Vu leur connexité, joint les pourvois nos 95-41.694 et 95-41.695 ;
Attendu que Mme Y... et Mme X..., employées en qualité de manutentionnaires par la société Usai Champignons, ont été licenciées pour motif économique le 9 septembre 1992 ;
Sur le premier moyen, commun aux pourvois :
Attendu que l'employeur fait grief aux arrêts attaqués (Riom, 16 janvier 1995) d'avoir décidé que les salariées avaient droit à un rappel de salaires au titre de l'égalité entre hommes et femmes, alors, selon le moyen, d'une part, qu'il ressort des dispositions de l'article L. 140-2 du Code du travail que l'employeur n'est tenu de verser une rémunération identique aux salariés de sexes différents appartenant à une même catégorie que si le travail qu'ils effectuent est le même ou de valeur égale ; qu'il s'ensuit qu'en s'abstenant de rechercher si, ainsi que l'avait fait valoir l'employeur dans ses écritures d'appel, les manutentionnaires hommes, en particulier M. Z..., qui exécutaient des travaux de chargement et de déchargement, portaient des charges lourdes et travaillaient la nuit, n'effectuaient pas un travail beaucoup plus pénible que celui des manutentionnaires femmes, consistant exclusivement à trier les champignons, et si cette dernière circonstance n'était pas susceptible de justifier, en dehors de toute considération tenant au sexe des intéressés, une inégalité de rémunération, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions du texte susvisé ; alors, d'autre part, qu'en s'abstenant de rechercher si, en produisant diverses attestations de manutentionnaires hommes et femmes, selon lesquelles les premiers, contrairement aux secondes, procédaient au chargement et au déchargement de camions et portaient des charges lourdes, l'employeur n'avait pas fait état d'éléments, tels que prévus par l'article L. 140-8 du Code du travail, de nature à justifier l'inégalité de rémunération en cause, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des dispositions de ce texte ;
Mais attendu que, procédant à la recherche invoquée et examinant l'ensemble des pièces produites par l'employeur, la cour d'appel a constaté que les hommes occupant le même emploi de manutentionnaires que les femmes étaient systématiquement payés davantage et que cette différence n'était justifiée par aucun élément objectif en ce qui concerne la valeur du travail effectué et le caractère pénible des tâches accomplies par les uns et par les autres ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen, commun aux pourvois :
Attendu que l'employeur fait aussi grief aux arrêts de l'avoir condamné à payer une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen, d'une part, que n'ôte pas à un licenciement son caractère économique le fait que l'employeur, après son prononcé, ait fait appel en nombre limité et pendant de courtes périodes à des travailleurs temporaires ; que, dès lors, en se fondant, pour considérer que le poste de Mlle Y... n'avait pas été supprimé, sur le fait que, postérieurement au départ de la salariée, l'employeur avait successivement engagé pendant quelques semaines divers manutentionnaires saisonniers par contrats de travail à durée déterminée, la cour d'appel a violé l'article L. 321-1 du Code du travail ; alors, d'autre part, qu'il résulte de l'article L. 321-14 du Code du travail que le salarié licencié pour motif économique entendant bénéficier de la priorité de réembauchage doit en informer l'employeur dans le délai de 4 mois à compter de la rupture de son contrat de travail ; qu'il s'ensuit qu'en s'abstenant de rechercher, ainsi qu'elle y était invitée par les écritures d'appel de la société Usai Champignons, si Mlle Y... ne s'était pas effectivement abstenue de demander à bénéficier de cette priorité la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions du texte susvisé ; alors, enfin, qu'il ressort des dispositions de l'article L. 321-4-1 du Code du travail que l'obligation de reclassement du salarié licencié pour motif économique est subordonnée à l'existence d'un poste disponible ; que, dès lors, en statuant comme ils l'ont fait, sans cependant rechercher, ainsi qu'ils y étaient invités par les conclusions d'appel de la société Usai Champignons, si cette dernière n'avait pas été dans l'impossibilité de procéder au reclassement de Mlle Y... au sein de sa filiale de Brive, compte tenu des mauvais résultats que cette dernière avait enregistrés, les juges d'appel n'ont pas donné de base légale à leur décision au regard des dispositions du texte susvisé ;
Mais attendu que la cour d'appel, ayant relevé qu'après le licenciement des deux salariées la société avait eu recours, de manière systématique, à des embauches de manutentionnaires sous contrats à durée déterminée, a pu décider que les emplois n'avaient pas été supprimés ; que, par ce seul motif, elle a légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois.