où ils ont inféré la participation du demandeur à l'infraction ; qu'en se déterminant de la sorte, la chambre d'accusation n'a pas légalement justifié sa décision " ;
Attendu que les motifs de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la chambre d'accusation, après avoir exposé les faits et répondu, comme elle le devait, aux articulations essentielles du mémoire dont elle était saisie, a relevé, contre Yvon X..., l'existence de charges qu'elle a estimé suffisantes pour ordonner son renvoi devant la cour d'assises, sous l'accusation de vols avec arme ;
Qu'en effet il résulte des articles 214 et 215 du Code de procédure pénale que les chambres d'accusation apprécient souverainement si les faits retenus à la charge de la personne mise en examen sont constitutifs d'une infraction, en tous ses éléments légaux, tant matériels qu'intentionnel, la Cour de Cassation n'ayant d'autre pouvoir que de vérifier, à supposer ces faits établis, si leur qualification justifie la saisine de la juridiction de jugement ;
Que, tel étant le cas en l'espèce, le moyen ne peut qu'être écarté ;
Et attendu que la chambre d'accusation était compétente ; qu'il en est de même de la cour d'assises devant laquelle Yvon X... est renvoyé ; que la procédure est régulière et que les faits, objet de l'accusation, sont qualifiés crime par la loi ;
REJETTE les pourvois.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 96-86596
Date de la décision : 12/03/1997
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

GARDE A VUE - Droits de la personne gardée à vue - Entretien avec un avocat - Demande d'un avocat commis d'office - Officier de police judiciaire - Obligation.

DROITS DE LA DEFENSE - Garde à vue - Droits de la personne gardée à vue - Entretien avec un avocat - Grève du Barreau - Circonstance insurmontable - Portée

AVOCAT - Commission d'office - Désignation - Suspension - Grève du Barreau - Circonstance insurmontable - Droits de la défense - Portée

Ne sont pas méconnues les dispositions de l'article 63-4 du Code de procédure pénale, dès lors que, d'une part, la décision prise collectivement par un barreau de suspendre toute participation des avocats au service des commissions d'office constitue une circonstance insurmontable, que, d'autre part, il ne résulte d'aucune pièce de la procédure que l'intéressé, averti de l'impossibilité d'être pourvu d'un avocat d'office, ait manifesté la volonté de désigner un avocat personnel et qu'enfin a seul qualité pour commettre d'office un avocat le bâtonnier du ressort dans lequel la personne a été placée en garde à vue. (1).


Références :

Code de procédure pénale 63-4

Décision attaquée : Cour d'appel d'Orléans (chambre d'accusation), 1996-05-30 et 1996-11-14

CONFER : (1°). (1) Cf. Chambre criminelle, 1994-05-09, Bulletin criminel 1994, n° 174, p. 395 (rejet) ;

Chambre criminelle, 1996-02-13, Bulletin criminel 1996, n° 73, p. 214 (rejet)

arrêt cité.


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 12 mar. 1997, pourvoi n°96-86596, Bull. crim. criminel 1997 N° 99 p. 329
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1997 N° 99 p. 329

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Guilloux, conseiller le plus ancien faisant fonction.
Avocat général : Avocat général : M. Cotte.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Farge.
Avocat(s) : Avocat : la SCP Waquet, Farge et Hazan.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1997:96.86596
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