Attendu que, par un acte du 19 novembre 1991 établi par M. X..., notaire, la SCI Cekar a consenti un bail commercial à la société SBL France ; qu'ayant ultérieurement appris que le règlement de copropriété de l'immeuble interdisait l'exercice dans les lieux loués d'une activité commerciale, cette société a demandé l'annulation du bail et la réparation de ses préjudices, dont celui relatif à un manque à gagner ; que la SCI Cekar a, pour sa part, sollicité la garantie du notaire pour les condamnations qui seraient prononcées contre elle, ainsi que l'indemnisation de ses préjudices consistant dans la perte de loyers consécutive à l'annulation du bail et dans un trouble financier ; que l'arrêt attaqué a accueilli ces demandes ;
Sur le premier moyen du pourvoi principal de M. X..., et le moyen unique du pourvoi provoqué de la SCI Cekar, pris en leurs secondes branches, qui sont identiques :
Vu l'article 1382 du Code civil ;
Attendu que, pour accorder à la société SBL France une indemnisation, au titre de son manque à gagner, l'arrêt énonce que celui-ci est, quant à lui, trop hypothétique pour le retenir comme chef de préjudice, mais qu'il convient toutefois d'indemniser forfaitairement la perte certaine d'une chance équitablement évaluée à la somme de 50 000 francs ;
Attendu qu'en statuant ainsi, sans caractériser la chance dont la perte était ainsi réparée, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard du texte susvisé ;
Et sur le second moyen du pourvoi principal, pris en sa première branche :
Vu l'article 1382 du Code civil ;
Attendu que, pour condamner M. X... à garantir la SCI Cekar de toutes les condamnations prononcées contre elle et à réparer les préjudices subis par elle et résultant de la perte des loyers et d'un trouble financier, l'arrêt énonce que cette société était fondée à lui reprocher ses manquements à ses obligations de rédacteur d'acte ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait relevé, après avoir admis l'existence d'une erreur valant vice du consentement du preneur, que " le dol pourrait même être caractérisé en retenant la réticence du bailleur qui en sa qualité de propriétaire avait nécessairement connaissance du règlement de l'immeuble dont il n'a pourtant pas révélé l'existence à la candidate locataire ", et que la responsabilité de la nullité du bail incombait juridiquement au premier chef à la société Cekar, dont elle avait ainsi caractérisé la mauvaise foi, tout en précisant, par ailleurs, que ce qui était reproché au notaire c'était " de ne pas avoir attiré l'attention des parties sur la nécessité d'une activité strictement artisanale, et sur les difficultés susceptibles de s'élever au regard du règlement de copropriété ", la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la première branche du premier moyen du pourvoi principal et du moyen unique du pourvoi provoqué, ni sur la seconde branche du second moyen du pourvoi principal :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a, d'une part, condamné M. X... et la SCI Cekar, in solidum, à indemniser la société SBL France d'une perte de chance évaluée à la somme de 50 000 francs, et d'autre part, condamné M. X... à garantir la SCI Cekar de toutes les condamnations prononcées contre cette société et à l'indemniser des préjudices subis par elle et résultant de la perte des loyers et d'un trouble financier, le tout pour la somme de 179 614,40 francs, l'arrêt rendu le 28 juin 1994, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée.