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21/01/1997 | FRANCE | N°94-19019

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 21 janvier 1997, 94-19019


Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 11 juillet 1994), que les statuts de la Caisse de prévoyance et de retraite du personnel (CPRP) de la Société des auteurs compositeurs et éditeurs de musique (SACEM) prévoient que le financement de la CPRP est assuré par la contribution annuelle de la SACEM et par la cotisation des salariés consistant en une retenue mensuelle sur les salaires ; qu'en raison d'études actuarielles faisant état de prévisions qu'elle jugeait préoccupantes, la SACEM, appliquant les statuts de la caisse de retraite, a provoqué la réunion d'une assemblée gé

nérale extraordinaire de la CPRP qui, le 18 octobre 1990, modifi...

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 11 juillet 1994), que les statuts de la Caisse de prévoyance et de retraite du personnel (CPRP) de la Société des auteurs compositeurs et éditeurs de musique (SACEM) prévoient que le financement de la CPRP est assuré par la contribution annuelle de la SACEM et par la cotisation des salariés consistant en une retenue mensuelle sur les salaires ; qu'en raison d'études actuarielles faisant état de prévisions qu'elle jugeait préoccupantes, la SACEM, appliquant les statuts de la caisse de retraite, a provoqué la réunion d'une assemblée générale extraordinaire de la CPRP qui, le 18 octobre 1990, modifiant ses statuts, a décidé d'augmenter la contribution annuelle de la SACEM ; que, par note du 28 janvier 1991 relative à l'augmentation annuelle des salaires, la SACEM informait son personnel qu'une partie égale à 0,31 % de l'augmentation serait versée à la CPRP ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la SACEM fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré recevable l'action des syndicats tendant à faire juger que le processus mis en oeuvre par l'employeur à compter du 1er janvier 1991, et ayant consisté à freiner l'augmentation de certains éléments des salaires, constituait une modification irrégulière de la participation des salariés au financement de la CPRP et d'avoir dit que la modification des statuts votée par l'assemblée générale extraordinaire de la CPRP du 18 octobre 1990 était sans incidence sur la participation des salariés et des retraités au financement de la CPRP, alors, selon le moyen, que l'employeur est libre, dès lors qu'il ne porte atteinte à aucun droit légal ou conventionnel, de décider du montant de l'augmentation annuelle des salaires octroyée à ses employés ; que la décision par laquelle il limite cette augmentation annuelle, afin de dégager des sommes pour les affecter au financement d'une caisse de retraite, relève de cette liberté et des seuls rapports salariaux l'unissant à ses employés, sans porter atteinte à l'intérêt collectif de la profession ; que, dès lors, seuls les salariés ont personnellement qualité pour agir éventuellement en contestation de cette décision qui ne concerne que le montant de leurs salaires individuels ; que les syndicats ne peuvent exercer, au lieu et place des salariés, de tels droits individuels, de sorte que la cour d'appel a violé l'article L. 411-1 du Code du travail ;

Mais attendu qu'aux termes de l'article L. 411-1 du Code du travail, les syndicats professionnels peuvent devant toutes les juridictions exercer tous les droits réservés à la partie civile relativement aux faits portant un préjudice direct ou indirect à la profession qu'ils représentent ;

Et attendu que la cour d'appel a relevé qu'après avoir annoncé une augmentation des salaires l'employeur en avait affecté une fraction au financement de la caisse de retraite, cette retenue figurant sur les bulletins de paie ; qu'elle en a exactement déduit que la demande des syndicats, qui portait, non sur le montant de l'augmentation, mais sur l'affectation d'une partie de cette augmentation en violation de l'article R. 731-8 du Code de la sécurité sociale décidée unilatéralement par l'employeur, touchait à l'intérêt collectif de la profession et que cette demande était donc recevable ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen :

Attendu que la SACEM fait encore grief à l'arrêt d'avoir ainsi statué, alors, selon le moyen, que l'employeur est libre, dès lors qu'il ne porte atteinte à aucune disposition légale ou conventionnelle, de fixer le montant de l'augmentation de salaire qu'il consent à ses employés ; que la SACEM était donc en droit de fixer à 0,64 % pour certains éléments de salaires le montant de l'augmentation consentie au premier trimestre de l'année 1991 ; que sa décision à cet égard, et celle d'affecter 0,31 % supplémentaire, qu'elle aurait pu ajouter ou non à la précédente augmentation, au financement de la Caisse, ne consacraient aucune atteinte à un droit acquis des salariés ; qu'il ne s'agissait donc en aucun cas d'une modification des rapports directs desdits salariés avec la Caisse, de sorte que les dispositions des articles R. 731-8 du Code de la sécurité sociale et 5, paragraphe 4, des statuts de la Caisse étaient sans application en l'espèce où étaient seuls concernés les rapports salariaux directs de la SACEM et de ses employés ; qu'en statuant comme elle l'a fait, en confondant ainsi les rapports des employés avec la caisse et ceux qu'ils entretenaient avec la SACEM, seuls en cause, la cour d'appel a violé ensemble les articles 1134, 1165 du Code civil et R. 731-8 du Code de la sécurité sociale ;

Mais attendu que la cour d'appel a décidé à bon droit qu'en affectant unilatéralement aux cotisations du personnel une fraction de l'augmentation salariale qu'elle avait consentie, la SACEM avait, d'une part, privé les salariés d'une partie de l'augmentation décidée par lui en violation de l'effet obligatoire de son engagement unilatéral, d'autre part, modifié la contribution des salariés au régime de retraite complémentaire en violation des dispositions de l'article R. 731-8 du Code de la sécurité sociale ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 94-19019
Date de la décision : 21/01/1997
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

1° SYNDICAT PROFESSIONNEL - Action en justice - Conditions - Intérêt collectif de la profession - Affectation unilatérale d'une partie d'augmentation de salaire.

1° SYNDICAT PROFESSIONNEL - Action en justice - Conditions - Intérêt collectif de la profession - Engagement de l'employeur à accorder certains avantages - Inobservation 1° CONTRAT DE TRAVAIL - EXECUTION - Employeur - Pouvoir de direction - Engagement unilatéral - Inobservation - Portée.

1° Aux termes de l'article L. 411-1 du Code du travail, les syndicats professionnels peuvent devant toutes les juridictions exercer tous les droits réservés à la partie civile relativement aux faits portant un préjudice direct ou indirect à la profession qu'ils représentent. La demande de syndicats, portant, non sur le montant de l'augmentation des salaires, mais sur l'affectation de partie de cette augmentation décidée unilatéralement par l'employeur en violation de l'article R. 731-8 du Code de la sécurité sociale, touche à l'intérêt collectif de la profession.

2° CONTRAT DE TRAVAIL - EXECUTION - Employeur - Pouvoir de direction - Engagement unilatéral - Inobservation - Affectation unilatérale d'une partie d'augmentation de salaire - Portée.

2° En affectant unilatéralement aux cotisations du personnel une fraction de l'augmentation salariale qu'il avait consentie, l'employeur a, d'une part, privé les salariés d'une partie de l'augmentation décidée par lui en violation de l'effet obligatoire d'un engagement unilatéral, d'autre part, modifié la contribution des salariés au régime de retraite complémentaire en violation des dispositions de l'article R. 731-8 du Code de la sécurité sociale.


Références :

Code de la sécurité sociale R731-8
Code du travail L411-1

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 11 juillet 1994

A RAPPROCHER : (1°). Chambre sociale, 1987-06-25, Bulletin 1987, V, n° 432, p. 273 (rejet).


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 21 jan. 1997, pourvoi n°94-19019, Bull. civ. 1997 V N° 30 p. 19
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1997 V N° 30 p. 19

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Gélineau-Larrivet .
Avocat général : Avocat général : M. de Caigny.
Rapporteur ?: Rapporteur : Mme Barberot.
Avocat(s) : Avocats : Mme Thomas-Raquin, la SCP Masse-Dessen, Georges et Thouvenin.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1997:94.19019
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