La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/02/1997 | FRANCE | N°95-81352

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 19 février 1997, 95-81352


REJET et AMNISTIE des pourvois formés par :
1° X... Bernard, prévenu,
2° Y... Vincent, Z... Martine, veuve Y..., agissant tant en son nom personnel qu'en sa qualité d'administratrice légale de son fils mineur Cédric Y..., A... Martine, veuve B..., B... Valérie, B... Cédric, parties civiles,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Pfaris, 20e chambre, en date du 15 février 1995, qui, dans les poursuites exercées, d'une part, contre Bernard X..., Pierre C... et Alain D... pour homicide involontaire, et, d'autre part, contre les 2 premiers prévenus pour contravention d'exerc

ice illicite de l'activité de transporteur aérien, a condamné Bernard...

REJET et AMNISTIE des pourvois formés par :
1° X... Bernard, prévenu,
2° Y... Vincent, Z... Martine, veuve Y..., agissant tant en son nom personnel qu'en sa qualité d'administratrice légale de son fils mineur Cédric Y..., A... Martine, veuve B..., B... Valérie, B... Cédric, parties civiles,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Pfaris, 20e chambre, en date du 15 février 1995, qui, dans les poursuites exercées, d'une part, contre Bernard X..., Pierre C... et Alain D... pour homicide involontaire, et, d'autre part, contre les 2 premiers prévenus pour contravention d'exercice illicite de l'activité de transporteur aérien, a condamné Bernard X... à 18 mois d'emprisonnement dont 14 mois avec sursis, pour le délit, et à 800 francs d'amende pour la contravention, a relaxé les 2 autres prévenus, et a prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que la société Garage du Bac a organisé une manifestation destinée à présenter, sur circuit, le dernier modèle d'une marque allemande d'automobile dont elle est concessionnaire ; qu'afin d'assurer le transport des journalistes et photographes invités à couvrir l'opération publicitaire, elle a affrété, par l'intermédiaire de la société " Dynn'Air International ", un avion de tourisme auprès de la société " JC Air ", que dirige Bernard X... ; que l'appareil, piloté par Daniel E..., s'est écrasé peu après le décollage, tous les occupants étant tués dans l'accident ;
Qu'à l'issue d'une information, close par une ordonnance de règlement du 23 mars 1993, Bernard X... ainsi que Pierre C..., dirigeant de la société " Dynn Air International " et Alain D..., préposé de cette société, ont été renvoyés devant le tribunal correctionnel sous la prévention d'homicides involontaires ; que les 2 premiers ont, en outre, été poursuivis pour exercice sans autorisation d'une activité de transport aérien public, contravention prévue et réprimée par les articles R. 330-1 et R. 330-15 du Code de l'aviation civile ;
Attendu que le tribunal a déclaré Bernard X... coupable de ces infractions, le condamnant à diverses peines ainsi qu'à des indemnités sur le fondement de l'article 475-1 du Code de procédure pénale, et a relaxé les 2 autres prévenus ;
Que cette décision a été frappée d'appel par le prévenu condamné, les parties civiles et le ministère public ;
En cet état :
I. Sur le pourvoi formé par Bernard X... ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation : (sans intérêt) ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 323-1, L. 232-2 et L. 422-1 du Code de l'aviation civile, 319 du Code de procédure pénale, 132-19 du nouveau Code pénal et 593 du Code de procédure pénale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Bernard X... coupable de la contravention d'exercice illégal de l'activité de transport public et du délit d'homicide involontaire et l'a condamné à 800 francs d'amende et 18 mois d'emprisonnement dont 14 mois avec sursis ;
" aux motifs propres que les premiers juges ont par ailleurs également relevé à juste titre que le dirigeant de la société " JC Air " ayant pour objet déclaré la location dite " coque nue " d'avions et exploitant à cet effet 2 aéronefs par elle acquis en leasing dont le Cessna 441 type Conquest II accidenté le 17 novembre 1988, s'était toutefois, et sous couvert de cette prétendue opération locative, chargée, en outre, de procurer pour ce même vol, et dans les conditions décrites par le tribunal, un pilote en la personne de Daniel E... dont il est constant qu'il fut en définitive pressenti et désigné par Bernard X... qui l'accompagna de surcroît, le matin même du départ et avec les passagers, jusqu'à l'appareil après avoir pris soin au préalable de faire