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21/01/1997 | FRANCE | N°95-84204

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 21 janvier 1997, 95-84204


REJET du pourvoi formé par :
- X... Louise, épouse Y...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Lyon, chambre correctionnelle, en date du 6 juin 1996, qui, pour infraction à l'article L. 324-9 du Code du travail, l'a condamnée à 10 000 francs d'amende et a ordonné la publication de la décision.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles L. 324-9, L. 324-10, L. 324-11, L. 362-3 du Code du travail, 593 du Code de procédure pénale, défaut de réponse aux conclusions, défaut de motifs, manque de base légale : <

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REJET du pourvoi formé par :
- X... Louise, épouse Y...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Lyon, chambre correctionnelle, en date du 6 juin 1996, qui, pour infraction à l'article L. 324-9 du Code du travail, l'a condamnée à 10 000 francs d'amende et a ordonné la publication de la décision.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles L. 324-9, L. 324-10, L. 324-11, L. 362-3 du Code du travail, 593 du Code de procédure pénale, défaut de réponse aux conclusions, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré la prévenue coupable d'infraction aux dispositions réprimant le travail clandestin ;
" aux motifs que, contrairement aux indications figurant dans le procès-verbal des agents de l'URSSAF, un document intitulé contrat, daté du 2 janvier 1992, avait été signé entre la SARL Fraic'Heure et la SA Le Gourmet Forézien, ayant pour objet le triage des légumes dans les locaux de cette dernière ; qu'en outre la demanderesse dirigeante de la SA Le Gourmet Forézien, entendue par la Cour et prenant quelque distance avec les conclusions déposées, admet de la façon la plus nette que : elle fournissait à la SARL Fraic'Heure les couteaux et les coupeuses, elle fixait elle-même les tarifs de Fraic'Heure (sa prétendue sous-traitante), elle achetait elle-même les légumes que préparait la SARL Fraic'Heure, directement livrés à celle-ci par les fournisseurs, la SARL Fraic'Heure utilisait gratuitement les locaux, malgré l'interdiction de sous-louer figurant dans le bail dont bénéficiait la SA Le Gourmet Forézien, la SA Le Gourmet Forézien payait l'eau et l'électricité utilisées par la SARL Fraic'Heure, elle n'a jamais demandé à la SARL Fraic'Heure si celle-ci s'acquittait de ses obligations au regard de l'article L. 324-10 du Code du travail (en fait ce n'est qu'en date du 19 août 1993 après le début des opérations de contrôle qu'une telle attestation sur l'honneur a été établie par la SARL Fraic'Heure), après la disparition de la SARL Fraic'Heure, la SA Le Gourmet Forézien n'a pas eu recours à un nouveau sous-traitant, mais a repris elle-même cette activité ; qu'il est par ailleurs établi qu'aucune enseigne ou plaque ne mentionnait l'existence de la SARL Fraic'Heure qui, occupant des locaux mis gratuitement à sa disposition par la SA Le Gourmet Forézien, n'avait aucun autre client ; qu'il appartient aux juridictions répressives de rechercher la véritable nature des conventions intervenues entre les parties et de leur restituer leur qualification réelle ; qu'en l'espèce la SARL Fraic'Heure se trouvait vis-à-vis de la SA Le Gourmet Forézien dans une situation de subordination majeure, en ne disposant d'aucun pouvoir de négociation, d'aucune autonomie, ne pouvant que se conformer, au jour le jour, aux directives de la SA Le Gourmet Forézien, laquelle déterminait le volume des légumes à traiter et le taux de la rémunération ; qu'au lieu de constituer un contrat de sous-traitance de telles relations s'analysent en une opération à but lucratif de fourniture de main-d'oeuvre par un entrepreneur clandestin ; que la complète subordination dans laquelle se trouvait la SARL Fraic'Heure et le défaut total de vérification, jusqu'au 19 août 1993, de l'accomplissement des obligations de la SARL Fraic'Heure au regard de l'article L. 324-10 du Code du travail, démontrent que la demanderesse a " sciemment " eu recours aux services d'une personne exerçant une activité clandestine à laquelle elle pouvait imposer des prix n'assurant pas la rentabilité de l'exploitation ;
" alors que, d'une part, seuls l'accomplissement d'actes de commerce ou l'exercice par une personne qui se soustrait à l'une des obligations, mentionnées par l'article L. 324-10 du Code du travail d'une activité de production, de transformation, de réparation ou de prestation de services, peuvent être regardés comme un travail clandestin prohibé par l'article L. 324-9 de ce Code ; qu'en l'espèce la cour d'appel ne pouvait, pour entrer en voie de condamnation, retenir que la société Fraic'Heure exerçait son activité sans posséder de fonds de commerce alors que le bail n'est pas un élément essentiel du fonds et qu'un client unique suffit à constituer le fonds ; qu'il est établi que la société Fraic'Heure travaillait pour la société Le Gourmet Forézien et non pour les clients de celle-ci ; qu'elle possédait donc un fonds de commerce ; qu'en se fondant sur des motifs erronés la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;
" alors, d'autre part, que l'infraction poursuivie suppose, non seulement l'exécution d'un travail répondant à la définition visée par l'article L. 324-10 du Code du travail, mais encore la soustraction intentionnelle du prévenu à l'une des obligations énumérées par le texte susvisé ; qu'en l'espèce, en se bornant à relever que la demanderesse avait " sciemment " eu recours aux services d'une personne exerçant une activité clandestine sans répondre aux chefs péremptoires des conclusions d'appel de l'exposante soulignant qu'elle ignorait totalement la situation de Christian Z... et qu'elle ne disposait d'aucun pouvoir d'investigation ni de police au sein de l'entreprise Fraic'Heure ; que Christian Z... payait son personnel et lui remettait des fiches de paie en sorte qu'aucune réclamation n'a jamais été adressée à celui-ci jusqu'en janvier 1993 ; que la demanderesse ne pouvait connaître la situation irrégulière de Christian Z... que celui-ci a toujours dissimulée ; que la preuve de l'élément intentionnel fait donc défaut " ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que la SARL Fraic'Heure exerçait dans les locaux et pour le compte de son unique client la SA Le Gourmet Forézien, une activité de lavage et préparation de légumes ; que Christian Z..., gérant de la première, a été condamné pour travail clandestin pour s'être soustrait aux obligations prévues par l'article L. 324-10 du Code du travail ;
Attendu que, pour déclarer Louise X..., dirigeante de la société anonyme précitée, coupable du délit prévu par l'article L. 324-9, alinéa 2, du Code du travail, l'arrêt attaqué relève que la durée des relations commerciales entre la SA Gourmet Forézien et la SARL Fraic'Heure, les conditions de leur exercice et le fait que la prévenue n'a effectué aucune des vérifications prévues par l'article L. 324-14 du Code précité, concernant les obligations auxquelles la SARL Fraic'Heure était soumise, démontrent que Mme X...a sciemment eu recours aux services d'une société qui effectuait un travail clandestin ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, qui répondent aux conclusions de la prévenue, les juges ont caractérisé en tous ses éléments constitutifs, tant matériels qu'intentionnel, le délit poursuivi et ainsi justifié leur décision ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 95-84204
Date de la décision : 21/01/1997
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

TRAVAIL - Travail clandestin - Recours aux services de celui qui exerce une activité clandestine - Eléments constitutifs - Elément intentionnel.

L'élément intentionnel du délit prévu par l'article L. 324-10 du Code du travail peut être déduit de l'ancienneté et la nature des relations commerciales entre la prévenue et l'entreprise clandestine aux services de laquelle elle avait recours sans avoir effectué aucune des vérifications imposées par l'article L. 324-14 dudit Code.


Références :

Code du travail L324-10, L324-14

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon (chambre correctionnelle), 06 juin 1995


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 21 jan. 1997, pourvoi n°95-84204, Bull. crim. criminel 1997 N° 21 p. 50
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1997 N° 21 p. 50

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Milleville, conseiller doyen faisant fonction.
Avocat général : Avocat général : M. Dintilhac.
Rapporteur ?: Rapporteur : Mme Fossaert-Sabatier.
Avocat(s) : Avocat : M. Choucroy.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1997:95.84204
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