rouler l'avion ainsi que de faire procéder à un ravitaillement complémentaire de celui-ci et enfin de déposer lui-même à la tour de contrôle de l'aérodrome de Toussus-le-Noble le bilan de vol ; qu'il se déduit ainsi de l'ensemble de ces éléments que la SARL " JC Air ", agissant et représentée par Bernard X..., et qui a mis contre rémunération à la disposition du Garage du Bac et de son sponsor, la société Castrol, un aéronef avec équipage pour un vol aller et retour avec passagers de l'aérodrome de Toussus-le-Noble à celui de Montluçon le 17 novembre 1988 a, ce faisant, pris d'une part et sur le plan contractuel la qualité de fréteur au sens de l'article L. 323-1 du Code de l'aviation civile ; qu'il est d'autre part constant que la SARL " JC Air ", bien que s'étant, moyennant rémunération, livrée ainsi et de façon répétitive, comme il ressort par ailleurs du dossier et des débats, à une activité de transport aérien public, ne disposait pas de l'agrément administratif requis ; qu'il est, dès lors, établi que Bernard X... a, en l'espèce, et nonobstant ses dénégations, contrevenu aux dispositions des articles L. 330 et R. 330 de ce même Code ;
" et adoptés des premiers juges que, quant à Daniel E..., il y a tout lieu de penser qu'il a bien été désigné comme le pilote de l'avion par Bernard X..., puisqu'il résulte de la procédure que la veille au soir dans un restaurant parisien où il dînait en compagnie d'une relation, M. F..., il a fait part à ce dernier de ce qu'il avait un vol à faire le lendemain ; Bernard X... l'a réveillé le 17 au matin ou du moins a vérifié qu'il n'avait pas oublié ; c'est Bernard X... qui a déposé le plan de vol ; à ceci s'ajoute, selon Catherine G..., la concubine de Daniel E..., l'existence d'un accord passé entre eux au terme duquel Daniel E..., au lieu de payer les heures de location de l'avion qu'il avait utilisé pour passer sa formation, devait effectuer, par la suite, des heures de vol pour le compte de " JC Air " ; Bernard X... conteste l'existence de cet accord en arguant du paiement d'une première facture, présentée et honorée, et surtout de la trop longue durée d'un tel contrat compte tenu des tarifs pratiqués ; 5 000 francs l'heure de location de l'appareil contre 500 francs l'heure du pilote ; Bernard X... se présente donc comme le seul lien entre l'initiative de M. H..., formulée par MM. C... et D... et de la désignation de Daniel E... comme pilote de l'avion qu'au nom de " JC Air " il mettait à la disposition des demandeurs contre rémunération ;
" alors que le propriétaire d'un avion qui le loue à un utilisateur ne peut être regardé comme exerçant une activité de transporteur aérien que s'il a la qualité de commettant du pilote mis à disposition du locataire ; qu'en déduisant l'exercice par Bernard X... d'une telle activité de la seule circonstance que celui-ci avait désigné Daniel E... comme pilote de l'avion qu'il louait et de la déclaration, non vérifiée, de la concubine du pilote selon laquelle Daniel E... effectuait des heures de vol pour le compte de Bernard X... en contrepartie d'heures de formation sur ledit avion, sans autrement caractériser l'existence d'un lien de préposition, la cour d'appel a violé les textes visés au moyen " ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 323-1, L. 232-2 et L. 422-1 du Code de l'aviation civile, 319 du Code de procédure pénale, 132-19 du nouveau Code pénal et 593 du Code de procédure pénale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Bernard X... coupable de la contravention d'exercice illégal de l'activité de transport public et du délit d'homicide involontaire et l'a condamné à 800 francs d'amende et 18 mois d'emprisonnement dont 14 mois avec sursis ;
" aux motifs que, préalablement à l'examen des charges susceptibles de peser à l'endroit des prévenus, la Cour se doit de relever tout d'abord, et contrairement à ce qu'énonce Bernard X... dans ses écritures d'appel, qu'il n'est pas nécessaire que les imprudences, négligences, inattentions ou inobservation des règlements telles qu'à lui reprochées par la poursuite et retenues à son encontre par le tribunal soient dans un lien de causalité exclusivement directe avec l'accident mortel incriminé ; qu'il suffit en effet pour asseoir la responsabilité pénale de l'intéressé, comme d'ailleurs celle éventuellement de ses 2 autres coprévenus, qu'il soit en l'occurrence établi que celles-ci, et du moment qu'elles apparaîtraient certaines, aient effectivement concouru, ne fût-ce qu'indirectement, à la survenance de l'accident aérien dont s'agit ; qu'il apparaît de la sorte que le brusque écrasement au sol de l'avion Conquest II, peu après son envol, ne peut avoir eu pour cause directe et immédiate qu'un manque de maîtrise du malheureux pilote dont tous les renseignements recueillis s'accordent à dire que, confronté aux circonstances et de surcroît à des conditions météorologiques difficiles ayant nécessité un décollage aux instruments (IFR), il était peu expérimenté à la conduite de ce type d'appareil ; apparaît tout d'abord et comme devant être retenue à la charge de Bernard X... la faute par lui commise personnellement le matin même du 17 novembre 1988 et qui a consisté, alors qu'il était également présent sur les lieux et qu'il avait eu auparavant connaissance des mauvaises conditions météorologiques dont il s'était lui-même enquis en tant qu'exploitant professionnel au bureau de l'aérodrome, ainsi qu'il en a convenu au cours de son audition du 3 juillet 1989, à ne pas avoir, en l'occurrence, et comme cela s'imposait à lui, fait différer, fût-ce temporairement, et ainsi qu'il en avait le pouvoir sur son préposé, le départ de l'aéronef à défaut de la présence à bord d'un copilote dont l'assistance était impérativement exigée en vertu des normes de sécurité en vigueur lorsque, comme en la circonstance, la visibilité horizontale se trouvait réduite à 200 mètres ; que de plus et toujours en rapport avec l'accident, et alors qu'il est constant que Daniel E... a mal apprécié le centrage de l'appareil en sa partie arrière, force est de constater que Bernard X... a, pour sa part, et en ne se soumettant donc pas à la réglementation en vigueur, privé le pilote de la possibilité de consulter, avant le décollage, le manuel d'exploitation dont la présence à bord était obligatoire pour toute opération de transport public aérien et qui contenait quant aux normes de centrage de plus amples explications que celles données plus sommairement au carnet d'entretien dont a disposé ledit pilote ; que la consultation par ce dernier d'un tel document aurait été de nature à renforcer sa vigilance sur les règles à respecter en matière de centrage, ne serait-ce, et ainsi que l'admet le prévenu dans ses écritures, par la nécessité pour le pilote et avant tout vol de le signer ;
qu'ainsi, et en méconnaissant cette prescription d'ordre réglementaire et qui s'imposait à lui puisque s'agissant d'un transport public aérien, Bernard X... n'a pas mis Daniel E... en mesure de prévenir l'imperfection de centrage dont s'agit et qui, comme l'ont relevé les experts, a contribué à rendre encore plus difficile la conduite de l'avion du fait du manque de stabilité longitudinale qui en est résulté ; qu'en tout état de cause il appartenait à Bernard X..., en tant que dirigeant de la société " JC Air " propriétaire-exploitante de l'avion Conquest II, de veiller avant mise à disposition de cet appareil à son bon état d'entretien et de marche, c'est à juste titre qu'à été relevée à son encontre la faute ayant consisté à ne pas avoir avant l'envol du 17 novembre 1988 fait procéder, notamment à l'occasion de la révision dite des 50 heures intervenue le 28 octobre 1988, à la réparation du couple mètre droit du moteur dont le fonctionnement par intermittence à bas régime lui avait été signalé par les précédents pilotes dudit aéronef ; que la persistance de cette défectuosité, qui a entraîné, en effet, et comme le rappellent les experts aéronautiques, une légère dissymétrie dans l'application des puissances fournies par les moteurs de l'avion au décollage, doit être tenue comme ayant elle aussi contribué à la perte de contrôle de l'aéronef par le pilote ; qu'ainsi, et en définitive, les différentes fautes telles que ci-dessus relevées par la Cour à la charge de Bernard X..., et qui ont donc toutes contribué à la perte de maîtrise de l'avion par Daniel E... à raison du surcroît de tâches qu'elles ont entraîné pour lui, sont effectivement en relation de cause à effet avec l'accident par écrasement au sol dudit aéronef survenu le 17 novembre 1988 ;
" alors que, si le lien de causalité entre les fautes reprochées au prévenu et l'accident peut être indirect, il doit cependant être certain ; qu'ainsi, en l'espèce, où la cause exacte de l'accident, à l'origine du défaut de maîtrise du pilote retenue par la Cour, est demeurée inconnue, celle-ci en retenant à la charge de Bernard X... le fait de ne pas avoir retardé le départ en raison de l'insuffisance de visibilité, de ne pas avoir mis le manuel d'exploitation à la disposition du pilote et de ne pas avoir fait réparer le couple mètre droit, sans constater que ces prétendues carences avaient pu de manière certaine concourir à l'accident, a violé les textes visés au moyen " ;
Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 323-1, L. 232-2 et L. 422-1 du Code de l'aviation civile, 319 du Code de procédure pénale, 132-19 du nouveau Code pénal et 593 du Code de procédure pénale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Bernard X... coupable de la contravention d'exercice illégal de l'activité de transport public et du délit d'homicide involontaire et l'a condamné à 800 francs d'amende et 18 mois d'emprisonnement dont 14 mois avec sursis ;
" aux motifs qu'il apparaît de la sorte que le brusque écrasement au sol de l'avion Conquest II, peu après son envol, ne peut avoir eu pour cause directe et immédiate qu'un manque de maîtrise du malheureux pilote dont tous les renseignements recueillis s'accordent à dire que, confronté aux circonstances et de surcroît à des conditions météorologiques difficiles ayant nécessité un décollage aux instruments (IFR), il était peu expérimenté à la conduite de ce type d'appareil ; qu'à partir de telles constatations il n'incombe désormais plus à la Cour que de rechercher si, en l'espèce, et comme le soutient la poursuite, les divers manquements reprochés aux prévenus, et touchant soit à l'organisation même ou aux conditions de sécurité du vol entrepris, soit aux conditions d'exploitation ou encore d'entretien de l'aéronef, ont également concouru à cette catastrophe aérienne et se trouvent en conséquence en relation de cause à effet avec ledit accident ; qu'il apparaît tout d'abord et comme devant être retenue à la charge de Bernard X... la faute par lui commise personnellement le matin même du 17 novembre 1988 et qui a consisté, alors qu'il était également présent sur les lieux et qu'il avait eu auparavant connaissance des mauvaises conditions météorologiques dont il s'était lui-même enquis en tant qu'exploitant professionnel au bureau de l'aérodrome, ainsi qu'il en a convenu au cours de son audition du 3 juillet 1989, à ne pas avoir, en l'occurrence, et comme cela s'imposait à lui, fait différer, fût-ce temporairement, et ainsi qu'il en avait le pouvoir sur son préposé, le départ de l'aéronef à défaut de la présence à bord d'un copilote dont l'assistance était impérativement exigée en vertu des normes de sécurité en vigueur lorsque, comme en la circonstance, la visibilité horizontale se trouvait réduite à 200 mètres ; que de plus et toujours en rapport avec l'accident, et alors qu'il est constant que Daniel E... a mal apprécié le centrage de l'appareil en sa partie arrière, force est de constater que Bernard X... a, pour sa part, et en ne se soumettant donc pas à la réglementation en vigueur, privé le pilote de la possibilité de consulter, avant le décollage, le manuel d'exploitation dont la présence à bord était obligatoire pour toute opération de transport public aérien et qui contenait quant aux normes de centrage de plus amples explications que celles données plus sommairement au carnet d'entretien dont a disposé ledit pilote ; que la consultation par ce dernier d'un tel document aurait été de nature à renforcer sa vigilance sur les règles à respecter en matière de centrage, ne serait-ce, et ainsi que l'admet le prévenu dans ses écritures, par la nécessité pour le pilote et avant tout vol de le signer ; qu'ainsi, et en méconnaissant cette prescription d'ordre réglementaire et qui s'imposait à lui puisque s'agissant d'un transport public aérien, Bernard X... n'a pas mis Daniel E... en mesure de prévenir l'imperfection de centrage dont s'agit et qui, comme l'ont relevé les experts, a contribué à rendre encore plus difficile la conduite de l'avion du fait du manque de stabilité longitudinale qui en est résulté ;
qu'en tout état de cause il appartenait à Bernard X..., en tant que dirigeant de la société " JC Air " propriétaire-exploitante de l'avion Conquest II, de veiller avant mise à disposition de cet appareil à son bon état d'entretien et de marche, c'est à juste titre qu'à été relevée à son encontre la faute ayant consisté à ne pas avoir avant l'envol du 17 novembre 1988 fait procéder, notamment à l'occasion de la révision dite des 50 heures intervenue le 28 octobre 1988, à la réparation du couple mètre droit du moteur dont le fonctionnement par intermittence à bas régime lui avait été signalé par les précédents pilotes dudit aéronef ; que la persistance de cette défectuosité, qui a entraîné, en effet, et comme le rappellent les experts aéronautiques, une légère dissymétrie dans l'application des puissances fournies par les moteurs de l'avion au décollage, doit être tenue comme ayant elle aussi contribué à la perte de contrôle de l'aéronef par le pilote ; qu'ainsi, et en définitive, les différentes fautes telles que ci-dessus relevées par la Cour à la charge de Bernard X..., et qui ont donc toutes contribué à la perte de maîtrise de l'avion par Daniel E... à raison du surcroît de tâches qu'elles ont entraîné pour lui, sont effectivement en relation de cause à effet avec l'accident par écrasement au sol dudit aéronef survenu le 17 novembre 1988 ;
" alors que, d'une part, en affirmant d'un côté qu'elle n'avait plus à s'interroger sur le rôle causal de divers manquements reprochés aux prévenus, et touchant soit à l'organisation même ou aux conditions de sécurité du vol entrepris, soit aux conditions d'exploitation ou encore d'entretien de l'aéronef et en retenant à la charge de Bernard X... de ne pas avoir retardé le départ en raison de l'insuffisance de visibilité, de ne pas avoir mis à la disposition du pilote un manuel d'utilisation et enfin de ne pas avoir fait réparer le couple mètre droit, c'est-à-dire des manquements touchant à la sécurité du vol et aux conditions d'exploitation et d'entretien de l'appareil, la cour d'appel a entaché son arrêt d'une contradiction de motifs ;
" alors que, d'autre part, il résulte de l'article L. 422-1 du Code de l'aviation civile qu'il appartient au seul commandant de bord de déterminer la répartition du chargement à bord de l'appareil et de différer le départ pour des raisons de sécurité ; qu'ainsi en imputant à Bernard X..., propriétaire de l'appareil qui l'avait confié au pilote Daniel E..., le décollage en dépit d'une visibilité insuffisante et le mauvais centrage de l'appareil, la cour d'appel a violé les textes visés au moyen " ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que, pour déclarer Bernard X... coupable d'exercice illicite d'une activité de transport aérien public, la cour d'appel relève que ce dernier a, sous le couvert d'une location d'aéronef " coque nue ", fourni à la société Garage du Bac un appareil, dont il a défini le plan de vol et désigné le pilote ; qu'elle ajoute qu'il a frété cet appareil, contre rémunération, pour assurer le transport de passagers d'un aérodrome à un autre, réalisant ainsi une opération de transport aérien public sans disposer de l'agrément administratif requis, ce qu'il faisait de façon habituelle ;
Que les juges retiennent, pour caractériser le délit d'homicide involontaire, qu'en contrevenant ainsi aux prescriptions de l'article L. 323-2 du Code de l'aviation civile, Bernard X..., qui s'est soustrait non seulement à la procédure d'agrément et notamment aux contrôles portant sur les conditions d'exploitation des aéronefs et sur la formation des équipages, mais encore aux prescriptions réglementaires régissant la sécurité des transports aériens, a placé le pilote, de surcroît peu expérimenté, en situation de commettre des fautes graves qui, jointes à des conditions climatiques difficiles et à un mauvais réglage des moteurs, l'ont amené à perdre la maîtrise de son appareil lors du décollage ;
Qu'en l'état de ces motifs, d'où il résulte que les manquements imputables au prévenu, dont elle caractérise l'activité de transport aérien, ont contribué à la réalisation de l'accident en créant les conditions qui l'ont rendu possible, la cour d'appel a justifié sa décision sans encourir aucun des griefs allégués ;
Que les moyens ne peuvent, dès lors, qu'être écartés ;
Sur le cinquième moyen de cassation : (sans intérêt) ;
II. Sur le pourvoi formé par les consorts B... :
Attendu qu'aucun moyen n'est produit à l'appui de ce pourvoi ;
III. Sur le pourvoi formé par les consorts Y... ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense :
Sur le moyen unique de cassation : (sans intérêt) ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE les pourvois ;
Et, vu l'article 1er de la loi du 3 août 1995 portant amnistie :
CONSTATE qu'est amnistiée de plein droit la contravention à l'article R. 330-15 du Code de l'aviation civile.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 95-81352
Date de la décision : 19/02/1997
Sens de l'arrêt : Rejet et amnistie
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1° NAVIGATION AERIENNE - Transport aérien public - Aviation civile - Exercice sans autorisation d'une activité de transport aérien public - Contravention.

1° Le propriétaire d'un avion de tourisme qui, de façon habituelle, met cet appareil à la disposition d'affréteurs, après avoir défini le plan de vol et désigné le pilote, afin d'assurer le transport de passagers d'un aérodrome à un autre, commet, s'il ne dispose pas de l'autorisation prévue par l'article L. 330-1 du Code de l'aviation civile dans sa rédaction issue de la loi du 30 décembre 1982, alors applicable , la contravention d'exercice illicite d'une activité de transport aérien public, réprimée par l'article R. 330-15 du Code de l'aviation civile(1).

2° HOMICIDE ET BLESSURES INVOLONTAIRES - Faute - Inobservation des règlements - Transporteur aérien - Exercice sans autorisation d'une activité de transport aérien public.

2° NAVIGATION AERIENNE - Homicide et blessures involontaires - Faute - Transporteur aérien - Exercice d'une activité de transport aérien public sans autorisation.

2° Justifie sa décision la cour d'appel qui, pour déclarer un transporteur aérien coupable d'homicides involontaires, retient que ce dernier, qui, en exerçant son activité sans l'autorisation requise, s'est soustrait aux contrôles préalables sur les conditions d'exploitation des aéronefs et sur la formation des équipages mais aussi aux prescriptions réglementaires régissant la sécurité des transports aériens, a placé le pilote de l'appareil en situation de commettre des fautes graves qui, jointes à des conditions climatiques difficiles et à un mauvais réglage des moteurs, l'ont amené à perdre la maîtrise de son appareil qui s'est écrasé au sol.


Références :

1° :
2° :
Code de l'aviation civile L323-1, L232-2, L422-1
Code de l'aviation civile L330-1 (rédaction loi 82-1153 du 30 décembre 1982), R330-15
Code de procédure pénale 319
nouveau Code pénal 132-19

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 15 février 1995

CONFER : (1°). (1) A rapprocher : Chambre criminelle, 1991-10-23, Bulletin criminel 1991, n° 372, p. 924 (rejet : arrêts n°s 1 et 2).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 19 fév. 1997, pourvoi n°95-81352, Bull. crim. criminel 1997 N° 69 p. 222
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1997 N° 69 p. 222

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Le Gunehec
Avocat général : Avocat général : M. Cotte.
Rapporteur ?: Rapporteur : Mme Verdun.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Boré et Xavier, la SCP Guiguet, Bachellier et Potier de la Varde, la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1997:95.81352
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award